Apparemment, les Français seraient déçus du comportement des Algériens et leur reprochent de ne pas passer commande en armes auprès de leurs industriels spécialisés. En termes moins diplomatiques, il faut comprendre par-là que les milieux de l'industrie française de l'armement - et ceux politiques par voie de conséquence - ne supportent plus d'être mis à l'écart dans les contrats d'armement que signe Alger.
Nos voisins de l'autre côté de la Méditerranée qui, soit dit en passant, semblent bien au courant des détails de notre approvisionnement militaire, n'arrivent pas à avaler ce qu'ils qualifient eux-mêmes par un certain «tout sauf la France!». Pour justifier cette attitude des Algériens, les Français s'en vont d'abord, puiser dans «l'histoire douloureuse entre les deux pays, qui n'a pas été encore évacuée», avant de reconnaître que lors de la pénible période que vécut l'Algérie, «Alger avait demandé toute une série de matériels militaires que la France lui aurait refusée» et de faire, ensuite, un tour dans la mare nauséabonde... «Le clan de Abdelaziz Bouteflika, poursuit l'auteur, à un an de l'élection présidentielle, en avril 2014, pourrait accélérer les négociations actuelles avant l'élection pour sécuriser ces contrats souvent très juteux».
Regardons de plus près...
Nous n'avons pas besoin de lunettes pour saisir le message mais surtout les raisons de ce papier.
La France connaît actuellement une période des plus difficiles. Pour cela, elle tente de réanimer ses ventes et pas seulement dans l'industrie de l'armement. Au moment où son industrie automobile connaît un dangereux déclin, la France est venue, il y a quelques mois, étendre son marché par l'installation de l'usine Renault, chez nous, assortie de mille barrières à l'entrée pour les autres marques.
Expliquer ce comportement par les règles du jeu concurrentiel est tout à fait acceptable du moment que chaque pays cherche son avantage et ses propres intérêts, encore que, dans cette affaire Renault, celui qui gagne le plus ce ne sont surtout pas les Algériens!... Mais, bon!
Il va de même pour les contrats d'armement dont il est question plus haut et rapporté par le quotidien français La Tribune (version on line du 18/04/2013) sous la signature d'un certain Michel Cabirol. Le choix par l'Algérie de ses fournisseurs d'armes est un comportement d'achat, comme disent les gens du marketing et les stratèges, régi par des règles plus ou moins objectives - comme tous les comportements d'ailleurs -que l'on peut aisément expliquer en faisant appel aux règles de la compétitivité et dont la satisfaction du client est un élément fondamental. Ni plus ni moins.
Une première question à ce stade mérite d'être posée. Pourquoi, lorsque le très français Renault a décroché le contrat de l'installation de l'usine en Algérie, malgré la très mauvaise passe dans laquelle il se trouvait (et il s'y trouve toujours) à cause de sa faible capacité compétitive, il n'y a eu personne pour mentionner que cela s'est fait en dépit de «l'histoire douloureuse entre les deux pays, qui n'a pas été encore évacuée» alors que, lorsque les Algériens ont décidé de ne pas acheter des armes françaises, des voix se sont aussitôt mises à hurler en puisant dans cet argument' Le raisonnement français dans cette histoire n'est pas cohérent pour un euro, car une fois il se réfère au marché et une autre aux sentiments. Ou bien on se réfère à la mémoire encore douloureuse de la période coloniale pour tous les contrats et on tire les conclusions, ou alors au marché pour tous les contrats et là aussi on tire les conclusions.
Encore plus près...
L'achat des armes est une opération stratégique dans laquelle chaque Etat doit, en principe, garder son autonomie, marquer sa liberté et exercer sa souveraineté. Il n'y a pas de raisons pour que, dans le cas de l'Algérie, cela se passe autrement. De ce fait, les Algériens n'ont pas d'explications à donner à leurs vis-à-vis français. Mais puisque ces derniers, qui n'ont pas oublié, veulent jouer sur les effets du temps, disons simplement que les années 1990, c'est à peine hier. Oui, à peine hier l'Algérie, avait besoin d'aide pour éviter de vivre ce qui lui fut malheureusement imposé pendant plus de dix ans et inutile de souligner que ceux qui lui avaient refusé cette aide devraient assumer, devant l'histoire, cette sorte de complicité passive. Si au moment où les Algériens avaient besoin de ces armes, la France les leur a refusées, pourquoi tenterait-elle de les leur vendre maintenant' Les armes, on en a besoin lorsqu'on en a besoin et il est possible que, aujourd'hui, de par ses choix et ses options stratégiques, l'Algérie n'ait pas besoin des armes françaises. Il ne faut donc pas faire tout un tapage!
Ceux qui n'avaient pas déserté la place lors des jours difficiles et qui avaient aidé l'Algérie, comme l'Afrique du Sud ou la Russie par exemple, il est normal que des commandes leur soient passées et c'est là un simple principe des relations internationales, voire un principe basique des relations humaines qui n'a rien de choquant ni d'offensant pour qui que ce soit. On ne peut pas ne pas secourir quelqu'un au moment du danger et lui demander des faveurs par la suite lorsqu'il est sur pied. Les choix, ça s'assume!
Et plus près encore...
Le troisième argument avancé par l'auteur du papier est d'une sournoiserie incroyable. Sachant que, sur la scène politique algérienne, les deux sujets les plus en vogue actuellement sont les élections de 2014 et la corruption, l'auteur insère une phrase dans laquelle il mélange les genres et se mêle les pinceaux.
En affirmant que «le clan de Abdelaziz Bouteflika, à un an de l'élection présidentielle, en avril 2014, pourrait accélérer les négociations actuelles avant l'élection pour sécuriser ces contrats souvent très juteux», l'auteur rassemble les deux thèmes dans une seule phrase pour lui donner un certain impact.
En tous les cas, si les contrats d'armement en question (avec Italiens, Russes et Chinois) ne sont pas très propres ce ne sont pas ceux passés par la France qui le seraient et la justice française en a étalés pas mal ces derniers temps comme l'affaire des frégates, pour ne citer que celle-là. La partie française n'est pas bien placée pour donner des leçons de morale sur ce plan. Reste ce fameux clan qui aurait passé ces contrats... je ne le connais pas, je ne le défends pas. S'il existe, il n'a qu'à se défendre lui-même!.
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Posté Le : 20/04/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Aissa Hirèche
Source : www.lexpressiondz.com