Tout le monde sait que le f?tus de tout futur dictateur, parfois malgré lui, naît dans les paumes des applaudisseurs et s'éclôt dans la fausseté des louanges qui entourent son berceau. Tebboune sait tout cela et a vécu dedans. En connaissance de causes et d'effets, il vient au bonheur de la félicité tenter d'y mettre terme. Après « Fakhamatouhou » voilà « sur instructions du Président » une autre formule assassine qui vient d'être suspendue de ce vocabulaire oiseux et flatteur quand il ne se confine pas dans une irresponsabilité fonctionnelle. Il en reste bien d'autres.L'excellence ne rime plus avec une certaine charge présidentielle. Tellement galvaudée jusqu'au pire abus, elle tend à s'accrocher parfois en travers de ces gorges qui se sont mises depuis longtemps à la débiter à n'importe quelle allusion. Pourtant, il s'agit historiquement d'un titre honorifique et sémantiquement d'un attribut seigneurial. Seulement l'engeance de la courtisanerie et la course vers qui le dit mieux, qui le dit plus ont fait perdre, à la haïr, toute innocence à la diplomatie orale qui l'exige. Ces gens-là ont fait de l'adulation d'un vicieux Monsieur qui s'y plaisait pernicieusement un rite où l'obséquiosité, prise pour position, a vidé tout respect politique dû à cette institution républicaine. Le peuple ne veut plus entendre dire ces cajoleries insensées.
Ceci était décidé dans les premières paroles du nouveau Président. Emotion et frustration avaient alors envahi ces gosiers habitués à la phonétique machinale, presque innée, naturelle de « Fakhamatouhou ». Ils ne s'en éc?urent pas pour autant. La langage est riche et offre toutes les panoplies de l'auto-servilité.
Dégourdis et prompts à la rescousse, cherchant une pièce flagorneuse ayant la même substance d'encens où tout doit être attribué au Président, ils collent à chaque distribution d'un sac de semoule ou d'un convoi à Blida l'une de ces instructions. À chaque acte qui devait se faire en service public tout simplement, ils s'efforcent de l'imputer comme suite à ses instructions.
De ces scories qui ont bien écorché l'image devant être à sa juste valeur institutionnelle du Président de la république, il en reste cette ténacité à ne pouvoir se débarrasser des anciens clichés. Arborer n' importe où le portrait du Président. On l'a bien vu sur une bannière accroché à une semi-remorque convoyant des denrées à Blida. Dans certains sièges d'associations de proximité toujours alléchées par l'odeur des amours zélées. Si ce portrait n'est pas une simple photo d'une star, il doit se recouvrer une nouvelle respectabilité. Les textes le régissant sont tout aussi à respecter.
Autre chose à toucher du doigt. Le parrainage ou le haut patronage de la Présidence. Des formules bien autocrates. Le parrainage de la République n'est pas un simple sponsor d'un opérateur de téléphonie ou d'un concessionnaire d'engins de travaux publics. C'est une empreinte qui ne devrait s'apposer que sur une amplitude nationale ou un rayonnement universel.
Il se donne aussi pour une raison d'histoire et de mémoire nationales, les anniversaires des grandes étapes de la révolution, le martyre des héros, les symposiums sur le mouvement de libération et l'écriture de son histoire, les hommages aux grands monuments des arts, de la culture et des lettres. Même situation pour les congrès internationaux. Mais là, durant cette double décennie, ce parrainage s'était vulgarisé à tel point où une petite rencontre initiée par une association locale sous l'égide d'un tel ministère, de concert avec tel wali et en partenariat avec tel groupe de jus, de béton ou de yaourt, se voyait gratifier par cette bénédiction inadéquate.
L'autre astuce phraséologique qui s'est héritée des relents hypocrites est cette formule qui se répète un peu partout chez les officiels : « Programme du Président » oui, il y a un programme, mais ça ne sert à rien de rabâcher son existence. Un programme s'applique, ne s'évoque pas. Il n'a pas besoin d‘un aveu de paternité. Au ministère de la Communication qui est loin de communiquer, si ce n'est par fil APS, plusieurs fils sont cassés. Un ministère n'est pas une agence de presse. Là, Il est plus aisé d'occuper un portefeuille que d'occuper un porte-parole. Et dire que la démocratie est, dit-on sur une nouvelle voie d'installation. Sans faire cesser ces dérives qui de plus et surprenant proviennent notamment de ceux qui sont nommés à la construire ; la mise en route s'avère encore longue et peu résiliente.
Ils reviendront par autre chose, autre canal, autre construction verbale.
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Posté Le : 25/04/2020
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : El Yazid Dib
Source : www.lequotidien-oran.com