L'art, à l'image des sociétés, se transforme et se développe. Il s'inscrit dans une dynamique permanente de renouvellement suivant les m?urs et les évolutionssociopolitiques. Pour dépeindre parfaitement son époque, avec ses déceptions et ses espérances, cette régénération a toujours besoin de génie et de passion. N'est pas artiste qui veut ! L'émergence d'une nouvelle génération d'artistes, innovante et créatrice, est souvent le fruit d'un concours de circonstances. Partout dans le monde, les promoteurs de l'art (pouvoirs publics, mécènes,associations, sponsors et médias) ?uvrent à la cristallisation de ce renouveau incessant. Cela témoigne de la bonne santé d'une société. Les instituts de formation, les ateliers de réflexion, les espaces d'échange et de création, la critique et l'accompagnement des ?uvres nouvelles sont autant d'atouts mis en place à cet effet. A la lumière de cet exergue, peut-on parler d'une renaissance artistique en Algérie ' La question est manifestement très lourde. Il appartient aux professionnels, aux universitaires et aux académiciens de répondre amplement. De manière caricaturale, on peut dire que, présentement, l'art n'a ni la place ni le statut qui lui revient dans notre pays.Globalement, les jeunes artistes -à ne pas confondre avec nouveaux- s'inscrivent dans une espèce de légère immédiateté où l'imitation et l'apparat supplantent le génie créateur. Souvent, leur produit, fruit d'une improvisation approximative, se gâte vite. Dans les milieux dits artistiques, on retrouve, il est vrai, un tas de faux prophètes. Des chanteurs qui singent leurs pairs d'ailleurs. Des musiciens qui confondent bruit et mélodie. Des dramaturges qui mélangent bouffonnerie et théâtre. Des poètes qui se trompent de vocation. Des peintres trop kitch. De pseudos écrivains qui se prennent au sérieux. Il arrive aussi souvent que ces faux jetons aient leur entrée dans l'appareil bureaucratique et médiatique pour décrocher de substantielles subventions et se faire tirer des portraits grandiloquents. Ça peut tenir un instant, mais sans plus.Au sein de la société et parmi l'élite, on évoque avec beaucoup de nostalgie les années 1960 et 1970. En se remémorant cette époque révolue, on regrette la profondeur des ?uvres et leur beauté. A l'image de la société algérienne d'alors, les chanteurs de chaâbi, les écrivains dans les deux langues (arabe et français), les cinéastes, les plasticiens et les hommes de théâtre avaient une haute conception de l'art et vouent un grand respect au public pour se suffire d'une gloire frauduleuse. Ils prennent tout le temps pour se perfectionner et mûrir le fond thématique et l'écrin esthétique de leurs créations qui restent d'actualité à ce jour. Pour preuve : on écoute toujours avec autant de passion El Anka, Ezzahi, Guerrouabi, Hasnaoui, Kheddam, Wahbi, Idir et la liste est encore très longue. Dans la littérature, on n'a pas aujourd'hui les équivalents des Feraoun, Dib, Mammeri, Kateb, Djebbar, Lachref, Benhadouga, Djaout et compagnie. Des peintres de la trempe d'Issiakhem, Khadda, Koreïchi, Baya, Mesli et Aït Larbi se font très rares. Des dramaturges de talent comme Kaki, Mohya, Alloula, Medjoubi, Mekhoukh ou Bouguermouh appartiennent aussi au passé. On pourrait dire autant concernant la poésie, le design, l'artisanat et même la danse. Les jeunes artistes ont pourtant de quoi tenir !Evidemment, à force de vouloir ressembler aux autres, on s'est oublié soi-même. Aussi, il y a une carence manifeste en matière de formation et d'encadrement. Le pays, tout entier, ne compte que trois ou quatre écoles d'art. Vieillots, les programmes enseignés nécessitent également une adaptation au contexte et aux besoins réels de la société. Ne peut-on pas ouvrir ce champ de la formation à l'initiative privée ' Ce déphasage retarde l'émergence d'un véritable marché de l'art avec ses relais comme la critique et les réseaux de promotion et de commercialisation. L'intervention conjuguée de l'Etat et des acteurs culturels est aujourd'hui une urgence pour structurer ce secteur. C'est fondamental pour préparer l'avènement d'une nouvelle génération d'artistes qui marquera vraiment son temps. Sinon...K. A.
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Posté Le : 17/04/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kamel Amghar
Source : www.latribune-online.com