Le vieil Ali et la mer

Le long de la côte algéroise, les férues de la pêche à la ligne s’adjugent le trophée de l’endurance à attendre la bonne prise. Le soir venu, c’est la folle course à la ligne. On se précipite sur le front de mer pour avoir la meilleure vue sur le large, les appâts amorcés, les lignes lancées, on attend sagement que ça accroche. Toute une gestuelle marquant l’adresse du pêcheur. Après plus de cinquante ans de pratique, Ali, le vieux loup de mer reprend du service. Dans sa gibecière composée d’accessoires de pêche, il y a la crevette grise. Lui le vaillant marin ayant bourlinguer sur les mers et océans garde en mémoire les terribles vagues ayant emporté ses amis. La seule consolation, c’est ce regard porté vers l’horizon infini.  Il aura tout vu dans ses longues odyssées. Il doit tout à la mer. Et maintenant une longue nuit de patience à attendre une pression, même la plus légère, sur sa canne. Le dos voûté par tant d’années de dur labeur, il arbore fièrement sa toute dernière petite prise….«Il m’a fallu des heures pour pêcher ce monstre», dit-il en exhibant sa prise et en lançant sur un ton badin : «Comme dit le dicton, le poisson grandit entre les mains du pêcheur». Dans un élan frénétique, il remet sa ligne en mer en quête d’un autre monstre. Il attendra encore longtemps la petite tasse de café, bien callé entre les rochers et la cigarette au bec. Son visage s’illumine soudain. Cette fois-ci c’est un véritable loup de mer de 3 kg de gagné. Enfin il aura de quoi en faire un plat. Tôt le matin, notre pêcheur les yeux mi-clos, tourne le dos à la mer. Il aura tout tenté pour prendre ce dont il avait besoin pour épater …