Algérie

Les ablutions doivent-elles remplacer le développement ?



Accomplir les prières, apprendre le Coran par cÅ“ur etlaisser pousser sa barbe ou construire une mosquée avec son propre argent audernier virage de sa vie, sont aujourd'hui la version réaménagée de l'article120 pour distiller le bon grain du dissident à l'époque du FLN propriétaire.L'échelle des nouvelles valeurs algériennes, dans un pays qui n'a pas encoreréglé la question de l'islamisme et de la religiosité magique, est aujourd'huicelle de la « pratique » et des « pratiquants». A la mort du général SmaïnLamari, ses anciens ennemis de l'AIS lui ont trouvé les qualités de «l'hommequi ne boit pas» et celle de l'homme pieux et modeste qui a accompli sonpèlerinage. Effacées ces années ou l'homme était accusé d'être un ennemi del'Islam et un «taghout ».Revenu de loin dans le cosmos du vide, Bouteflika est passéde l'idéologie «usines clefs en main » à la philosophie contemplative de « lamosquée clefs en main », de préférence géante et indépassable au Maghreb. Pourfaire lever les foules à l'époque de la guerre de libération, c'est lareligiosité et la religion qui ont servi de discours, bien avant le socialismeou le nationalisme confectionnés bien après. La matrice est donc là, elleremonte à Messali Hadj et sera perpétuée après Bouteflika. Elle mêle à la foisune vision simpliste du religieux, une pratique destinée à remplacerl'engagement et la responsabilité de ses propres actes et permet de développerun conservatisme paradoxal pour bloquer la terrible question de la modernité etdu développement.Cette synthèse se retrouve dans la langue de l'ENTV, dansles manuels de l'école, dans le cerveau de tout bon commerçant qui, après desannées de rapines, croit se «laver les os» en allant à La Mecque ou enfinançant la construction d'une mosquée dans ses parages pour croire seprésenter devant Dieu avec un extrait de rôle vierge et apuré.On la retrouve aussi, et enfin, dans la dernière sortiemédiatique du croustillant Ahmed Bencherif, un des anciens « décideurs » del'Algérie et qui vient d'accorder un entretien surréaliste à l'un de nosconfrères arabophones. Dans ces révélations, on retrouvera des détails surl'hypothèse de l'assassinat de Boumediène, des précisions sur la création deChadli et surtout une explication intellectuelle des nouvelles positions del'homme. Ahmed Bencherif étant passé, selon ses confessions, de l'homme quis'est opposé à l'intronisation de Bouteflika après le décès de Boumediène etqui a dit non à la révision de la Constitution pour installer Bitat, à laposition proclamée d'un homme qui soutient le 3ème mandat de Bouteflika et larévision de la loi fondamentale du pays.« Pourquoi ? » l'interrogera le journaliste. « Qu'est-cequi a changé en Bouteflika pour que vous changiez votre position ? ». Réponse:Bouteflika a appris par cÅ“ur le Coran, fait ses prières et « reste numéro de lapolitique étrangère ». Les nouveaux critères du nouvel article 120confessionnel qui font passer la réussite d'un pratiquant avant lesstatistiques d'un chef de l'Etat. Un critère qu'aujourd'hui on retrouve un peupartout: dans les entreprises, la rue, les taxis, les cafés et lesenterrements, les Algériens ayant décidé que l'Islam est la prière et pas letravail, le Coran et pas la réflexion, la piété et pas l'architecture oul'hygiène des quartiers.Bencherif explique qu'il a changé parce que Bouteflika achangé, mais on comprendra tous que l'Algérie en est au même point mort.Faut-il en vouloir à Bencherif ? Non. Il fait partie d'une époque qui persisteet d'un peuple qui n'a pas compris que Dieu lui a donné une terre pour y fairedes récoltes et pas seulement des ablutions. Le mot de la fin ? Une autreexplication du drame algérien par un complot marocain: la corruption serait unproduit dérivé de 1.000 cadres algériens employés au Maroc à l'époque de laguerre et qui nous sont revenus avec de mauvaises habitudes. La corruptionn'ayant rien à voir avec le pétrole ou la rapine mais avec les gens venus duroyaume voisin pendant et après la guerre. Accuser le Maroc et surtout les gensvenus du Maroc ? Bouteflika ne va pas être très content de Bencherif.


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