La participation au séminaire international sur «la profession d'avocat et les défis de la mondialisation», tenu hier à Oran, a dépassé toutes les prévisions. La rencontre organisée par le comité national de l'Union internationale des avocats (UIA) -c'est la première fois qu'un comité de pays membre organise pareil évènement, selon Paul Nemo, président d'honneur de cette union- a permis aux avocats algériens de se mettre à l'heure de la mondialisation. Fini donc le concept classique et étroit de l'avocat généraliste cloîtré dans le prétoire d'à côté, plaidant les mêmes affaires récurrentes de sa petite ville. La mode, sans aucune connotation fantaisiste ou anticonformiste, est, à présent, aux prestataires juridiques spécialisés ou polyvalents, aux cabinets internationaux ou, à défaut, aux partenariats inter-cabinets. C'est du moins la conviction actuelle des avocats algériens, persuadés qu'ils n'ont d'autre choix que de se plier aux exigences du «marché mondial du droit», mais se refusent, cependant, l'épithète dépréciatif du «marchand du droit». Bref, les robes noires de l'Algérie veulent s'internationaliser, se mondialiser, actualiser le design de leurs cartes de visite... sans, en revanche, se débarrasser, une seule seconde, de leurs robes noires -symbole de la Défense- auxquelles ils sont attachés comme chair à l'os. Assurément, le séminaire international, tenu hier au Sheraton, a eu le mérite de conforter cette conviction de mûrir les idées de mutation, d'offrir aux avocats algériens une fenêtre grand panorama sur les transformations qui sont en cours dans le marché de droit du Nord et la place de l'avocat dans ce paysage, du reste très complexe, très compétitif. Dans ce contexte, les éclairages de Me Paul Némo sur l'expérience européenne dans ce domaine ont particulièrement retenu l'attention des professionnels algériens. Lors de son intervention, le président d'honneur de l'UIA a souligné la vague de contestations qu'a relevée, dans les rangs des avocats français, la directive de la Communauté européenne obligeant l'avocat à dénoncer son client auprès des autorités publiques dans le cas d'un flux de fonds irréguliers, un blanchiment d'argent, au prétexte de la lutte contre le terrorisme notamment. Citant le cas de l'Angleterre où il est enregistré 15.000 dénonciations par an, Me Paul Nemo s'est indigné contre cette ordonnance de Bruxelles qui veut obliger l'avocat défenseur à transgresser le secret professionnel envers son mandant, soulignant que l'Association nationale des barreaux de France a appelé à la désobéissance de cette directive. De son côté, le président du comité national de l'UIA pour l'Algérie, Me Belbar Houari, a fait remarquer que l'OMC a associé la profession d'avocat à un prestataire de service juridique. Mettant en garde contre la prolifération, tous azimuts, des cabinets transnationaux peu regardants de l'éthique et du professionnalisme, Me Belbar a souligné que la meilleure parade passe par une formation plus performante, plus poussée et plus moderne de l'avocat, faisant savoir dans ce contexte que l'avocat stagiaire français ou belge reçoit 30 heures de savoir par semaine. Me Rida Saïm, secrétaire régional de l'UIA pour l'Afrique, a appelé les barreaux d'avocats algériens à «la nécessité de revoir le règlement intérieur périmé» régissant la profession, et qui, selon lui, «comporte plusieurs entraves pour la compétitivité et l'expansion». Se posant la question: «les barreaux ont-ils le droit de continuer de restreindre les règles de déontologie périmées?». Me Saïm citera quelques «entraves», selon lui, comme l'interdiction de toute forme de publicité, d'avoir un cabinet secondaire, entre autres. Se voulant pragmatique et «terre à terre», le bâtonnier d'Oran, Me Ouahrani El-Houari, lâchera «nous parlons de l'impact de la mondialisation sur la profession d'avocat, sur l'émergence effrénée des cabinets anglo-saxons. Certes, il n'y a pas pour l'heure péril en la demeure. Mais le danger est imminent et nous ne sommes pas armés pour y faire face. Il faut faire quelque chose, il faut bouger, il faut rassembler les rangs, l'heure n'est plus aux discours creux!» La séance matinale du séminaire a été clôturée par la lecture du message du ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, par son représentant Ahmed Rabehi. Les travaux du séminaire se sont poursuivis dans l'après-midi par quatre interventions, dont celle de Me Cutter Scott, représentant de l'American Bar Association. Au cours de la rencontre il a été fait un exposé sur l'UIA, cette association créée en 1927 par un groupe d'avocats européens francophones convaincus de la nécessité pour les avocats d'établir des contacts internationaux. Aujourd'hui, c'est une association ouverte à tous les avocats du monde, généralistes ou spécialistes, qui regroupe plus de 200 barreaux, fédérations et associations (représentant près de 2 millions d'avocats) ainsi que plusieurs milliers de membres individuels répartis dans plus de 110 pays. L'UIA est composée de 4 catégories de membres: les membres individuels (les avocats exerçant la profession à titre principal), les membres collectifs (les barreaux, associations et fédérations d'avocats), les membres individuels associés, plus les autres professionnels du droit, les enseignants en droit ainsi que les magistrats professionnels de l'ordre judiciaire.
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Posté Le : 16/03/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Houari Saaïdia
Source : www.lequotidien-oran.com