Algérie

Les assassins sont toujours là


La pire des justifications du terrorisme islamiste par les musulmans frileux, c'est celle qui consiste à dire, par exemple, après chaque attentat meurtrier, qu'Israël a fait pire en Palestine. Ils peuvent encore évoquer, avec la plus parfaite mauvaise foi, aussi bien les crimes de la colonisation, comme les enfumades du Dahra, ou le génocide commis sur les Indiens d'Amérique.Entre deux rappels opportuns des horreurs commises par les non-musulmans, surtout en terre d'Islam, les plus rapides à dégainer vous assèneront l'immuable argument : l'Islam n'a rien à voir.
C'est dit et redit : nous sommes les meilleurs, nous disputons aux Juifs la couronne de peuple élu, et tout individu qui commet des actes répréhensibles n'était déjà plus des nôtres, avant même d'agir. On se rend de plus en plus compte qu'il ne s'agit plus de ramener quelques brebis égarées, mais de tout un troupeau qui s'est fourvoyé sur des chemins certes balisés, mais ne menant nulle part. D'où les constats désabusés et les projections pessimistes que reflètent les médias arabes après l'apparition du Covid-19 et les différentes manières dont la pandémie a été accueillie et traitée. On sait que les pays arabes et leurs populations ont réagi plus ou moins intelligemment à l'apparition du virus, et des mesures drastiques ont été prises, comme la fermeture des lieux de culte. Une mesure qui a été diversement appréciée, comme l'ont montré les réactions de certains courants islamistes, invoquant tantôt le châtiment divin, tantôt un coup porté aux musulmans et à leur foi. Puisque le Covid-19 semble refluer et que les nations les plus avancées, et c'est le cas de le dire, prennent déjà des mesures pour les jours d'après, des médias arabes interrogent l'avenir. S'agissant des riches pays occidentaux, le chroniqueur saoudien Hassan Al-Attar les voit sur Elaph recentrer leurs efforts sur l'homme et spécialement sur les problèmes de santé et de société. Répondant à la question posée sur le même magazine par un autre chroniqueur, à savoir si après le coronavirus, il y aura une troisième voie pour les Arabes, il répond évidemment par un non. «Je ne crois pas, dit-il, que quelque chose de ce genre (des mesures comme en Occident) puisse arriver, comme si ce monde était réfractaire au changement. Les calamités qui se sont abattues sur notre monde arabe, depuis les années quatre-vingt, au siècle dernier, jusqu'à nos jours, attestent du bien-fondé de nos prévisions.» Le journaliste et essayiste algérien Hamid Zanaz, lui, préfère évoquer plus globalement le monde musulman, dans son ensemble, plutôt que réduire les problèmes de l'inertie au seul monde arabe. Ainsi, quand le virus a frappé ailleurs dans le monde, les musulmans l'ont vu comme un châtiment de la providence, mais quand la pandémie a atteint leurs pays, elle est devenue une épreuve divine.
Interrogé par le quotidien arabophone marocain Al-Sabbah, le penseur déplore que les sociétés musulmanes n'admettent pas qu'elles sont très arriérées sur le plan de la morale. Ceci, alors qu'elles reconnaissent leur retard dans tous les autres domaines, comment peut-on être arriéré partout et prétendre être avancé sur le plan de la morale'» dit-il. Dans les sociétés musulmanes, ou à majorité musulmane, il y a primauté de la religion sur la science et sur toutes les autres choses. C'est pour ça que les musulmans se conduisent de telle manière que leurs comportements n'entrent pas en conflit avec les prescriptions de leur religion, même si la réalité a montré leur inanité. Et de citer comme exemple, en plus des théories sunnites déjà évoquées, le cas du guide iranien Ali Khamanéi, qui a appelé ses concitoyens à dissuader le coronavirus par des invocations.
Hamid Zanaz cite encore le cas du prêcheur fondamentaliste marocain, Abou Naïm, qui s'est opposé à la fermeture des mosquées à titre préventif contre le Covid-19, en mars dernier. Il a affirmé qu'un pays qui interdit les cinq prières n'est plus «un pays d'Islam, mais un pays de guerre» (Dar Al-Harb), ce qui lui a valu d'ailleurs des poursuites judiciaires. Au demeurant, ce prêcheur virulent n'en est pas à sa première incartade et les autorités marocaines, à l'instar d'autres pays, comme l'Algérie et l'Egypte, ont été assez tolérantes à son égard.
Tout comme l'ont été les autorités égyptiennes à l'égard des assassins du penseur Farag Fodda, assassiné le 8 juin 1992 au Caire par des terroristes islamistes, et qui est presque tombé dans l'oubli. À ma connaissance, un seul journal égyptien, Al-Misri Alyoum, est revenu la semaine dernière sur le 28ème anniversaire de cet assassinat,avec ce titre éloquent : «Les assassins actuels de Farag Fodda.» L'auteur de l'article, Hani Lebid, s'en prend au silence des intellectuels égyptiens devant la montée de l'islam politique et son programme de conquête du pouvoir par la violence. Il dénonce notamment l'absence de réaction et d'action, pour s'opposer à la montée des idées extrémistes, qui se sont emparées de la religion et l'ont refaçonnée, selon leur idéologie et leurs desseins. Farag Fodda est mort en martyr, dit-il, parce qu'il avait osé clamer tout haut son opposition au projet islamiste et il nous avait avertis contre ses avancées dans son livre Le lanceur d'alerte. Il avait décrit, avec force détails et références, la manière dont les Frères musulmans avaient progressivement subjugué la société et infiltré insidieusement les médias publics égyptiens. Le mouvement avait aussi assuré son emprise sur les associations et les syndicats et, plus de trente ans après qu'il eut lancé cette alerte, les semeurs d'idées rétrogrades et semeurs de haine sont encore là.
Ayant été chassés du pouvoir, les Frères musulmans ont trouvé refuge chez Erdogan, et ils participent actuellement au dépeçage de la Libye, après avoir semé la mort dans le Sinaï égyptien.
A. H.
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