Algérie

Le XX° siècle dans l’art algérien



Dans le cadre des manifestations réalisées à l’occasion de l’Année de l’Algérie en France, il est apparu indispensable de mettre en œuvre une exposition qui retrace l’histoire moderne et contemporaine des arts plastiques en Algérie.
Cette exposition a comme ambition de faire connaître les artistes et les œuvres qui ont été produites par des artistes algériens depuis les années vingt, en essayant d’en préciser les particularités, les parti-pris, les spécificités qui appartiennent au contexte de ce pays.

La sélection proposée, tout en rendant compte des pratiques de quatre générations successives, est cependant fortement liée par les questionnements et les problématiques que posent les relations avec la culture occidentale – et son poids de "modèle" – et les cultures singulières et "ethniques" des artistes mêmes.

Si l’origine d’une histoire de l’art algérien est à associer au renouveau de la miniature par la figure tutélaire de Mohamed Racim – dont les œuvres ne sont pas montrées dans cette exposition – c’est bien avec les propositions de Azouaou Mammeri, Abdelhalim Hemche et Mohamed Temmam que s’affirment des tentatives de s’approprier les éléments de la modernité artistique, allant de l’impressionnisme au fauvisme, et de bâtir un langage iconographique propre.

Cette génération, qui couvre une période allant des années vingt au début des années cinquante, s’accompagne d’autres propositions plus personnelles ou autodidactes, dont Haddad Fatma Baya Mahieddine (Baya) est la représentante la plus connue, puisqu’elle expose dés 1947 à la galerie Aimé Maeght.

Dès ces années là, cependant, des jeunes artistes vont soulever d’autres questionnements, et vont revendiquer une esthétique qui synthétise l’héritage de la calligraphie arabo-musulmane et les abstractions occidentales. Mohamed Khadda, M’Hammed Issiakhem, Mohamed Louail, ou Choukri Mesli vont imposer et poursuivre une œuvre qui affirmera son importance une fois l’indépendance du pays recouvrée, comme le confirmera leur participation, avec d’autres, au rassemblement qui s’opère en 1967 sous le nom d’ "Aouchem" - L’école du signe- et qui perpétue ces recherches et ces expressions.

Les années qui accompagnent la fin de la guerre d’indépendance vont indéniablement marquer une rupture sur le plan culturel, bien que ce changement se vérifie davantage à un niveau structurel avec la création de l’Union Nationale des Arts Plastiques dés 1963. Si l’on observe une certaine prépondérance pour une esthétique proche du réalisme socialiste et la volonté de privilégier toutes les formes de l’art "populaire", tel qu’on peut l’observer dans les nombreuses commandes publiques de l’heure, on constate également la présence d’artistes davantage engagés dans des expressions plus singulières, dont Ismail Samson et Denis Martinez sont parmi les plus représentatifs.

C’est au sein de l’École des Beaux-arts que vont se manifester, à partir des années soixante-dix et surtout pendant les années quatre-vingt, des tentatives de rupture avec les contenus et le support académiques du tableau, comme le manifestent des artistes tels que Malek Salah, Hellal Zoubir. Leurs enseignements vont cependant connaître des années de relatif silence pendant la terrible décennie 1990, pour mieux renaître et se conforter depuis quelques années, avec la création du groupe Essebaghine, qui comporte entre autres Karim Sergoua et Ammar Bouras, dont les œuvres sont présentées ici.

Enfin, il a semblé indispensable de manifester la présence des artistes algériens appartenant à la "diaspora", dont Samta Benyahia installée en France et Houria Niati, qui vit à Londres depuis 1977, restent parmi les plus représentatives. Enfin, est évoquée la génération née en France après 1962, et, parmi les nombreux artistes qui en font partie, on a choisi de montrer des œuvres de Zineb Sedira, née à Paris mais installée à Londres, et dont le travail interroge les questions de représentation de la féminité dans les cultures arabo-musulmanes et occidentales.

Cette histoire, en substance, semble éminemment proche de celle d’autres contextes post-coloniaux, qui ont vu les artistes, et l’art, se débattre et s’affirmer dans un faisceau de contradictions et de complexités généré par la présence, puis l’héritage, des enseignements du monde occidental. Si le phénomène de la mondialisation essaie, avec ses propres contradictions et ses objectifs souvent discutables, de prendre acte d’une création contemporaine à la fois multiforme et présente dans toutes les régions et les cultures du monde, il est cependant notoire de constater la relative absence de l’Algérie dans ce concert de reconnaissance actuel. Les explications à cette situation sont elles-mêmes nombreuses et complexes, et dépendent sans doute autant de l’histoire coloniale très particulière de ce pays, comme des enjeux difficiles et délicats que connaissent ses artistes à l’heure de bâtir un art qui allie une identité culturelle et une participation aux questionnements de la modernité.

Le moindre des paradoxes, cependant, reste de voir combien les changements et les mutations qui affectent l’art occidental depuis deux décennies nous invitent à reconsidérer avec d’autres critères et d’autres modes d’évaluation les propositions qui se sont constituées depuis presque un siècle sur ses marges. L’historicité linéaire de l’art s’étant épuisée, les lectures rétrospectives de sa production et de ses bien-fondés chronologiques se voient elle-même remise en cause, pour nous permettre de nous pencher davantage sur la réalité des engagements individuels et culturels spécifiques qui se sont manifestés ici et là, fût-ce au prix en apparence évident de participer à une histoire souvent exogène, tout en revendiquant l’affirmation de son histoire propre.

Ces questionnements, qui ne peuvent être abordés en totalité par la sélection des artistes présentés dans cette exposition, s’accompagnent ainsi par la publication d’un ouvrage comportant plusieurs contributions d’auteurs, un chapitre catalogue consacré aux artistes présentés, et enfin des annexes, où sont reproduits des manifestes, des articles, des écrits et préfaces d’expositions particulières…Cet ouvrage ainsi conçu entend offrir une information critique et encore peu abordée sur l’histoire artistique de ce pays.

Malika Bouabdella traite de certaines singularités telles que Khadda, Issiakhem et Mesli lors du contexte de l’indépendance, Dalila Orfali rend compte de la politique d’acquisitions et de la fondation d’un musée des beaux-arts, Fatma Zohra Zamoum relate la période plus contemporaine, des années soixante-dix à aujourd’hui.


Le XX° siècle dans l’art algérien est organisé et mis en œuvre dans le cadre de "Djazaïr, une année de l’Algérie en France", Commissariat Général algérien de L’Année de l’Algérie en France et Commissariat Général français et AFAA, Ministère des Affaires Etrangères et Ministère de la Culture et de la Communication.




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