Algérie

Le Targui



Résumé : Après une petite halte dans un café, les deux jeunes gens reprirent leur chemin et arrivèrent à la cité indiquée par le gardien. Ils sont vite orientés vers la maison de Halima. Cette dernière semblait les attendre.Une natte était étalée sur le sol de l'unique pièce qu'elle occupait, et qui contenait en tout et pour tout un matelas, une petite armoire, un fourneau, quelques ustensiles de cuisine et une petite table en bois sur laquelle trônaient une théière et quelques verres.
La vieille Halima vint servir le thé encore chaud et se remet au travail. On dirait que sa vie durant, elle n'avait fait que piler les mêmes herbes dans le même mortier.
- El-Hadja...
Toufik ne savait par quoi commencer.
La vieille s'arrête un moment et le regarde droit dans les yeux.
-El-Hadja Halima pour te servir, mon fils.
Toufik s'approche d'elle et lui chuchote à l'oreille :
-Je cherche mes origines. Je cherche mon père.
-Je sais, mon garçon, lui réplique-t-elle sans paraître surprise le moins du monde.
-Ah oui ! Mais comment le saurais-tu ' Quelqu'un m'a-t-il devancé pour te raconter mon histoire '
La vieille femme eut alors un rire ironique.
-Non, mon fils. Personne n'est venu me raconter quoi que ce soit, mais comme le bon Dieu m'a doté de certains pouvoirs, je n'ai aucun mal à deviner les états d'âme de tous ceux qui me rendent visite. Ne serais-tu pas par hasard le fils de Amar '
-Tu le connais ', s'écrie Toufik
-Et comment ! J'ai même assisté à sa naissance, et j'ai été la première à le prendre dans mes bras.
Le souffle coupé, le jeune homme ouvre les yeux tout grands.
-Ça alors !
-Et je connais encore plein d'autres choses sur lui. Des choses que tu aimerais sans doute savoir.
De plus en plus intrigué, Toufik sentit des bouffées de chaleur remonter le long de son corps.
Il farfouille nerveusement dans la poche arrière de son jean et sort son portefeuille, duquel il retire la photo de son père et quelques billets de banque qu'il tend à la vieille dame. Celle-ci les repousse gentiment.
-Non, pas d'argent, mon fils. Je n'accepte que quelques denrées alimentaires ou du savon. Et puis, cela peut bien attendre. Je vais tout d'abord satisfaire ta curiosité.
Un silence de mort régnait dans la pièce. Toufik retint sa respiration.
La vieille continue de piler ses herbes d'un geste mécanique.
Elle tousse deux fois, s'essuie les lèvres du revers de la main, puis commence à narrer.
-Il y a plus de 60 ans, vivait dans notre village une grande famille. Une famille de nobles.
Les hommes étaient de grands chasseurs, et les femmes belles à vous couper le souffle.
Ils étaient des Touareg venus du fin fond des temps et du désert. Ils cherchaient un endroit clément et moins chaud pour s'implanter.
Quelques femmes que j'ai eu l'occasion de côtoyer à cette époque m'avaient raconté qu'elles avaient fui une vallée aride et asséchée où aucune herbe ne pouvait pousser. Ces gens-là avaient beaucoup de délicatesse dans leurs gestes.
Ils avaient du savoir-vivre, et leur noblesse se devinait aisément. Riches et généreux, ils se firent facilement aimer et adopter par les gens de notre ville.
À chaque fête, à chaque Maoussem, cette famille avait son mot à dire et sa part à donner.
Elle s'était bien imposée dans la région, et le respect qui lui était dû avait dépassé les frontières. .

(À SUIVRE)
Y. H.
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