Algérie

Les assurances du gouvernement balayées LFC annulée, APN bloquée, lois gelées



Les assurances du gouvernement balayées LFC annulée, APN bloquée, lois gelées
Il y a quelques jours, le premier ministre, Abdelmalek Sellal, rassurait la presse en affirmant que «la tenue d'une réunion du Conseil des ministres actuellement n'est pas nécessaire» et que «les choses marchent comme il se doit», appuyé par les propos de son ministre des Finances.Le remaniement ministériel du 11 septembre dernier qui a coûté leur place à la moitié des ministres semble infirmer, du moins dans la forme, les propos de M. Sellal. Pourquoi, en effet, le chef de l'Etat aurait-il remanié un exécutif qui continue à assurer la bonne gestion des affaires du pays, pendant qu'il poursuit sa rémission. Au-delà des explications politiques, le fait est que les propos de Sellal sont loin de refléter la réalité.
«Le conseil des ministres est censé donner des décisions d'une importance extrême. Or, aujourd'hui, l'Etat n'a plus d'institutions qui fonctionnent, l'Assemblée populaire nationale (APN), le pouvoir exécutif, le conseil de la magistrature sont en panne, pendant que la constitution est gelée», souligne le représentant d'un parti politique.
En raison de la non-tenue d'un conseil des ministres, plusieurs projets de loi en voie de promulgation sont en suspens, parmi lesquelles la loi sur l'audiovisuel, le nouveau code des douanes ou encore la révision de la constitution.
L'APN n'a plus de lois à débattre puisque c'est le gouvernement qui est depuis toujours la source principale des lois introduites. Même pour faire des propositions de loi, l'APN ne peut pas prendre cette initiative, car tout texte doit passer par le conseil des ministres. «Le travail de l'APN est relié au conseil des ministres, mais on ne peut pas dire que ce soit tout», relativise cependant un ancien président de la commission des finances à l'APN. Celle-ci «peut mettre sur pied des commissions d'enquête, organiser des sorties sur le terrain, demander à auditionner un ministre, organiser des journées d'étude, mais elle a pris l'habitude d'attendre que le gouvernement daigne bien lui présenter quelque chose à se mettre sur la dent», ironise-t-il.

Annulation et distorsion
Tout en indiquant que la non-tenue d'un conseil des ministres n'entrave rien, le premier ministre a tout de même affirmé que la loi de finances complémentaire de 2013, pourtant annoncée, avait été finalement «annulée et intégrée dans la loi de finances 2014». Là encore en rassurant que cela «ne pose aucun problème, ni pour la gestion des projets ni pour celle des affaires». Pourtant, cette loi devait comporter des mesures de facilitation pour les investisseurs nationaux et d'autres en faveur des wilayas du sud, ainsi que des enveloppes budgétaires complémentaires pour certaines régions. Le ministre des Finances a annoncé que «tous les projets qui ont été introduits dans la LFC 2013 seront reproduits dans la loi de Finance 2014».
Pour certains chefs d'entreprise comme Mahfoud Megatli, cette annulation n'aura pas gros impact puisqu'il «n'y avait pas de contenu économique dans ce texte, mais uniquement des mesures qui concernent le développement des wilayas du sud».
Cependant, le premier ministre, lors de ses visites de travail dans plusieurs wilayas, et pas seulement dans le sud, a promis des enveloppes budgétaires complémentaires pour ces régions qui se chiffrent à plus de 100 milliards de dinars. Va-t-on attendre l'exécution du prochain exercice budgétaire pour les débloquer ' Pas sûr.
Pour Zine Barka, président de l'Association nationale de finances publiques, toute la démarche constitue «une entorse institutionnalisée par le système même qui est censé défendre la rigueur dans la gestion des finances publiques». L'annulation de cette LFC a été décidée avec «une légèreté scandaleuse». Le résultat sera «que nous allons nous retrouver avec des engagements de crédits, un déblocage de fonds et une justification a posteriori». Autrement dit, «on va allouer et commencer à consommer ces fonds avant fin 2013 et en 2014 on présentera cela comme étant en voie de consommation et il n'y aura pas à revenir dessus ni à faire d'arbitrage».
Même si cela ne paraît pas très réglementaire, M. Barka souligne qu'en Algérie cela se fait «très souvent, parce qu'il y a toute une partie, surtout en ce qui concerne les lois de finances complémentaires, qui échappe à la procédure normale réglementaire d'allocation des ressources, d'arbitrage, de discussions, de choix d'allocation des crédits». Du coup, c'est aussi l'importance du parlement en tant qu'institution de contrôle qui est «balayée».
Promesses et largesses
Ce sera donc à la loi de finances de 2014 de «drainer les anomalies de 2013» et quand on connaît les enjeux de cette année 2014, il y a de quoi s'inquiéter. Le pouvoir en place a souvent eu pour habitude de multiplier les gestes de générosité à l'approche des échéances électorales, dans ce que certains sociologues appellent «la corruption de la société» grâce à l'argent de la rente.
L'année 2014 sera une année «d'élection et donc on sera encore une fois dans des promesses et des largesses électorales, alors que toutes les institutions financières attirent l'attention de l'Algérie sur la vulnérabilité de la gestion de la dépense publique en cette période de grande instabilité», remarque M. Barka. Certes, les prix du pétrole viennent d'augmenter un peu, grâce à des événements conjoncturels, dit-il, mais «cela ne va pas durer, ce qui va reposer la question de la soutenabilité de cette dépense publique massive que l'Algérie est en train d'engager».
Une soutenabilité qui sera difficile à atteindre avec un budget qui promet déjà de supporter les reliquats de 2013.


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