Littérature, chanson, politique, humour, ces personnalités ont marqué cette année par leur talent et /ou leur actualité. Liste fatalement non exhaustive et surtout subjective établie par Rémi Yacine.Sabri Louatah : «Les sauvages vont bien» C'est l'invité qu'on n'attendait pas, il est entré dans la littérature française avec fracas. Son premier volume est un Ovni qui a créé un big bang, dont on ressent encore les secousses. Sabri Louatah est un marathonien qui court comme un sprinter. Ne vous fiez pas à sa fausse timidité, sa simplicité complexe, Sabri Louatah est possédé par la fièvre de Dostoïevski et l'exubérance de Tolstoï. Il écrit comme si sa vie était en danger, de peur de ne pas finir sa phrase avant de mourir ou de quitter le clavier du Mac pour le piano. Tout doit aller vite et dans la durée. Le cerveau en avance sur la langue, au moment où il prononce sa phrase, il aimerait que la nouvelle idée qui vient de lui traverser l'esprit déborde la première. Et ça fuse, dans tous les sens, une construction déconstruite et l'architecture finale fait sens. Il faut avoir du souffle (et des idées) pour écrire des pavés. L'amoureux de Proust fait exactement le contraire de l'auteur de la Madeleine ; il est dans la vie, dans le mouvement. Chaos et fracas, bruits et fureurs. Et ça tangue, rebondit, swingue. Tout s'accélère. Avec une écriture cinématographique, venue tout droit des Etats-Unis, il a fait entrer une partie de la population française dans le roman national. Pas de discours victimaire, pas de pathos, pas ce désir indécent de plaire à l'autre. L'enfant de Saint-Etienne invente un jour lointain et tout proche, où le pire est presque certain, le meilleur aussi. Entre «24h Chrono» et «The Wire». Zahir Belounis : «La kafala l'a sequestre» Il a occupé l'espace médiatique malgré lui. Parti jouer au football dans le riche émirat, Zahir Belounis s'est retrouvé otage, retenu pendant un an et demi par son club. Il a décidé de porter plainte à Paris contre trois personnes dont un frère de l'émir du Qatar.Zahir Belounis est rentré en France fin novembre après avoir obtenu le visa de sortie que les autorités lui refusaient en raison d'une procédure en justice lancée contre le club d'Al Jaish, auquel il réclame deux ans et demi de salaires impayés. Pour obtenir son visa, il dit avoir dû signer une lettre de licenciement antidatée à février 2013, qui le prive du reliquat du contrat signé avec Al Jaish en 2010 pour une durée de cinq ans ?120 000 à 150 000 euros selon son avocat.Cette plainte vise les «sponsors», les parrains du joueur qui, en tant qu'employé étranger, est soumis ? au même titre que l'ensemble des travailleurs immigrés dans les pays du Golfe ? au système de la «kafala», où chaque salarié est en fait la quasi propriété de son sponsor, son «kafil». Pour obtenir sa libération, le joueur n'avait pas hésité à entamer une grève de la faim et à multiplier les appels à François Hollande et à prendre à témoin la presse internationale.L'exil doré au Qatar peut se transformer rapidement en cauchemar pour les footballeurs. Yasmina Khadra : «J'ai 99% de chance de ne pas etre elu» L'écrivain algérien le plus connu porte le nom d'une femme, Yasmina. La littérature ne lui suffit plus, Mohammed Moulessehoul a décidé de se présenter à la présidentielle. Tel Don Quichotte, il veut s'en prendre au moulin d'El Mouradia. Lucide, forcément, l'actuel directeur du Centre culturel algérien ne se fait guère d'illusion quant au résultat de sa démarche : «Mon but est simple : changer les choses en Algérie. J'ai 99% de chance de ne pas être élu, mais je veux jouer cet espoir.» Un espoir que l'auteur de L'attentat entretient en distillant des sorties médiatiques dans la presse internationale. Les réseaux sociaux s'affolent : Mohammed Moulessehoul va-t-il phagocyter Yasmina Khadra ' Rien n'est moins sûr. A 58 ans, couvert d'éloges et de prix, Yasmina Khadra, s'il poursuit jusqu'au bout sa logique, s'attaquera à une citadelle réputée imprenable. Reste une inconnue : le programme. Quelle est donc cette Algérie que Yasmina Khadra aimerait défendre ' Réponse prochainement. Cheikh M'hamed : «Igambrou bina» Mais qui se cache donc derrière cette barbe fournie ' Indice : ses yeux pétillent d'intelligence. C'est vrai qu'il les cache quelquefois sous des lunettes de soleil. Autre indice : ses interviews décalées font le bonheur des internautes.Parodiant les télé-imams, il s'amuse à déconstruire les discours intégristes. Faut dire aussi qu'il est rock'n roll, notre Cheikh. Plutôt hard rock.Les observateurs politiques, les yeux rivés sur El Mouradia, ne l'ont pas vu arriver, une batendjel (aubergine) à la main. Pourtant, lui président, l'Algérie ne serait plus la même. Le spectacle dont il est coordinateur, «Barbès Café», a séduit des milliers de personnes en France et en Algérie. Alors, qui est donc Cheikh M'hamed ' Son nom, Mohamed Allalou. Rachid Nekkaz : «Pas de visa» Lui aussi est candidat pour El Mouradia, après l'avoir été pour l'Elysée. Il a rendu son passeport français pour se mettre en conformité avec la loi algérienne. Il a installé son QG à Chlef, terre natale de ses parents. Il devait se rendre en France pour assister à un procès. Niet. Il se retrouve sans visa. Rachid Nekkaz est l'autre candidat atypique. Physique de play-boy, sûr de lui, rarement surpris, l'ancien fils d'immigré qui a fait fortune dans l'immobilier est plein de certitudes, de confiance. Son Algérie ' Libérale en économie, conservatrice dans les m?urs. Il se présente comme réformiste.Comme un chef d'entreprise, il dresse un bilan et une stratégie. Pour faire parler de lui, autant être le premier à se déclarer. La communication a bien fonctionné.Le 3 juin dernier à Maghnia, un candidat est né. Les Algériens découvrent dans la presse un inconnu. Il récidive le 23 octobre en rendant son passeport. Il convoque la presse internationale devant l'Elysée. Econduit, il se rend à la préfecture. Il devient uniquement algérien. Mayla Saadi : «Sur les pas de mon pere» Une présence scénique incroyable, elle séduit son public avec un charme fou. Mayla Saadi féminise le chaâbi. Oui, le chaâbi au féminin existe. Elles sont quelques chanteuses à faire partie d'une belle aventure : Malya Saadi, Meriem Beldi, Syrine Benmoussa, Hind Abdellali, Samira Brahmia, et Amina Karadja. Malya Saadi donc. Son premier album Ya b'har a rencontré un succès d'estime. Son interprétation de la chanson éponyme, écrite par Mahboub Stambouli et composée par son père, H'ssicen Saadi, est envoûtante. «Toute petite, j'ai chanté le chaâbi avec mon père, j'ai beaucoup appris à ses côtés, et parallèlement je me suis essayée à d'autres genres de musiques. Ainsi, j'ai fait des tournées pendant trois ans, avec un groupe de musiciens et chanteurs gitans et c'est avec eux que j'ai appris le métier de la scène», confie-t-elle. On ne quitte jamais définitivement le chaâbi. «Même si je me suis essayée à toutes les musiques, le chaâbi est la musique qui me fait le plus vibrer, c'est quelque part une identité. J'ai le sentiment que le chaâbi et l'Algérie font partie de ce que je suis au fond de moi-même.» Du talent et du charme. Fellag : «La civilisation mitonne a la cuisine» Après avoir été ethnologue dans Djurdjurassic bled, marin dans Un bateau pour l'Australie, voyageur errant dans Le dernier chameau, bricoleur dans Tous les Algériens sont des mécaniciens, Fellag s'attaque à Samuel P. Huntington avec Petits chocs des civilisations. Il roule le couscous et se débarrasse des grumeaux des préjugés avec un talent indécent. Ses spectacles affichent complet partout, en France et en Belgique. Pas besoin de promotion, y a plus de place, nada. Fallait prévoir à l'avance. Prévoir n'est pas un verbe algérien.Il n'existe pas dans notre lexique, ou alors comme un gros mot qu'il ne faut pas prononcer en public. Ayouh, un Algérien qui prend le temps de planifier un projet, mais ce n'est pas possible ! Pourtant, pour croiser Fellag il faut jongler avec les dates. En décembre, il est en tournée en Belgique, en novembre entre son one man show et le tournage d'un film impossible, le mois d'octobre bouclé, septembre overbooké, l'été, il fait une pause et se pose en famille? Dans l'ordre et le désordre, pari perdu. Un agenda de président, ou plus exactement d'un artiste à qui tout réussit : théâtre, cinéma, littérature? 2013 est comme 2012, 2011, une année de travail et de succès. Et ce n'est pas un hasard s'il a crevé l'écran dans Monsieur Lazhar, un film canadien dans lequel il incarnait un immigré algérien hanté par des souvenirs douloureux. Son secret ' Le travail, toujours le travail. Autre gros mot?
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Posté Le : 31/12/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : El Watan
Source : www.elwatan.com