Le tueur avait-il collaboré avec la police ' Affaire Merah

Souad Merah soulève le non-dit de la collaboration de son frère Mohamed avec la police. C'était sur. Télé, dans un entretien où elle s'est expliquée, lundi, sur ses propos tenus en caméra cachée sur M6, piégée dans «Enquête exclusive». Son avocat a déposé une plainte pour atteinte à la vie privée.
Lyon (France).
De notre correspondant
La s'ur de Mohamed Merah, le «tueur au scooter» de Toulouse et Montauban, fait un virage à 180° dans un entretien accordé à la chaîne de télévision en continu ITélé, lundi. Non, sa famille n'a pas été nourrie de racisme envers les juifs : «Abdel ment !» (son autre frère coauteur, avec Mohamed Sifaoui, de Mon frère, ce terroriste). Non, elle n'a pas à être accusée des tueries attribuées à son frère abattu par la police en mars dernier après un camp retranché, sur le ton «ce n'est pas parce qu'on est de sa famille'» Elle verse une larme lorsqu'elle parle de la mort de son frère Mohamed, après s'être tout de même placée dans le c'ur des familles traumatisées par les assassinats commis de sang-froid. «Je suis une mère, je comprends la douleur des mères, c'est mon frère, je l'aime malgré tout.»
Aucune dénonciation par contre des meurtres dont son frère n'a plus à être accusé puisqu'il est mort avant que la justice ne débatte de sa responsabilité. La mort de Merah éteint toute démarche judiciaire sur les faits dont il est accusé. Seules les enquêtes administratives en cours sur le manque de suivi de ses penchants terroristes par les services de sécurité ouvriront le front des failles et détermineront peut-être, un jour, le vrai scénario intervenu à un moment politique-clé, celui de la fin du mandat du président en exercice, Nicolas Sarkozy, candidat à sa succession.
Souad Merah affirme ainsi que son frère Mohamed avait eu envie de collaborer avec la police si on le lui demandait, rouvrant le trouble sur la thèse de l'agent double : «Il m'a dit qu'il collaborerait avec la police si on lui proposait de bosser avec elle.»
La salafiste Souad Merah, vêtue d'un djilbab noir, en contravention avec la loi, parle cependant du «combat qu'il a mené tout seul». Ce terme «combat» résume ce qu'elle pense réellement de son frère, surtout qu'elle ajoute les «choix qu'il a faits». Ces deux termes «combat» et «choix» son ambivalents. Le montage ne les a pas supprimés. En tout cas, Souad Merah, qui ne s'était jamais exprimée depuis mars dernier, parle de l'amour d'une s'ur : «Il reste mon frère, ma chair et mon sang.»
Enfin, en ce qui concerne l'émission «Enquête exclusive» diffusée sur M6, elle dit avoir été manipulée par le journaliste et par son frère Abdelghani : «On m'a piégée.» Son avocat a déposé une plainte lundi contre la chaîne, contre le documentariste Mohamed Sifaoui ainsi qu'Abdelghani Merah, frère aîné de Mohamed. La plainte s'appuie sur l'article 226-1 du code pénal qui interdit d'enregistrer et de diffuser des paroles prononcées à titre privé. A ce titre, la plaignante pourrait avoir gain de cause. Par contre, la plainte est à double détente, car si on n'a pas le droit de diffuser des propos privés sans consentement, on n'a pas le droit non plus de diffuser des propos qui incitent au terrorisme, à la haine et au racisme.
Et là, M6 pourrait être poursuivie par le parquet, ce qui ne sera certainement pas fait puisque le procureur de Paris s'était plutôt empressé d'ouvrir une enquête préliminaire sur les propos de Souad Merah et non pas contre le canal qui les a diffusés. C'est la quadrature du cercle. A ceux qui applaudissent M6 pour avoir «révélé» une terroriste potentielle répondent ceux qui estiment qu'on n'a pas à lui faire de publicité, conformément à la loi qui a érigé des digues en ce sens.