Algérie

«Les autorités devraient éviter de mettre en place des conditions contraignantes» Younes Grar. Ancien conseiller auprès du ministère de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication (PTIC)


- Un nouveau conflit oppose actuellement les fournisseurs d'accès internet Wimax à l'ARPT concernant une redevance annuelle de 10% sur le chiffre d'affaires. Quelle est la nature exacte du conflit ' Et dans quelle mesure cela pourrait-il affecter les ISP '
Il faut signaler en premier lieu l'anomalie relevée au tout début de la délivrance des autorisations d'exploitation de réseaux Wimax. Celles-ci ont été liées à la Voix sur Internet protocol (VoIP). Des fréquences ont été distribuées aux opérateurs et il s'est avéré par la suite que ces dernières étaient insuffisantes pour satisfaire la demande. L'ARPT a dans ce sens dû récupérer les fréquences non exploitées pour les redistribuer. L'autre volet du problème concerne la redevance à payer. En temps normal, ce genre d'opération devrait se dérouler dans la transparence, avec des règles du jeu définies au tout début. Et les autorités devraient éviter de mettre en place des conditions contraignantes pour les opérateurs susceptibles de les pousser à la faillite. Car la bonne santé des opérateurs va se répercuter sur la qualité de services aux abonnés. Malheureusement, la plus grande partie des fournisseurs de services internet activant en Algérie ont mis la clé sous le paillasson, environ 90%, tandis que dans d'autres pays, tous les opérateurs de télécoms se portent très bien. Ce qui doit induire un certain nombre de questions sur le fonctionnement du marché. Se demander si l'activité est rentable ou non ou seraient-ce plutôt les règles de fonctionnement du marché qui ne sont pas très claires.

- Qu'est-ce qui motive, dans ce cas, la mise en place de la redevance annuelle '
Dans ce domaine d'activité, il y a des redevances qui doivent être conçues dans un cadre bien clair. Elles sont payées par les opérateurs qui doivent prendre part au développement du secteur. Le fruit de ces redevances sera injecté dans des projets aux implications positives aussi bien pour les citoyens que les opérateurs. Comme, à titre d'exemple, la subvention à l'acquisition par les ménages de certains équipements.
Malheureusement, les opérateurs ont des difficultés financières par rapport à la politique tarifaire d'Algérie Télécom, qui facture très cher ses liens. Des tarifs que les ISP en général et les opérateurs Wimax en particulier répercutent sur leurs prix. Ils ont du mal à faire face à l'opérateur historique, qui se trouve sur le marché de l'internet via des centres très concurrentiels. D'où leur difficulté à se positionner sur le marché et à trouver acquéreurs pour leurs offres. D'où leur opposition à la redevance, qu'ils doivent désormais payer et qu'ils devront au final répercuter sur leurs tarifs et donc sur l'abonné.
Je pense dans ce sens que les autorités devraient réexaminer la politique tarifaire d'Algérie Télécom. Elles devraient aussi se pencher sur les raisons de la cherté des abonnements ADSL en Algérie comparativement à ce qui se fait ailleurs. Et se pencher aussi sur la gestion de l'opérateur historique qui bénéficie d'une situation monopolistique sur le marché et qui, avec des tarifs aussi élevés et un développement limité de l'ADSL, se trouve dans des difficultés financières.

- Justement, l'Algérie a été épinglée par un rapport américain qui la place en bas du classement en termes de vitesse d'accès à internet. Comment peut-on expliquer une telle situation ' N'y a-t-il pas une arrière-pensée politique tendant à limiter le développement de cette technologie '
L'Algérie a été classée en avant-dernière position. Ce qui est très décevant par rapport aux moyens mobilisés pour la réalisation d'infrastructures, à l'image de la mise en place de 50 000 km de liaisons en fibre optique. Or, cet organisme ne fait que confirmer ce que nous remarquons déjà sur le terrain en termes de coupure, de débit, de lenteur de dépannage et même de satisfaction en matière de demandes de nouvelles lignes téléphoniques.
A l'international, des normes sont mises en place afin de définir des seuils à partir desquels on peut parler de haut débit ; il est de 4 mégabits pour certains et de 10 mégabits pour d'autres. En Algérie, on peut voir que l'offre la plus commercialisée est d'un demi-mégabit. On ne peut donc pas parler de haut débit en Algérie.
Les moyens existent pour la mise en place de véritables services internet haut débit, de même que la demande pour ces services. Reste à savoir ce qui empêche la concrétisation de tels projets. La question demeure entière quant à l'existence d'une volonté cachée de bloquer ce développement. Le discours politique prône l'amélioration de ces services, mais sur le terrain, cela ne se concrétise pas. Car le développement des NTIC incombe le passage à la transparence dans la gestion des entreprises, des administrations, des communes, des services publics'
Et cela semble gêner. Est-ce qu'il n'y a pas une volonté cachée d'empêcher cette transparence garantie par les NTIC ' La question reste posée. Certaines mauvaises langues diront que les pouvoirs publics ont peur d'internet et c'est pour cela qu'ils retardent son développement, de même que celui de la téléphonie 3G. Les raisons invoquées sont multiples. Mais le résultat est là : on se demande pourquoi aujourd'hui en Algérie, l'accès à internet pose autant de problèmes. Les pouvoirs publics devraient au contraire libérer ce champ et laisser les compétences et les talents s'exprimer à travers le développement de start-up, comme cela se fait dans de nombreux pays.
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