Algérie

Les artistes


Louable initiative que celle lancée par Ferhat Mehenni visant au rapatriement de l?île de la Réunion du corps de Cheikh El Hasnaoui. Le chanteur engagé se substitue à l?Etat défaillant. De la trempe de Hadj El Anka, de Fadila Dziria, de Hadj Mrizek et des grands maîtres qu?a produits le pays, Cheikh El Hasnaoui a terminé sa vie en exil, après avoir laissé à son pays une ?uvre remarquable. De son vivant, il n?a jamais eu de reconnaissance des autorités algériennes, à la dimension de son immense talent. A l?étranger, où il vivotait, aucune demande officielle ne lui est parvenue pour qu?il reprenne sa place dans son pays et reçoive l?hommage de son public. Décédé, il est privé d?une sépulture dans son village natal. Cheikh El Hasnaoui a subi à peu près le même sort que Slimane Azem, à la différence que ce dernier, rejeté par le système, a été forcé au départ d?Algérie après l?indépendance et ses chansons interdites de diffusion à la radio et de reproduction en cassettes. Ses détracteurs iront jusqu?à lui coller une étiquette de « collaborateur » avec le colonisateur français alors que certaines de ses chansons stigmatisaient l?occupant. Le titre de l?une d?elles est particulièrement significatif : Sortez de mon pays, nuées de sauterelles. Ce qui dérangeait en fait les censeurs de l?époque - et ceux qui les ont suivis avec une remarquable constance - c?est en fait le contenu politique de diverses de ses compositions. A ce jour, Slimane Azem n?a pas été pleinement réhabilité et seuls quelques titres de son répertoire sont timidement repris sur les ondes nationales. C?est dans son sillage qu?a évolué, depuis, Matoub Lounes, finissant par payer de sa vie le prix de son engagement en faveur de l?identité amazighe. Et c?est parce qu?il aimait chanter et glorifier l?amour que Cheb Hasni a été assassiné d?une balle intégriste. Faut-il qu?un artiste, pour qu?il soit reconnu et honoré par les institutions de son pays, n?ait aucun penchant pour la révolte ou qu?il se distingue par son apolitisme, son conformisme, voire sa flagornerie ? On pourrait le croire si quelques actions de reconnaissance entreprises çà et là ces dernières années par le département ministériel chargé de la culture ne venaient tempérer ce questionnement. Mais il reste tant à faire pour l?Etat et ceux qui aiment l?art : d?un côté, effacer les erreurs tragiques du passé et réhabiliter les mémoires souillées, de l?autre, redonner à la création artistique d?aujourd?hui son droit à la libre expression et l?éloigner des censures et des basses tentations mercantiles.
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