Algérie

Le taux de change épinglé par le Hirak et la Covid-19



Le marché parallèle de la devise a été fortement impacté par le mouvement du Hirak. Les taux en déclin, le marché n'a pu enregistrer de reprise durant de longs mois. La Covid-19, invitée surprise ayant pris au dépourvu le monde entier, est venue plomber le taux, aussitôt le mouvement estompé. Une virée au square Port-Saïd a permis, hier dimanche, de déduire que, selon les cambistes, «tout est tributaire de la reprise du transport à l'international, aérien et maritime». C'est ce qu'a confirmé un économiste qui s'est converti en cambiste.Ahmed Kessi - Alger (Le Soir) - Hier 9h. A peine le tribunal de Sidi-M'hamed dépassé de quelques dizaines de mètres, les cambistes, une liasse de billets en dinars ou en devises entre les mains, généralement des euros ou des dollars, vous accostent et vous proposent une transaction à des taux variant de 200, 75 à 200, 90 DA l'euro pour l'achat et 200, 95 à 210,05 DA pour la vente.
C'est à peu près les mêmes taux qui ont prévalu ces derniers jours, en particulier depuis que le ministre de l'Industrie, Ferhat Aït Ali, a retiré la mesure relative à l'interdiction de l'importation de véhicules de moins de trois ans. L'unique indice d'une légère variation du taux, c'est la somme que vous échangez ou, surtout, qui vous est cédée. Un jeune, à peine la trentaine entamée, l'air décontracté, nous intercepte dès que nos regards se croisent. «Wach, t'bie wela techri khouya (Quoi, tu achètes ou tu vends, mon frère '» nous lance-t-il d'emblée.
Une modeste somme de 200 ou 300 euros à acheter seulement, lui rétorque-t-on. «T'kel ala Rebbi, nesteftah maâk, nehsebhalek 210 DA l'euro. (Je commence la journée avec vous, je vous les cède à 210 dinars l'euro)», tout en essayant de nous dissuader et nous convaincre et lui dire ok !
Un autre, quelques mètres plus loin, teint basané, une liasse de billets entre les mains, tapote en même temps sur la calculette de son téléphone. Que comptez-vous ' lui a-t-on lancé, avec un sourire : « Nehseb l'fayda. Baât b'21 (Je compte le bénéfice. Je viens de concrétiser une opération. J'ai échangé 600 euros à 210 dinars l'euro). Kach matechri kho, wela t'bie li. t'bie li be 200,80, ch'hal andek. (Vous achetez, ou vous me vendez.
Vous me vendez à 20,80%, vous en avez combien ').» Un peu plus loin, à l'angle donnant sur le jardin du square, un homme d'un certain âge, cheveux blancs, une paire de lunettes de vue bien ajustée, nous intercepte tout en comptant une liasse de billets : «Kach ma andek, be 200, 90 wela b'210, 05 ila techri ; illa Hadja K'bira nedekhlou l'boutika ou n'etsaâdou chouya t'eddi swardek bih bih ; (T'as sur toi ' 200,90 pour l'achat et 210,05 si vous achetez», dit-il d'un ton calme et serein. «Si t'as une grande somme à prendre ou à céder, on rentre dans la boutique et je te règle. Sur-le-champ, tu prendras ton argent», enchaîne-t-il, tout en appelant un jeune, visiblement son acolyte. Celui-ci, sautillant sur place pour se chauffer, nous dit : «200, 95 ou 210 nediw 50 DA fehadja klila ou 100 DA fehadja yasra ; 200,95 ou 210, c'est selon, on prend 50 DA ou 100 DA de bénéfice, selon l'importance de la somme», tout en essayant d'accrocher un client. Le dollar américain qui se monnaye rarement, selon les cambistes, est cédé à 170 DA et acheté à 170, 50 DA.
Le Hirak, d'abord,... puis la Covid-19
L'atmosphère induite par le mouvement populaire (le Hirak) a jugulé, de manière progressive et au fur et à mesure qu'il durait dans le temps, les taux de change au marché parallèle pour osciller entre 170 et 190 DA concernant l'euro, selon Farid, un économiste de formation qui s'est converti en cambiste. L'effet terrassant et qui a plombé, durant longtemps, les taux est celui de la Covid-19. Dès que la fermeture des frontières a été décrétée par les gouvernements des pays fortement touchés par la pandémie, le taux de change parallèle se rétrécissait telle une peau de chagrin. Interrogé sur le regain de souffle du taux de change de temps à autre durant une certaine période et sa quasi-stabilité ces derniers jours entre 20 DA, 80 et 210,05 DA pour l'euro, Farid nous dit : «Il n y a pas de maison, notamment en Kabylie, où vous ne trouverez pas de la devise. Les gens ont acheté déjà.»
Interrogé quant à l'effet d'un éventuel impact du reconfinement en Europe sur le taux de change, celui-ci écarte d'un revers de main la thèse. Pour lui, seul le besoin des nationaux fait monter l'aiguille du taux de change parallèle. Il prend, à titre d'exemple, la mesure prise par le ministère de l'Industrie concernant l'importation des véhicules de moins de trois ans.
«Cela, en effet, a fait bouger les taux durant quelque temps. Mais, dès que la mesure a été mise au placard par la tutelle, le taux de change a gardé une courbe plate pratiquement», a-t-il expliqué ajoutant que, même si la majorité des cambistes vous disent que «personne ne sait de quoi sera fait demain» ; ils ont pertinemment compris que «tout est suspendu au transport aérien et maritime et, quelque peu, aux mesures telles que celles permettant l'importation de voitures ou autre chose».
Un cambiste, au regard perspicace, visiblement avisé et prévoyant un éventuel regain de vigueur des taux, alors qu'il était sceptique au début, nous dira d'un ton ironique après un échange de quelques minutes : «Tout est en suspens. Mais on ne sait jamais, qui sait ' Mais je crois que les taux de change vont chuter les prochains jours.»
A. K.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)