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Les architectes, l'argent et la création



Les architectes, l'argent et la création
C'est à la mode! Quand une corporation s'exprime, c'est pour revendiquer ce qu'elle considère comme étant un droit. Jeudi dernier, le syndicat des architectes agréés algériens (Synaa) a estimé qu'il est «urgent» de réviser, à la hausse bien évidemment, les honoraires liés à cette profession. Le barème en vigueur, qui date de 2001, est considéré par ce même syndicat «insignifiant et obsolète». «Nous refusons une architecture au rabais» a lancé le président de ce syndicat. Sur ce point, il n'y a aucun doute, personne ne peut accepter une architecture au rabais. Le problème est dans la définition du rabais. S'il y a celui des honoraires, il y a également celui du travail fourni. Puisque ce syndicat nous donne l'occasion d'aborder le sujet, allons-y! L'Algérie est aujourd'hui un immense chantier. Des constructions en tous genres poussent comme des champignons. Des ouvrages d'art aux zones industrielles en passant par de grands ensembles de logements. A travers tout le territoire, il n'est question que de béton, briques, grues, bétonnières, etc. Il y a, dans cette vaste reconstruction du pays, un architecte qui n'est pas passé inaperçu. C'est le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. A chacune de ses visites de travail, effectuée dans presque toutes les wilayas, nous l'avons entendu ordonner la modification des plans de construction des cités. Des plans d'où étaient «oubliés» les espaces verts, une école, un centre de santé, etc. Pour ne plus retomber dans les cités-dortoirs du passé. Sellal comblait des lacunes d'architecte. On peut se demander légitimement quels sont ces architectes qui font des plans de cités de mille, deux mille logements sans se soucier de la vie quotidienne dans ces blocs de béton. Cela ne date, malheureusement pas d'aujourd'hui. C'est le même type de cités depuis les années 1970. Bachdjarah, célèbre cité de la capitale, en témoigne. Si ce n'est pas la faute aux architectes, qui en est responsable' Pour le président du Synaa c'est tout trouvé. «En réduisant à des portions congrues la rémunération du suivi et de contrôle, la qualité des réalisations se trouve hypothéquée indéfiniment» a-t-il expliqué. Ce qui revient à dire qu'il faut payer plus pour avoir mieux. C'est logique dans l'absolu. Oui mais, quand on est architecte, médecin, avocat, dentiste, le respect de la profession par celui qui l'exerce n'est certainement pas monnayable. On ne demande pas à tous les architectes d'être impérativement tous des «Le Corbusier» mais de remplir correctement leur métier. C'est-à-dire utiliser tous les paramètres qui s'imposent pour une vie normale et fonctionnelle à l'intérieur et aux alentours de la construction projetée. Rien que çà! Et quand ce minimum n'est pas au rendez-vous, il n'est pas sûr que ce soit les honoraires qui bloquent la performance. Il faut avoir le courage de se remettre en cause. En sillonnant le pays, partout les cités qui ornent le paysage se ressemblent. Des cubes au même style, sans âme, sans aucun signe particulier pour les distinguer. Sans cachet régional. Sans parler des anomalies. Dans les VRD. Dans l'étanchéité. Dans l'exposition des façades. Au cours d'un débat télévisé, un responsable du secteur a même fait état du «copier-coller» qui a cours dans les plans livrés par certains architectes et bureaux d'études. On a l'impression que le Synaa veut soutenir que c'est l'argent qui rend créatif. L'urgence, la vraie urgence est de voir nos architectes livrer des quartiers, des rues, des boulevards, des villages, des villes dignes de ce nom et plus jamais ce qui ressemble de près ou de loin à des «cages à poules» bien alignées. Voilà l'urgence! La question des honoraires posée par la suite trouvera plus facilement sa réponse. Même une revendication doit être bien «construite»!




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