L'argent de l'informel fait-il tourner la tête au gouvernement ' C'est du moins la question que se posent autant les milieux financiers que les partis politiques après la décision de la Banque d'Algérie de baisser la garde en matière de dépôt et de retrait de fonds. La crise financière, la hausse des déficits, le poids de la demande sociale et la faiblesse des ressources prennent certes le gouvernement à la gorge. Mais, est-ce autant une raison valable et objective pour que la collecte des fonds de l'informel devienne à ce point une urgence absolue du gouvernement' Jusqu'à oublier toutes les mesures de précaution en matière de prévention des actions de blanchiment de l'argent de la drogue, du grand banditisme et, surtout, de soutien du terrorisme' Des questions qui ne devraient pas avoir de réponses dans l'immédiat.Il y a juste cette indication explicite des choix du gouvernement de revoir sa stratégie de lutte contre l'argent informel à travers cette déclaration du ministre des Finances jeudi à Blida que les banques de la place ne vont plus exiger la provenance des fonds pour toute opération de bancarisation. C'est en fait une position officielle du gouvernement vis-à-vis de cette question délicate de l'origine des fonds qui peuvent désormais irriguer les banques. Une décision qui sonne du coup le glas des mesures de contrôle draconiennes de l'origine de fonds douteux soumis à bancarisation. Et, dans la foulée, les verrous qui bloquaient, du moins qui en faisaient office, le blanchiment supposé de fonds douteux sautent. La Banque centrale avait en effet annoncé mercredi avoir décidé d'alléger les procédures de dépôts et de retraits de fonds au niveau des banques primaires.
Certes, le gouvernement Ouyahia a, dès son installation, insisté sur la nécessité de collecter au maximum les fonds non bancarisés avant d'appuyer sur le champignon, en dépit des réserves des économistes et experts, pour imposer le financement non conventionnel, la «planche à billets». Le Premier ministre n'a pas fait également grand mystère pour dire que les «caisses sont vides» et donc qu'il faut aller vers une sorte d'endettement auprès de la Banque d'Algérie pour faire tourner l'économie du pays, «à crédit», comme il l'a rappelé récemment à Biskra. Il est donc tout à fait logique de comprendre que la Banque centrale, bras financier et monétaire de l'Etat, aura ainsi reçu le feu vert de l'exécutif pour faciliter désormais la bancarisation de l'argent de l'informel. Pour étonnante qu'elle soit dans le contexte politique actuel, la décision de la Banque d'Algérie, et au-delà du gouvernement, d'assouplir les modalités de dépôts et de retraits de fonds importants obéit à une logique simple: bancariser une masse monétaire importante qui circule dans l'informel et qui pourrait aider les finances du pays, si elle vient à être intégrée dans le circuit bancaire officiel.
Le N2 de la Banque d'Algérie a été formel sur le niveau de la masse monétaire en circulation et qui échappe aux banques: elle est évaluée entre 13.000 et 14.000 milliards de dinars. Et, fatalement, une grande partie de cette manne fiduciaire sert de transactions commerciales ou financières aux opérations informelles, non bancarisées, et donc qui ne profite guère à l'économie nationale à un moment de grand stress financier. D'autant que le montant réel de l'argent qui circule dans le circuit informel, ou tout simplement thésaurisé par les ménages, est devenu une obsession pour les gouvernements qui se sont succédé depuis 2014 et qui, tous, veulent en capter au moins la moitié. Une sorte de trésor d'Ali Baba. Et, pour donner plus de poids à cette décision, le ministre des Finances lui-même n'a pas pris de gants ni de mouchoir pour affirmer qu' «il y a d'autres méthodes pour contrôler la provenance des fonds et lutter contre le blanchiment d'argent».
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Posté Le : 25/02/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Mahdi Boukhalfa
Source : www.lequotidien-oran.com