Algérie

Le théoricien de la «deuxième gauche» tire sa révérence



Le théoricien de la «deuxième gauche» tire sa révérence
Michel Rocard, ancien Premier ministre socialiste, théoricien de la «deuxième gauche», est mort samedi, à l'âge de 85 ans, à l'hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris.Michel Rocard rejoint les socialistes en rupture avec Guy Mollet à propos de la «politique algérienne». En 1960, il participe à la fondation du Parti socialiste unifié. Bien qu'il ait été son Premier ministre de mai 1988 à mai 1991, Michel Rocard avait des relations conflictuelles avec François Mitterrand qui lui barrera la route de l'Elysée à trois reprises. Le premier différend avec François Mitterrand concerne l'indépendance de l'Algérie pour laquelle Michel Rocard, anticolonialiste, était favorable.Avec François Mitterrand, disait-il dans une interview à l'hebdomadaire Le Point du 23 juin 2016, «on s'est tout de même dit beaucoup de choses par écrit. Ce qui a scellé la qualité de nos relations, c'est quand j'ai écrit pendant la guerre d'Algérie, qu'il était un assassin. Ministre de la Justice, il refusait d'instruire les demandes de grâce des condamnés à mort. Il faisait la grève administrative pour tuer. Forcément, il n'a pas aimé. Nous n'en avons jamais reparlé? Cela nous aurait compliqué le travail. Parce qu'on a bien travaillé ensemble».Dans le même entretien, il révèle également que Mitterrand et lui avaient «tellement peu de plaisir à être ensemble que nous travaillions très vite. Nous avons fait le RMI ensemble dans l'enthousiasme. Et puis il m'a laissé faire la Nouvelle-Calédonie à ma manière. Et la CSG, certes très discutée, mais qui est tout de même un impôt de justice, et les Français l'ont bien compris». Michel Rocard est à l'origine de la contribution sociale généralisée (CSG) et du revenu minimum d'insertion (RMI). Il avait ouvert les chantiers de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, de la retraite. Deux mois après son installation à Matignon, il signe les accords de Matignon pour l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie.Père de la «deuxième gauche», Michel Rocard incarnait une vision rénovée de la gauche, prenant en compte «les contraintes de l'économie mondialisée» sans «renoncer aux ambitions sociales». Il y a quelques jours, il s'exprimait sur le Brexit ? qu'il soutient comme une chance pour l'Europe de se réinventer ? et sur la gauche qu'il a qualifiée de «la gauche la plus rétrograde d'Europe» dans une longue interview à l'hebdomadaire Le Point, dans laquelle il relevait que «les droits des citoyens ne se résument pas aux ??acquis sociaux''. Le véritable socialisme, c'est l'accès pour tous aux activités de l'esprit».Et, plus loin : «(?) Le vrai signal de gauche (?) consiste à donner à l'homme plus de temps libre pour la culture, le bénévolat associatif (?)» Plus loin, il a soutenu que «le capitalisme doit ménager cet espace. C'est le modèle du socialisme démocratique à la scandinave». Il avait rappelé que «le socialisme des origines avait une dimension internationale et portait un modèle de société (?). La conscience de porter une histoire collective a disparu, or elle était notre ciment».Toujours dans Le Point, il indique : «Nous parlons et écrivons le mot ??égalité'' partout, mais dans les faits, la France est dans la moyenne de l'Europe, entre la Grande-Bretagne, clairement inégalitaire, et l'Allemagne, qui fait mieux que nous. Je le répète, les pays scandinaves montrent la voie, celle d'une organisation sociale plutôt harmonieuse, sans trop de conflits, et respectueuse des biens collectifs : éducation, santé, transports publics et environnement.»A gauche comme à droite, la classe politique s'accorde à rendre hommage à un homme de conviction, un intellectuel et un homme d'action libre de ses opinions, sans concession politicienne et sans souci pour le politiquement correct. Ainsi, François Hollande a salué «une grande figure de la République et de la gauche», «Rocard ne dissociait jamais son action de ses idées (?). C'était un rêveur réaliste, un réformiste radical, animé par le mouvement des idées, le sort de la planète et de la destinée humaine».Pour Manuel Valls, Rocard a «incarné la modernisation de la gauche et l'exigence de dire la vérité». «Je me suis engagé en politique par et pour Michel Rocard. Parce qu'il avait dit en 1978 qu'il n'y avait pas de fatalité à l'échec de la gauche. Parce qu'il disait avant les autres que le changement passe par la réforme et non par la rupture», a-t-il déclaré. Alain Juppé qui avait écrit un livre avec lui a salué un «esprit agile, une culture historique, un goût du débat sans concessions mais sans sectarisme».


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