Le vrai-vrai

Pour elle, tous ceux du Club des Pins, quoi qu?ils disent, étaient de près ou de loin impliqués dans la gestion passée. Sa démocratie à elle passe par le marché de la rue des Aurès ou de M?dina J?dida. Les gens du Club des Pins sont loin des problèmes du club des pains. Car nous autres, le drapeau, il est incrusté dans notre sang. On n?attend pas qu?il nous soit distribué comme un courrier émanant de région étrangère. Le nationalisme...«Eddimokratia fi diar khânzine...». Comment voulez-vous que ça marche ? Nos cités tombent en ruine... Les ordures... les égouts bouchés... le même produit change de prix entre un magasin et celui d?à côté... «el-khatfa». Elle ne comprend rien aux gesticulations verbales de ceux qui ont décidé de représenter la société civile, de parler en son nom. A la télé, pendant des heures, dit-elle, on nous passe les invités spécialistes en concepts savants pour nous expliquer comment on est arrivés à cette situation de crise, et les manières d?en sortir. Les fonds souverains, pour elle qui commence à racler les fonds de caisse la première quinzaine du mois, c?est du khorti. Ses fonds souverains à elle en voient de toutes les couleurs à travers le prix de la baguette parisienne quand elle est chez le boulanger. Qu?on disserte sur le droit au travail, à prendre du dessert ou la manière de rentabiliser les richesses du désert, c?est le dernier de ses soucis. Les différentes interventions des spécialistes, diffusées sur notre chaîne de télévision, prenaient la forme d?offres de service comme si les intervenants passaient un concours d?accès à un quelconque poste. «Que le meilleur perde In châ Allah». Parce que ceux qui travaillent réellement pour le bled, ils n?ont même pas le temps de regarder la télé, tellement ils arrivent crevés, et leur patriotisme ils l?affichent chaque matin, pointant à l?heure à leur boulot ! Que les «bas-triotes» arrêtent de nous donner des leçons, eux qui se font soigner les angines... et importer leurs engins de là-bas !