Le citoyen qui suit le feuilleton des grands scandales de corruption et de dilapidation des biens publics n'est qu'aux premiers épisodes. Le pôle pénal économique et financier, créé en septembre 2020, spécialement pour lutter contre les infractions économiques et financières de grande complexité et les infractions qui leur sont connexes, a encore énormément de travail devant lui. En 9 mois d'existence, cette nouvelle juridiction qui a été saisie pour 141 dossiers, a décidé de retenir et d'instruire 83 affaires. Onze d'entre elles ont été finalisées et les personnes mises en cause ont été jugées. Ce qui implique donc que 72 nouveaux procès (en cas de non-jonction des dossiers) de corruption et de dilapidation de l'argent public auront lieu dans les mois à venir. C'est ce qu'a révélé, hier, dans une conférence-bilan, le procureur général du pôle pénal spécialisé. Ce dernier a commencé par préciser que sur les 83 dossiers pendants devant le pôle spécialisé, 57 sont en phase d'instruction, le reste est toujours au stade des enquêtes préliminaires menées par les services de la police judiciaire relevant des corps de la Sûreté nationale, de la Gendarmerie nationale et de l'Office central de la répression de la corruption. Il a indiqué également que parmi les affaires instruites, 34 ont été récupérées auprès de la Cour suprême après l'abrogation du privilège de juridiction. En d'autres termes, la justice enquête actuellement dans 34 dossiers impliquant des ex-hauts fonctionnaires de l'Etat. Le nombre de ces ex-hauts fonctionnaires n'a pas été spécifié, mais de manière globale, pas moins de 723 personnes dont 47 femmes et 149 sociétés sont poursuivies dans ces grands scandales financiers. Tenant à démontrer, chiffres à l'appui, que la justice algérienne tient au respect de la procédure pénale en ne recourant à la détention prévention que comme une mesure exceptionnelle, le procureur général affirme que seulement 55 personnes poursuivies, dont quatre femmes, sont en prison «ce qui représente un taux de 7,6%». Et d'ajouter que «ce taux de moins de 10% matérialise le respect du principe de l'exception de la détention provisoire par la justice algérienne». Le représentant du ministère public qui est revenu, ensuite, sur les crimes et délits les plus répandus, a soutenu que la majorité des inculpés, qui est à plus de 56% de fonctionnaires, est poursuivie principalement pour attribution d'indus avantages dans le cadre de l'octroi des marchés publics et de contrats, abus de fonction, dilapidation de deniers publics et dissimulation de produits de crime. Des chefs d'accusations punis par la loi 01-06 de lutte contre la corruption mais aussi par le Code pénal. Pour infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l'étranger, 81 personnes ont été inculpées par le pôle spécialisé. Il s'agit là de l'argent illégalement transféré vers l'étranger qui doit être récupéré. Et à ce propos, il faut rappeler que, mardi dernier, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a affirmé dans un entretien avec la chaîne Al Jazeera que «des centaines de milliards de dollars ont été volés et ''transférés vers l'étranger par la Issaba''». Récupérer ces sommes astronomiques s'annonce difficile, de l'aveu même du procureur général qui n'a pas manqué de souligner que «la procédure de récupération des avoirs et des biens à l'étranger est longue et très compliquée en raison, notamment de l'absence des conventions d'entraide judiciaire bilatérales». Malgré les difficultés, le pôle multiplie les efforts et a adressé, 53 commissions rogatoires internationales aux autorités judiciaires, notamment de la Suisse, la France, l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg, le Panama, la Grande-Bretagne, l'Irlande du Nord, la République populaire de Chine, les Etats-unis et les Emirats arabes unis. Aussi, 21 mandats d'arrêt internationaux ont été tous publiés et généralisés sur la base d'avis de recherche internationaux lancés par Interpol et faisant l'objet de demandes d'extradition auprès des pays où se trouvent les individus concernés. Le procureur de la République a affirmé que la différence des systèmes juridiques et judiciaires des pays est à l'origine du retard important accusé dans l'application de ces décisions tout autant que la crise sanitaire. Enfin, le procureur a annoncé que 11 affaires ont été traitées par le pôle depuis sa création et qui ont permis la récupération de 750 biens immobiliers, 1387 biens mobiliers, la saisie de cinq bons du Trésor et le gel de 1011 comptes bancaires.
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Posté Le : 10/06/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Hasna YACOUB
Source : www.lexpressiondz.com