«Le téléphone est un moyen de gestion de l'angoisse»

- Croyez vous que l'Algérien est addictogène à  n'importe quelle nouveauté '     Evidemment. Nous vivons dans un grand vide émotionnel. Vu sa vulnérabilité et sa fragilité, le jeune Algérien saute immédiatement sur tout ce qui est nouveau qui lui offre un monde imaginaire et virtuel pour combler les carences de la réalité. Le vide réel nous pousse droit vers le virtuel.   - Comment expliquez-vous cette addiction rapide et intense au téléphone portable '
A travers une communication virtuelle, le téléphone permet de combler et de rassurer celui qui en  est addict. Il lui épargne de faire face aux exigences de la réalité. Nous sommes tous angoissés d'une manière ou d'une autre, et le téléphone est un objet qui permet d'atténuer ces peurs. Le besoin augmente notamment lorsqu'il s'agit d'anxiétés émotionnelles. Il nous évite un stress hyperactif dû au contact de l'autre.   - Donc, devient-on accrophone de plein gré '
Non, on le devient malgré soi. Les peurs qui nous habitent nous obligent à  l'être. Avec la myriade d'inventions qui naissent chaque jour, une panoplie d'addictions apparaîtra. Ce ne sont pas des inventions d'évolution mais d'évasion et d'isolement. On évitera de communiquer même lorsqu'il s'agit de nos besoins les plus rudimentaires, tels que faire les courses.   - Pensez-vous qu'un accrophone devrait faire appel à  une assistance médicale pour «décrocher» '
Du tout. On a tendance à  incriminer le téléphone dans cette situation d'addiction. Mais c'est faux. C'est l'évasion de la réalité à  travers cet objet qui est grave. Il faut juste redonner au téléphone sa vraie vocation de moyen de communication et avoir le courage d'assumer, d'affronter et de gérer nos angoisses dans la réalité.