Algérie

Lemroudj, le métier de poterie tend à disparaitre



Lemroudj, le métier de poterie tend à disparaitre
Autrefois, toutes les femmes de Lemroudj maîtrisaient parfaitement les techniques de la poterie traditionnelle. Les vieilles dames ayant appris le métier auprès de leurs mères ou de leurs voisines le transmettaient à leurs filles bien avant qu'elles ne se marient.

Chaque maîtresse de maison fabriquait elle-même les ustensiles dont elle avait besoin pour équiper son foyer. Pour cela, elle ramenait la terre d'argile nécessaire.

Souvent, le gisement de terre d'argile se trouvait près du village et toutes les femmes s'y approvisionnaient en allant par petits groupes. Elles emmenaient avec elles de petites pioches ou binettes pour creuser et faire sortir la terre d'argile. Cette dernière était transportée à la maison en utilisant un contenant appelé en kabyle 'Thakaffachth' faite avec de l'alfa.

Une fois l'argile brute arrivée à la maison, les femmes l'effritaient en utilisant une massue en bois. L'argile en poudre passait par un tamis pour lui enlever tous les détritus.

L'argile était ensuite versée dans un contenant en y ajoutant de l'eau avant de procéder à son malaxage pour obtenir la pâte nécessaire à la confection d'objets tels que les ustensiles, Ikkoufane (akkoufi au singulier), etc.

Avant de commencer la réalisation d'un objet, la femme choisissait une pierre plate ou un objet plat fait d'argile, appelé en kabyle 'amadhoune' pour servir de plateforme. Ce dernier avait la forme d'un disque de 50 à 60 cm de diamètre et de 3 à 4 cm d'épaisseur. Il était utilisé aussi et surtout comme dessous ou comme couvert de jarre faite d'argile appelée en kabyle 'Akkoufi' ou 'Thakkoufith'.

Avec la pâte d'argile, les femmes fabriquaient divers ustensiles tels que les assiettes (Thitavsiyine), Thirvoyines (Tharvoyth au singulier), Ivoukalène (Avoukal au singulier), thivakiyine (Thavakith au singulier), Ivofrohane (vofrah au singulier), Thichouyine (Thachouyth au singulier),etc.

La fabrication des ces objets nécessitait beaucoup de patience de la part des femmes. Car le processus passait par plusieurs phases : la préparation de la terre et de la pâte d'argile, la confection des objets, la mise à la cuisson et enfin la décoration.

Pour la cuisson des objets fabriqués, les femmes préparaient un grand feu avec 'Thimargha' (de la bouzze de vache séchée) et les bûches de bois. Une fois le feu éteint, les objets refroidis étaient retirés un par un avec beaucoup de précaution afin d'éviter la casse.

La décoration simple et originale de chaque objet avec des teintes locales fabriquées par les femmes elles mêmes achevait le processus de fabrication artisanal.

A travers le travail de l'argile et de la laine et leur participation aux travaux des champs, les femmes d'antan se sont distinguées en montrant de quoi elles étaient capables.

Non seulement elles participaient à la production de biens et services dont leurs foyers avaient besoin, elles transmettaient les métiers à leurs filles pour assurer la relève d'autant plus qu'à l'époque il n'y avait pas d'école au village.

De nos jours, au village Lemroudj, à l'instar de beaucoup de métiers féminins, celui de la poterie a tendance à disparaitre et beaucoup de femmes ne gardent qu'un vague souvenir.

Certes les femmes de Lemroudj peuvent acheter tous les ustensiles dans les magasins mais la poterie locale aurait pu servir à alimenter le marché d'objets traditionnels dans le domaine touristique. C'est un créneau porteur d'emplois pour peu que l'on s'y intéresse.

Auteur : Rachid Sebbah


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