On parle ici de police administrative générale, cependant qu'il existe divers textes qui sont venus charger le président d'APC de très complexes polices spéciales, qui mettent à la charge du président de l'Assemblée populaire communale de lourdes responsabilités auxquelles il ne peut pas faire face. Ces polices spéciales sont normalement assignables aux services déconcentrés dûment missionnés et désignés par les textes les créant, qui les responsabilisent. Au final, c'est le wali qui signe les décisions, préparées par les services concernés, qui sanctionnent l'infraction constatée. Sauf infraction aux règles de l'urbanisme, dont la responsabilité est exclusivement à sa charge, le président d'APC n'a pas à intervenir lorsqu'il y'a une infraction commise à l'encontre d'un domaine couvert par une police spéciale. Il ne doit, ni ne peut constater, ni réprimer les atteintes à l'ordre public d'un nouveau type qui nécessite des compétences particulières (atteintes à l'environnement, respect des normes d'exploitation dans les usines ou ateliers de toute sorte, contrôle des installations classées, pollutions diverses, contrôle des risques sanitaires, contrôle des denrées alimentaires, des établissements de santé, police des jeux et des spectacles, activités des établissements dangereux et insalubres etc.) sauf si une loi l'habilite spécifiquement ou bien qu'il constate la défaillance d'un service de l'Etat. Dans ce dernier cas, il doit tout de même en informer préalablement le wali. C'est dire, que l'argument que police générale et police spéciale coopérant et se complétant tombe de lui-même, au regard de la nécessité de déterminer la responsabilité des services ou des personnes, agissant dans le cadre de l'une ou de l'autre de ces polices. La constatation que telle partie n'a pas pris les mesures d'éviction ou de containement vis-à-vis de quelques activités ou d'évènements, dont l'inaction s'est soldée par un dommage ou un sinistre, requiert de déterminer le service défaillant dont la responsabilité (professionnelle, civile ou même pénale) sera susceptible d'être mise en jeu. N'oublions pas aussi, qu'il existe des contrôles qui doivent être exercés directement par certains ministères et par quelques autorités administratives indépendantes, telles l'ARPCE (autorité de régulation de la poste et des communications électroniques), l'ARAV (autorité de régulation de l'audiovisuel), pour réguler certains secteurs sensibles ou stratégiques et qui disposent d'un pouvoir de police administrative dans leur champ de compétences.
*de sa qualité d'officier de police judiciaire
Cette qualité conférée au président d'APC par l'article 19 du code de procédure pénale, et par l'article 92 de la loi communale est pour le moins discutable. Ce n'est pas parce que certains pays maintiennent dans leur législation cette particularité, qu'il faut faire pareillement. Il faut, raison garder et reconnaitre qu'un président d'APC ne peut souscrire aux dispositions de l'alinéa 3, article 12 du code de procédure pénale qui prescrit que la police judiciaire est « chargée de constater les infractions pénales, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs tant qu'une information n'est pas ouverte ». Il ne pourra pas davantage arrêter ou déférer les auteurs de crimes ou délit devant les juridictions répressives. Dans la pratique, on ne voit pas un président d'APC s'acquitter d'une mission si importante, alors que ni lui, ni ses collaborateurs ne sont censés avoir reçu une formation dans le domaine. Dans le pire des cas, il peut lui-même se retrouver partie prenante dans un procès, pour peu qu'il aurait ignoré d'appliquer telle ou telle forme ou procédure. Sachant que la police nationale et la gendarmerie nationale sont présentes à travers les 1541 communes d'Algérie et que ces deux institutions, disposent en quantité et en qualité d'une pléiade d'officiers de police judiciaire, on peut légitimement s'interroger sur la pertinence du maintenir la qualité d'officier de police judiciaire au président d'APC. A la limite, on peut juste prévoir que le président d'APC pourrait, voire devrait informer la police judiciaire, ou le procureur de la République, des crimes ou délits qui peuvent se produire sur le territoire de sa commune.
e) l'intercommunalité
Cette problématique est chichement abordée au titre des articles 215, 216 et 217 de la loi. Cela concourt à retenir, quand bien même les rédacteurs de la loi se sont donnés du temps en prévoyant des textes d'application à venir, que la question de l'intercommunalité ne semble pas susciter un vif engouement. On s'étonne, un peu, que l'ordonnance 67-24 du 18 janvier 1967, ayant étrenné la législation sur la commune ait accordé plus d'intérêt à l'intercommunalité. A coup sûr, il était hors de question que les concepteurs de la loi du moment puissent parler du concept d'intercommunalité qui était loin d'être à la mode en ce temps-là. Nonobstant, le législateur a usité en son article 12 de la formule « groupement de communes », qui, d'une certaine façon pouvait équivaloir à l'intercommunalité d'aujourd'hui. Ce type d'organisation a été concrétisé au moyen du syndicat intercommunal, qui devait, selon l'article 15 de l'ordonnance : « être adapté au cadre territorial le plus favorable pour la réalisation de ses objectifs ». N'est-ce pas une préoccupation très actuelle ? Sauf que les enjeux d'aujourd'hui concernant l'intercommunalité sont d'une nature autrement plus complexe. Les spécialistes en aménagement du territoire, vous diront qu'il faudra s'en remettre au plan d'aménagement du territoire de wilaya approuvé, lequel plan contient les propositions d'aménagement avec à la clef des choix optimisés d'intercommunalité, susceptibles d'engager les communes éligibles à une gestion en commun de projets et ou de services, qui dépasseraient leurs moyens propres.
Le problème, c'est que cette façon de voir peut heurter le principe qui conditionne la décentralisation, qui fait que les élus sont libres de leurs choix. Aussi faut-il faire œuvre de patience et de persévérance, si ce n'est de pédagogie, pour les faire adhérer à tout projet du genre, sachant qu'ils peuvent rechigner à adopter un programme trop inspiré d'une vision technocratique qui ne fait pas de place aux solidarités naturelles auxquelles elles aspirent. L'autre partie du problème est que, si le plan d'aménagement du territoire peut être produit et offert sur un plateau à partir des instruments hiérarchisés d'aménagement (SNAT), (SDAU), (POS) et (PLA) qui planifient, organisent et régulent l'utilisation de l'espace en fonction des besoins, on observe qu'en face, personne ne propose pour le moment ni la nature, ni le statut, ni les moyens d'intervention, ni la fiscalité, ni le modèle de convention de partenariat pour façonner le codéveloppement des collectivités liées par un contrat d'intercommunalité. Sans cela, celle-ci restera un vœu pieux.
f) la responsabilité de la commune
L'article 147 de la loi communale prévoit : « en cas de catastrophe naturelle, la responsabilité de la commune n'est pas engagée à l'égard de l'Etat et des citoyens s'il s'avère que la commune a pris les précautions prévues à sa charge par la règlementation et la législation en vigueur ». En fait, ce ne doit plus être un tabou, il faut reconsidérer complètement cette problématique pour mieux situer la responsabilité de l'Etat et de la commune en matière de catastrophe naturelle, si déjà on s'entend sur sa définition. L'Etat doit être tenu pour responsable dans les cas suivants (s'il ne met pas en place des stratégies globales de prévention, si les grandes infrastructures, barrages et digues, sont défaillantes, ou si la règlementation est inadéquate).Par contre, la responsabilité de la commune est engagée lors des épisodes suivant (manque d'entretien de infrastructures communales (non curage des canalisations et des oueds, défaillance dans l'entretien des routes et chemins communaux), non-respect des règles d'urbanisme (délivrance de permis de construire dans des zones à risque, urbanisation anarchique favorisant les risques d'inondation ou d'avalanche), absence de prévention locale (la commune n'a pas mis en place de plan de gestion des risques). A côté de ces deux types de responsabilité, il y'a une responsabilité partagée entre l'Etat et la commune qui intervient dans les situations suivantes : (si l'inondation résulte de la défaillance d'un barrage qui se perpétue dans les agglomérations, si l'inondation se produit dans les nouvelles cités encore à l'état de chantier). Au-delà, la responsabilité peut être imputable à des entreprises de travaux qui ont renforcé le risque et à des citoyens qui occupent illégalement des terres ou qui érigent des constructions qui aggravent le risque.
Il faut reconnaitre qu'il ne peut y avoir une quelconque législation pour une catastrophe naturelle, ensuite la notion même de force majeure a évolué de telle sorte que pour établir l'état de catastrophe naturelle, il faut que celle-ci ait un caractère imprévisible et irrésistible. Vous remarquerez, qu'on ne parle pas ici de mouvements de terrain, d'avalanches, de séismes ou de vents cycloniques où la responsabilité doit être endossée par l'Etat en totalité. Dans certaines régions du monde, on va jusqu'à impliquer le juge administratif qui devra statuer pour dire, en allant chercher des indices concordants ou pour demander l'avis des experts, pour rendre sa décision pour déclarer qu'on est en présence d'un cas de force majeure, ou si l'événement en cause n'est pas constitutif de force majeure, ce qui déterminerait les responsabilités, entre l'Etat seul, ou l'Etat et la commune, ou la commune et l'organisme tiers à qui elle aurait concédé le domaine.
La responsabilité civile du président d'APC, comme d'un élu quelconque peut être engagée lorsqu'un dommage est causé à autrui du fait d'une faute commise dans l'exercice de ses fonctions. Ce type de responsabilité vise à réparer un préjudice. Si le président d'APC, ou l'élu agit hors de l'exercice de ses fonctions ou lorsqu'il commet une faute personnelle détachable de ses fonctions, ou qu'il agit dans un cadre privé, ou qui révèle une intention malveillante, c'est sa responsabilité personnelle qui est engagée et il devra en répondre personnellement devant les tribunaux. Dans cette hypothèse, la commune n'a pas à le couvrir des frais de justice qui lui incombent. Quitte à se répéter, on notera que lorsqu'un quelconque dommage résulte d'une absence ou d'un manque d'entretien des équipements, la commune devra être tenue pour responsable sauf si la gestion a été concédée à un service tiers qui n'est pas sous sa tutelle. Il est étrange aussi que la loi communale n'évoque pas l'hypothèse de la survenue de dégâts ou de préjudices commis à force ouverte ou par violence qui se produisent lors d'émeutes ou d'attroupements.
S'agissant de la responsabilité pénale du président d'APC, ou des élus, si même elle est évoquée aux articles 43 et 44 de la loi communale, nécessite de mentionner que la responsabilité pénale du président d'APC peut être possiblement engagée pour action ou inaction, soit pour négligence ou mise en danger d'autrui ou pour toute infraction de droit commun. En revanche elle doit être obligatoirement engagée lorsqu'il s'agit d'infractions ayant une relation avec son mandat (faux, usage de faux, favoritisme, corruption, népotisme, etc.). Les élus doivent être poursuivis et jugés dans les mêmes conditions qu'un simple citoyen. Leur responsabilité pénale doit être recherchée même si les infractions qu'ils commettent ne sont pas intentionnelles. Il suffit d'établir, soit qu'ils ont concouru à créer la situation à l'origine d'une transgression de la loi pénale, soit par parce qu'ils n'ont pas pris les mesures qui auraient permis de prévenir le préjudice.
6. La wilaya ou la décentralisation ajournée.
Au contraire de la commune, qui, historiquement, a toujours été perçue comme une réalité sociologique vivante, la wilaya, n'avait et n'a jusqu'à présent, qu'un lien distendu avec sa population, pour ne pas dire une relation artificielle, et cela est démontré à mesure qu'on s'éloigne de son chef-lieu.
Aussi, peut-on dire, qu'en l'état, il est aléatoire, voire fictif, de parler au citoyen lambda de la décentralisation. Pour lui, la wilaya est là, elle existe et il serait bien étonné si on disait qu'il y'a en deux versions de la wilaya : une version qu'il connait avec le wali à sa tête, qu'il voit à la télévision, qu'il voit courir sur les chantiers et une wilaya souterraine, qu'il ignore qui est l'Assemblée populaire de wilaya (APW). Sans faire dans la caricature, c'est cela la réalité du terrain. Depuis même la création de cette institution à la faveur de l'ordonnance 69-38 du 23 mai 1969, elle fait face à l'imperium du wali, qui en plus d'être le représentant unique du gouvernement et de chacun de ses ministres, il truste sans partage le pouvoir exécutif local. De plus, le principe qui veut que déconcentration et décentralisation collaborent ensemble dans l'intérêt de la wilaya est une simple vue de l'esprit. Dans la pratique, la déconcentration règne en maitresse des lieux.
6.1. Requalifier l'Assemblée populaire de wilaya au regard de la Constitution en vigueur
Il n'est ni imaginable, ni faisable que s'il y a réforme de l'Assemblée populaire de wilaya, celle-ci pourra du jour au lendemain supplanter le système de la déconcentration. La démarche prendra du temps et elle doit se faire, ce qui n'est pas contradictoire, avec le renforcement et la modernisation de la déconcentration. Le défi n'est pas simple, d'autant que l'idée même d'un pouvoir local partagé aura du mal à être admise, aussi bien par la population, qui ne peut même pas se la représenter, que par une large partie des responsables d'autorité qui, par instinct, n'apprécient pas trop le changement, surtout le changement qui bouleverse l'équilibre des forces en présence. Faut-il cependant, s'en tenir à la situation en cours ou doit-on agir pour dépasser cette appréhension qui fait craindre à certains que l'Assemblée de wilaya ne soit pas encore, ou qu'elle ne sera jamais en état d'assumer les pouvoirs qui lui donneront une autonomie réelle, qui ne sera pas l'irréalité de la loi wilaya actuelle qui la maintient en gestation prolongée ? Faut-il un électrochoc pour que l'APW puisse assurer pleinement son statut ? Il est vrai qu'il ne faut pas se mentir, l'œuvre sera difficile et pleine d'embuches. Certaines conditions impliquent qu'elles soient réunies au départ.
Ce n'est pas irréalisable, ce qu'il faut c'est d'accepter le principe même de la décentralisation avec toutes les conséquences qu'elle implique. Il s'agira de mettre en place toute une ingénierie et de réunir un ensemble de conditions préalables pour amorcer un processus qui ne laissera pas de place à l'approximation. En voici quelques-unes de ces conditions, qu'il faut absolument satisfaire :
1) doter l'Assemblée populaire de wilaya (APW) de services administratifs et techniques propres, tenant compte des compétences et des obligations qui seront mises à sa charge. L'organigramme formalisant ses services devra prendre en considération le détail des compétences allouées à la wilaya à l'instar de celles qui ont été citées, de manière non exhaustive, dans les paragraphes évoqués précédemment. Cette alternative fera assurément que certains services déconcentrés, dont certains font partie des services du wali lui-même, devront migrer, avec armes et bagages, vers la wilaya, organisme décentralisé ;
2) faire dévolution du statut de chef de l'exécutif de l'Assemblée de wilaya à son président, qui devient par suite l'ordonnateur primaire sur le budget de la wilaya ;
3) globaliser le budget de la wilaya, pour faire droit au principe de l'unité et de l'universalité du budget. Toute recette ou toute dépense, qu'elle concerne le fonctionnement, l'équipement ou en capital, doit transiter par le canal du budget de la wilaya. Le budget de la wilaya devra compter sur des ressources émanant des taxes et impôts locaux, des subventions et transferts de l'Etat et autres dotations spécifiques. Concernant spécifiquement l'impôt, il importera d'élargir l'assiette fiscale et d'augmenter la part des impôts et taxes qui reviennent à la wilaya, compte tenu des nouvelles compétences qui seront lui seront reconnues. L'excédent dégagé ou l'épargne brut, mieux connu sous la formule d'autofinancement, pourra servir à abonder le financement des équipements et des investissements à la charge de l'Etat. De tout cela, il faut comprendre qu'il faudra carrément opérer une réforme de la fiscalité locale, dont on se gargarise chaque année sans qu'on perçoive sa réalité, si ce n'est de la fiscalité en général. Celle-ci, contribuera à une plus juste répartition de l'impôt entre l'Etat, la wilaya, la commune et les autres organismes qui reçoivent la part de l'impôt qui leur revient au titre d'une législation spécifique. Plus difficile à imaginer, mais qui devra se concrétiser tôt ou tard, c'est d'habiliter les collectivités locales à voter les impôts locaux, d'en fixer leurs taux et d'en établir l'assiette et, au final de percevoir directement l'impôt.
4) procéder à un partage des financements définitifs destinés aux équipements et aux investissements publics qui sont pour le moment inscrits à l'indicatif du wali, en tant qu'ordonnateur secondaire, représentant chaque ministre au titre des programmes sectoriels décentralisés (PSD), ou d'autres financements spécifiques de l'Etat. Ce partage devra faire bénéficier la wilaya, organe décentralisé, de la part de financement qui représentera la contrepartie des compétences qui lui seront gratifiées à due proportion des compétences qui lui seront transférées et qui engageront sa responsabilité (construction et rénovation des CEM, création et entretien des structures d'accueil des personnes âgées, handicapées ou en difficulté, construction de structures culturelles et des établissements de la jeunesse et des sports et autres secteurs que la loi déterminera).
De son côté, la wilaya, organe déconcentré, continuera de prendre en charge les secteurs qui impliquent les grosses dépenses budgétaires (routes, ponts, ports, aéroports, énergie et autres du même genre). En tout état de cause, il appartiendra à la loi de déterminer les compétences de la wilaya, organe déconcentré et de la wilaya, organe décentralisé, à moins que l'Etat décide de s'engager dans un processus de subsidiarité qui attribue une responsabilité ou une compétence devant s'exercer au niveau le plus proche des citoyens, à condition que ce niveau soit capable de s'en acquitter de manière diligente et efficace. Plus facile qu'à faire.
Au plan financier, il importera d'adapter le cadre budgétaire devant être appliqué à la wilaya pour intégrer tout le dispositif issu du décret 96-227 relatif aux dépenses d'équipement de l'Etat, qui sera nécessairement modifié ainsi qu'aux financement provenant de la caisse de garantie et de solidarité des collectivités locales et autres dotations de l'Etat, condition préalable pour pouvoir les inscrire et les exécuter conformément aux règles budgétaires et comptables en vigueur.
Par ailleurs et pour être en phase avec le discours intarissable du moment qui appelle à diversifier les ressources des collectivités locales, ça sera peut-être la bonne occasion pour permettre aux communes et aux wilayas, même à titre exceptionnel et sous strict encadrement règlementaire, de contracter des emprunts bancaires. Il faut savoir cependant que le contrat d'emprunt est essentiellement un contrat de droit privé, et qu'en conséquence il ne relève pas du contrôle de légalité du wali. Toutefois celui-ci peut lors du contrôle d'une délibération de l'Assemblée autorisant le recours à l'emprunt, demander utilement la transmission du projet de contrat de prêt.
Ceci dit, les emprunts serviront essentiellement à financer et à réhabiliter la consistance et ou la valeur du patrimoine communal, comme : l'achat de matériels durables, la construction ou l'aménagement de bâtiments et d'autres infrastructures. L'autre source de financement serait d'autoriser les collectivités locales d'acquérir des titres de participation et autres titres immobiliers auprès des entreprise publiques. Ce n'est pas de la science-fiction, nombre de pays africains ont réalisé avec succès cette technique.
5) accorder un statut aux corps spécifiques de la wilaya, organe décentralisé, et reconnaitre le pouvoir de nomination et de gestion à son président.
Une fois toutes ces exigences réunies, l'Assemblée de wilaya pourra se dissocier de la wilaya, organe déconcentré. Pour cela, il faudra une loi décomplexée et assumée qui évitera surtout d'user ou d'abuser d'expédients interprétables à la demande. Cette loi, devra constituer l'acte premier d'une décentralisation réelle et palpable. L'Assemblée de wilaya n'aura pas vocation à concurrencer la wilaya organe, déconcentré, au contraire, les deux institutions devront s'intégrer au sein de l'Etat unitaire qui exerce la souveraineté sur l'ensemble du territoire et qui œuvre au respect des lois de la république.
Certes, il y a bien eu ce décret 11-334 du 20 septembre 2011, portant statut particulier des fonctionnaires de l'administration des collectivités locales, toutefois, dans la réalité des faits, ce statut correspond exclusivement aux fonctionnaires communaux. Concernant le personnel de la wilaya, il ne représente qu'un avant-projet de statut qui anticiperait une situation à venir, qui ne pourra prendre racine que le jour où l'Assemblée de wilaya disposera de ses propres fonctionnaires et, par-dessus tout, que son président sera effectivement investi du pouvoir de nomination et de gestion. D'ailleurs, si la wilaya, organe décentralisé, pouvait avoir ses propres fonctionnaires, la loi wilaya n'aurait pas eu besoin de prévoir en son article 68, que « le président de l'Assemblée populaire de wilaya dispose, de manière permanente, d'un cabinet. Ce cabinet est composé de fonctionnaires choisis par le président de l'Assemblée parmi les fonctionnaires des secteurs relevant de la wilaya ». Ces dispositions entrainent une sorte de confusion avec les stipulations des articles 129 et 130 de la même loi, relatifs au recrutement des fonctionnaires sur le budget de la wilaya, à moins que la loi ait fait exprès de prévoir que le président de l'Assemblée puisse choisir directement ses collaborateurs pour garnir à sa convenance son cabinet, sans passer par les procédures légales et règlementaires qui régissent le recrutement.
7) organiser et formaliser la coopération entre le wali et le président de l'Assemblée populaire de wilaya
Ces deux responsables devront jouer des rôles distincts mais complémentaires dans l'administration de la wilaya. Leurs relations devront être marquées par une coopération institutionnelle, même si leurs champs de compétences divergent. Leurs domaines de coopération seront aussi nombreux que variés. Ils embrasseront en particulier les domaines essentiels suivants : coordination pour l'élaboration des schémas d'aménagement de la wilaya, gestion des crises, développement économique, projets de transport d'intérêt national, prévention des risques, politiques sociales, aides aux entreprises et autres. Cela dit, leur intervention ne sera pas guidée et orientée vers les mêmes objectifs : le wali pense doit agir d'abord comme le représentant de l'Etat, garantissant la mise en œuvre des politiques nationales, tandis que le président de l'Assemblée de wilaya devra représenter les intérêts locaux et tendra ainsi à privilégier des politiques qui intéressent d'abord le niveau wilaya. Ne nous trompons pas pour autant, il n'y a pas de contradiction. En fait et par leur action, ces deux responsables seront appelés à concilier les enjeux locaux et nationaux dans l'optique d'une gestion harmonieuse de la wilaya. Vous aurez compris que cette démarche s'écrit au conditionnel.
Juste un petit message à l'adresse d'un chroniqueur qui semble être féru des coulisses de la sphère administrative locale : Le wali ne peut pas et ne sera pas un manager, comme il l'a ardemment suggéré et espéré. Ce disant, notre chroniqueur oublie, sinon zappe, complètement les élus locaux, alors même que la Constitution leur reconnait un rôle éminent à travers son article 18 par lequel elle affirme que, « les rapports entre l'Etat et les collectivités locales sont fondés sur les principes de décentralisation et de déconcentration ». D'autre part et depuis la création de ce corps, l'autorité politique a toujours donné comme mission prioritaire au wali de veiller à l'application des lois, de représenter les intérêts nationaux et de coordonner les services déconcentrés de l'Etat.
Comme autre priorité, le wali a une mission intrinsèque de contrôle administratif sur les actes des communes pour s'assurer de leur légalité. Aussi, on peut dire que lorsque le wali répond à ces exigences il est déjà manager. Il n'y a plus d'homme providentiel qui gère tout et qui dirige tout à lui seul. Le management, c'est davantage l'affaire d'une équipe. La vision du chef qui donne des ordres à appliquer sans discussion possible est révolue. Ce qui peut distinguer les walis sur le terrain, c'est que certains d'entre-deux acquièrent une intelligence émotionnelle qui leur permet d'organiser leurs actions et d'autres pas ou très peu.
II- Les collectivités locales entre conformisme et transcendance
1-la commune, de la gestion au jour le jour à la gouvernance
A vrai dire, il est très prématuré, si ce n'est de la provocation, d'évoquer la notion de gouvernance au sein de la commune. Dans la situation présente, on observe plutôt que la commune algérienne est en manque d'une gestion qui répond aux prérequis d'une norme minimaliste. Cette norme, aussi modeste qu'elle doit être, exige déjà que la commune soit en mesure de fournir les services essentiels à la population (garantir le bon fonctionnement des services publics, bien entretenir les routes et les pistes communales, de veiller à la permanence de l'éclairage public, procéder régulièrement au ramassage des ordures ménagères, entretenir les écoles primaires et des cantines, collaborer aux plans de prévention, mettre à jour le plan de transport et de circulation, etc.). Tout cela doit se faire en minimisant les coûts, sans trop peser sur ces ressources et de mettre en œuvre les processus administratifs adéquats. Sur un plan purement administratif, la norme serait de maitriser la législation qui régit les différents procédés techniques et administratifs, comme la législation relative aux marchés publics et à l'adjudication, de recouvrer en temps et en heures les recettes qui sont dues à la commune, de bien hiérarchiser ses dépenses, de préparer le budget communal dans les temps et de l'exécuter selon les règles comptables et budgétaires, de savoir organiser ses recrutements, de contrôler et de suivre la mise en œuvre des instruments d'urbanisme et autres activités pas moins importantes et utiles.
Certes, les communes à faible revenu pourront toujours se prévaloir de cet argument, qui peut être réel et justifié, mais c'est justement parce que ces communes manquent de moyens, qu'elles doivent se sublimer pour se donner les moyens de faire mieux. C'est aussi et sûrement le rôle de la wilaya d'animer, d'accompagner et de former les élus et les personnels communaux et de récompenser celles des communes qui font l'effort de s'améliorer, particulièrement celles qui cherchent à numériser les actes et les procédures administratives.
La gouvernance locale doit être mise en œuvre aux différents niveaux et échelons institutionnels. Elle exige l'adhésion et la participation d'une série d'acteurs, du public au privé et jusqu'au mouvement associatif.
Il est certain qu'il serait déraisonnable de vouloir plagier la gouvernance d'entreprise, sinon c'est perdu d'avance. D'ailleurs, la gouvernance n'est pas l'affaire de la commune toute seule, ni même de la wilaya avec tous les services déconcentrés qui sont à sa disposition.
Il faut savoir aussi, que gestion et gouvernance ne sont pas antinomiques et n'ont pas vocation à se concurrencer. Bien au contraire, il s'agit de deux concepts qui se complètent et qui travaillent en interaction. La gouvernance en générale, ou la gouvernance locale, sans trop ergoter, a surtout pour objectif, d'agir dans la transparence, que les décideurs doivent rendre des comptes de leurs actions et de leurs résultats. Il faut aussi, que les parties prenantes soient associées aux processus décisionnels, que les décideurs doivent agir avec honnêteté, éthique et professionnalisme et que les processus de gouvernance doivent s'adapter aux changements et les situations imprévues. Transposée niveau des institutions publiques et plus précisément à hauteur de la commune, la gouvernance désignerait « un ensemble de décisions, de règles et de pratiques qui passent par un mode de gestion politique, sociale et économique locale qui s'appuie sur la mobilisation des ressources humaines, sur la capacité à réguler un territoire dans le cadre d'un système partenarial avec des acteurs multiples ».Trop beau, trop fort pour la commune qui se débats avec son quotidien avec plus ou moins de réussite. Il ne faut pas perdre espoir et commencer par le commencement, qui serait de mettre à jour un mode d'emploi à l'usage des communes et des wilayas, étant entendu que la priorité serait d'avoir recours à une gouvernance qui saurait organiser les relations entre les communes, les wilayas et l'Etat. In fine, la gouvernance locale devrait viser à impliquer les citoyens et les partenaires agissants dans le développement de la commune, qui serait susceptible d'infuser un développement au niveau de tout un territoire. Pour la commune, l'heure n'est plus d'attendre et d'espérer les subventions de l'Etat, il s'agit de trouver les solutions pour faire fructifier le son patrimoine communal, et mieux encore de s'impliquer dans l'activité économique. Cette démarche, entrainera avec certitude les investisseurs et autres promoteurs qui voudraient s'engager, seuls ou en partenariat, avec la commune dans des projets dits gagnant-gagnant. Avec cette approche innovante, la commune pourra participer ou s'associer à des projets de création de zones industrielles ou d'activité et de dépôt, en attendant que l'autorité politique décide de déculpabiliser les aides directes en subventionnant les organismes publics et privés pour stimuler la création d'emploi ou pour apporter un gain à l'économie locale. Il suffirait parfois d'assister, même d'accompagner, ces investisseurs auprès des services publics locaux, qui pour un problème d'électricité ou de gaz, qui pour un problème d'eau potable ou de branchement au réseau d'assainissement, qui pour un raccordement au réseau téléphonique et autres.
L'étonnant, c'est que dans certains pays, les institutions locales, qu'importe leur dénomination, arrivent, sans fonctionnaires, ni dotation de l'Etat, ni fiscalité locale, à créer de la richesse et à faire face aux besoins de leur population. Vous me diriez avec raison que c'est l'exception qui vérifie la règle.
2- la wilaya entre le surplace ou le décollage
En l'état de la loi en vigueur où elle est confinée, la wilaya n'est même pas armée, ne serait-ce que pour se projeter dans le futur, donc il serait superflu de lui affecter le moindre rôle dans la gouvernance locale. Même si de prime abord, la loi lui confie toute une palette de compétences, il ne faut pas se leurrer, ça reste une coquille vide. C'est bien le wali qui concentre et exerce le pouvoir local. A ce sujet, les dispositions suivantes sont très significatives : article 105 de la loi wilaya « le wali représente la wilaya dans tous les actes de la vie civile et administrative (...), article 106 « le wali représente la wilaya en justice et article 107, « le wali élabore le budget de la wilaya et en assure l'exécution après son adoption par l'Assemblée populaire de wilaya. Il en est l'ordonnateur ».Il existe quand même quelque chose de surprenant relativement au statut du wali qui échappe aux juristes et spécialistes les plus avertis. Si on lit l'article 54, alinéa 1erde la loi relative à la wilaya, celui-ci dispose « (...) les délibérations de l'Assemblée populaire de wilaya sont exécutoires de plein droit vingt et un (21) jours après leur dépôt à la wilaya (...) ». Mis en rapport avec les articles 105 et 106, déjà cités, de la loi wilaya, on se trouve en effet en conflit de situation, en sorte que c'est le wali qui exécute les délibérations de l'Assemblée de wilaya et que c'est encore le wali qui décide ou non de déférer une délibération suspecte de non-conformité à la loi devant le juge administratif, alors qu'il peut très bien arriver à ses fins, sans même en référer audit juge, il aura juste à refuser d'exécuter la délibération dont il supposera qu'elle contrevient aux lois et règlements. Avec ça, il est carrément juge et partie.
Conclusion
Il faut croire que s'il faut vraiment vouloir réformer le « code wilaya » et à un degré moindre celui de la commune, il faut le faire pour de vrai et jusqu'au bout, quitte à bouleverser à déplaire à toutes ces personnes bien pensantes, qui ont peur de perdre au change.
C'est sûr que d'un point de vue purement technique, il n'y a pas photo, la déconcentration l'emporte de loin sur la décentralisation. Mais, on peut avoir une position plus nuancée. C'est l'avis du doyen Hauriou qui déclare à ce sujet : « (...) s'il ne s'agissait que du point de vue administratif, la déconcentration assurerait au pays une administration plus habile, plus impartiale, plus intègre et plus économe que la décentralisation. Mais les pays modernes n'ont pas besoin seulement d'une bonne administration, ils ont aussi besoin de liberté politique ».
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Posté Le : 27/01/2025
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : se rebiffer pour recouvrer toute sa souveraineté ...
Source : www.lequotidien-oran.com