Algérie

Les Algérois se réapproprient la rue au nom de Ghaza



Les Algérois se réapproprient la rue au nom de Ghaza
A l'instar de plusieurs capitales du monde, particulièrement dans le monde arabe, la rue algérienne a fini par bouger pour crier sa colère devant ce qui se passe à Ghaza. Il faut dire que depuis le début de l'ignominieuse agression israélienne, les Algériens, particulièrement les Algérois, étaient dans l'impossibilité d'exprimer ouvertement leur solidarité avec le peuple palestinien en raison de l'interdit qui pèse sur l'occupation de l'espace public dans notre pays, spécialement dans la capitale. Hier, une poignée de citoyens a décidé de se réapproprier la rue à la hussarde, sans attendre l'autorisation de personne. Cela a donné lieu à un magnifique sursaut de bravoure populaire.Après la prière du vendredi, une marche spontanée a ainsi démarré d'une petite mosquée de la rue Necira Nounou (Belouizdad) et a pris d'assaut la rue Hassiba Ben Bouali à hauteur de la Maison de la presse. Avec deux banderoles et quelques centaines de voix s'égosillant, la marche a vite pris de l'ampleur tant nos concitoyens étaient frustrés de ne pouvoir dire leur soutien à la population de Ghaza qui croule sous les bombes depuis voilà huit jours, sans répit. « Birouh, bidam, nafdiki ya Ghaza » (nous sacrifierons notre âme et notre sang pour toi Ghaza) ; « Khaybar khaybar ya yahoud, djaychou Mohamed sayaoud » (tremble, ô tribu de Khaybar, l'armée de Mohamed est de retour), scandaient à l'unisson des voix révoltées. L'une des banderoles arborait ce slogan : « Ghaza fi'l ouyoune » (Ghaza est dans nos yeux) ; sur une autre on pouvait lire : « El Qods lana, nahnou qadimoune » (Jérusalem est à nous et nous la délivrerons). Des jeunes martelaient : « Ouvrez-nous les portes, on veut combattre Israël ». La marche progressait et grossissait à mesure qu'elle avançait en direction de la place du 1er Mai. Mais la procession se voit stoppée net par des fourgons de police pris de court et ne sachant pas trop comment gérer cette situation. Des civils des RG équipés de talkies-walkies attendaient les instructions de leurs supérieurs. Visiblement, la police avait reçu l'ordre de ne pas provoquer les manifestants qui ne demandaient qu'à en découdre avec des autorités accusées de pusillanimité envers les Palestiniens tout en se montrant sévères à l'égard de leur peuple. Une impopularité qui revient d'ailleurs dans toutes les images des manifestations de rue de par le monde arabe, où les gouvernements sont régulièrement vomis et leur veulerie décriée. Aussi, c'est avec une réelle fierté que nombre de citoyens du quartier de Belouizdad et d'ailleurs ont rallié le cortège pour crier enfin leur ras-le-bol en prenant part à une vraie marche populaire. Certains allaient même jusqu'à scander sur le ton de la provoc' : « Alayha nahya wa alayha namout, wa fissabiliha noudjahid »' Oui, le fameux slogan du FIS. De fait, cette marche rappelait beaucoup les années FIS. Une manière de piquer frontalement un pouvoir coupable, à leurs yeux, de tous les maux. Tout en faisant corps avec Ghaza, ils ne pouvaient finalement s'empêcher de sortir tout ce qu'ils ont sur le c'ur pour régler tous les comptes. Aussi, les éléments de la police étaient-ils sur le qui-vive tant la tentation était forte de basculer vers autre chose et de déborder sur le front de la « politique intérieure ». Mais ce qui tenait lieu d'encadrement de cette manif ne voulait pas non plus qu'il y ait le moindre débordement. Un deal tacite s'installa entre les deux parties. Si bien que ceux qui faisaient office d'organisateurs insistaient pour rappeler aux baroudeurs, les jeunes surtout, le caractère résolument pacifique de cette initiative. On entendait d'ailleurs crier « massira silmiya » (marche pacifique).Empêchés de progresser, les manifestants ont été invités à observer un sit-in à même le bitume. La circulation automobile sur cet axe a été ainsi interrompue pendant au moins une demi-heure. Il n'y avait que des voitures de police qui barraient la chaussée et tenaient cette belle foule en respect. Alors que les clameurs des frondeurs fusaient de plus belle aux cris de « Allah Akbar », leurs tapis de prière brandis haut, un prédicateur a lancé un appel au calme en soulignant que l'objectif de cette initiative était seulement de « dire à la face du monde que le peuple algérien est de tout c'ur avec la Palestine » et qu'« il est mobilisé pour dénoncer l'injustice qui frappe nos frères à Ghaza ». Puis les manifestants ont rebroussé chemin pour bifurquer par la petite rue donnant sur le siège de l'UGTA avant de s'immobiliser à hauteur de la grande esplanade de la station de bus Aïssat Idir. Un rassemblement y fut improvisé et un discours prononcé par le même cheikh ; discours dans lequel il a précisé que cette action de solidarité n'était qu'une initiative citoyenne qui n'était dictée par aucun parti ou officine, avant de dénoncer vigoureusement le silence coupable des régimes arabes. Il a appelé ses affidés à retourner tranquillement à la mosquée d'où le mouvement était parti. Disciplinés, ces derniers se sont dispersés dans le calme en continuant à scander des slogans pro-palestiniens. Aucun incident n'a été signalé. Il convient de rappeler que mardi 30 décembre 2008, un rassemblement de solidarité avec Ghaza avait été organisé à la Maison de la presse, une initiative là aussi indépendante lancée par des personnalités nationales et des intellectuels. Notons également cette marche, initiée par un groupe de jeunes sur Facebook, s'est achevée par un rassemblement symbolique devant l'ambassade de Palestine à Alger. Autant d'initiatives qui s'évertuent à reconnecter les Algériens entre eux et avec le monde et à les relancer sur le terrain des luttes.


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