Algérie

Les Asselah, cibles émouvantes



Les Asselah, cibles émouvantes
Le samedi 5 mars 1994 est une date à marquer d'une pierre blanche.Non, d'une pierre noire. Un flash-back mnémonique de 20 ans. Une piqûre de rappel contre l'oubli, voire l'amnésie. Alors que c'est le 24e jour du mois sacré de Ramadhan, la folie meurtrière terroriste, au plus fort de sa barbarie dépassant tout entendement humain en Algérie, avait décidé de mutiler, de défigurer et d'exterminer la beauté dans toute sa dimension, acception et acceptation. Et ce, en s'attaquant à de paisibles citoyens sans arme, s'investissant à leurs corps défendant ? car lors de cette décennie, aller à l'école, au lycée, à l'université, au travail, au marché ou encore à un mariage était un acte civiquement de bravoure ? dans la promotion de la culture. Il est 9h30, le temps va s'arrêter.Le directeur de l'Ecole supérieure des beaux-arts d'Alger, Asselah Ahmed, 53 ans, et son fils unique, Rabah, 21 ans, étudiant, entrent dans le couloir du bloc administratif. Le couloir de la mort ! Le père, est abattu par trois balles de pistolet automatique dans la tête. Rabah, assistant à l'horrible assassinat de son père, tente de lui porter secours, mais il reçoit une balle en plein ventre. Il succombera. Leurs assassins, deux jeunes de 18-20 ans, portant des cartables. Un atroce et effroyable crime ayant une trajectoire, un mobile niant et reniant la culture algérienne et, par voie de conséquence, toute volonté ou encore ambition affichée quant à la création juvénile et artistique.Une sentence, une fetwa exécutant un directeur et un étudiant, de surcroît père et fils, faisant l'article des beaux-arts, dans un haut lieu dispensant l'expression pluridisciplinaire plastique, l'Ecole supérieure des beaux-arts d'Alger, et ce, devant des élèves horrifiés. Le questionnement alors, bien que naïf, était : pourquoi une telle haine ' Pourquoi ce choix des «âmes» ' La réponse est sans ambages : c'était un acte génocidaire perpétré par les «chasseurs de lumières», comme dirait le chanteur Idir. Car la bête immonde frappera encore et de plus belle. Une longue et interminable liste mortifère. Une douleur, un cri lacrymal ! Assourdissant !Le 10 mars 1994, soit cinq jours après, le grand dramaturge Abdelkader Alloula est victime d'un attentat à Oran ; le 12 mars, c'est le journaliste de l'ENTV Hassan Benaouda ; le 29 mars, ce sont deux lycéennes de Boudouaou ; le 31 mai, c'est le recteur de l'université de Bab Ezzouar ; le 29 septembre, le célèbre chanteur de raï, Cheb Hasni, est un autre martyr? L'hydre sanguinaire n'en avait cure de l'aphorisme de Dostoïevski : «La beauté sauvera le monde.» Tel père tel fils, les Asselah sont entré dans l'art?majeur !




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