Le temps des «idiots inutiles»

Parce qu'il avait été l'incarnation même de la grandeur en des moments où la couardise de ses condisciples ouvrait la voie au Putsch de Munich en 1938, la mesure devra être de rigueur toutes les fois que Churchill sera comparé à un autre membre de l'espèce humaine. «Vous avez voulu éviter la guerre au prix du déshonneur ; vous avez le déshonneur et vous aurez la guerre», avait tonné le grand homme à l'intention du Premier ministre Chamberlain dont le pacifisme conforta Hitler dans son hégémonisme guerrier. La suite s'écrira tragiquement et donnera raison à l'homme au cigare éternellement vissé aux lèvres. Chacun fera l'interprétation qu'il voudra de cette morale.
Plus de 70 ans plus tard, dans une petite localité des Yvelines, en France, Fatima Afif, simple employée d'une crèche associative, remportera une victoire judiciaire inattendue. Le jugement rendu en sa faveur surprend plus par le motif qu'il récuse que par le rétablissement d'une justiciable dans ses droits. A l'origine était une simple affaire de licenciement confirmée par le tribunal des prud'hommes et la Cour d'appel de Versailles. Les deux instances judiciaires avaient en effet jugé que le motif du licenciement (refus de l'employée d'ôter son voile islamique) n'était pas illégal. L'employée, tenace et pas impressionnée du tout, portera le glaive de son combat et de sa foi jusqu'à la Cour de cassation. Et c'est ainsi que le 19 mars dernier, après une âpre bataille judiciaire, Fatima Afif finit par obtenir gain de cause. «S'agissant d'une crèche privée», la plus haute juridiction judiciaire française a estimé que le licenciement de cette salariée constituait «une discrimination en raison des convictions religieuses» et devait être «déclaré nul». Au pays où la laïcité dans les institutions éducatives revêt un caractère sacré, la décision de la Cour, véritable coup de tonnerre dans le ciel de la modernité, est accueillie avec incrédulité par les défenseurs de la «séparation de l'Eglise (de la Mosquée ') et de l'Etat». Il n'est jusqu'au ministre de l'Intérieur qui n'exprimât son émotion à titre privé. Mais, la loi c'est la loi et elle doit être appliquée.
Fatima Afif, par sa détermination et son courage, n'est pas pour rien dans ce qui est désormais considéré comme une nouvelle jurisprudence, que le gouvernement va d'ailleurs s'atteler à invalider par un amendement à la loi. Mais à ce stade, une question : la petite employée de crèche a-t-elle mené seule un combat qui apparaît bien titanesque pour ses frêles épaules ' Le doute est permis quand on connaît les méthodes des milieux islamistes qui ont déclaré, de longue date, une guerre sans merci à la laïcité en France. Eux, qui n'ont pas en odeur de sainteté (sic) la démocratie ont répertorié ses failles et ses faiblesses juridiques. Ils sont constamment à la recherche de la moindre brèche de pénétration pour leur «juridisme djihadiste».
Endormis par leur obsession du respect des libertés individuelles, y compris celle de s'habiller comme on veut et donc de porter le voile, beaucoup de démocrates sincères et honnêtement respectueux des religions ne voient pas le' voile qui leur trouble la vue. Certains défenseurs des droits de l'Homme, hier soutiens des islamistes algériens qu'ils dédouanaient de leurs massacres de civils, se retrouvent parmi eux, en France. Les défenseurs inconditionnels de la laïcité les désignent sous l'appellation condescendante d'«idiots utiles» de l'islamisme et de l'intégrisme. Ce qui n'a rien d'infamant pour qui connaît les objectifs de ces «frères» qui travaillent à islamiser la planète dans son intégralité avant l'arrivée de «Dedjal».
Bien sûr, toute comparaison entre Fatima Afif et Churchill est fortuite et inopportune. Sinon à travers une forme de similitude de comportement sociétal et politique qui permet au fascisme paré de fausse vertu de creuser son sillon droit vers le tombeau des libertés. Au temps des «idiots utiles» et surtout des «idiots inutiles», le monde actuel a grand besoin d'autres Churchill et de moins d'«éducatrices» en voile.
Quelle différence entre un «idiot utile» et un «idiot inutile» ' La réponse nous est venue de Tunisie où un président provisoire prétendument laïc et de gauche continue, toute honte bue, de présenter Ennahda comme un «parti conservateur à tendance religieuse» tout-à-fait fréquentable et sans danger pour la démocratie. Mais qui vous a fait «Président provisoire», M. Marzouki ' Le bourrichon monté à bloc et apparemment convaincu de son destin national, voire plus, l'actuel locataire du Palais de Carthage a jugé le moment venu de faire part de son expérience à la tête de l'Etat tunisien (c'est trop dire, mais bon') et surtout du succès -rien que ça !- de sa cohabitation avec Ghannouchi et ses islamistes. Ne manquant pas au passage de planter des banderilles dans le dos des «laïques extrémistes» qui n'ont pas compris que ses partenaires islamistes ne sont, en fait, que des «conservateurs à tendance religieuse». Plus mégalomane que Marzouki, tu meurs'
Voilà ce qui arrive quand on prend pour mentor la ligue des droits de l'Homme française au lieu de s'inspirer du combat d'un homme comme Churchill. De Fatma Afif et de Marzouki, qui est le battant, ou plutôt la battante '
A. S.