Algérie

Le tact de Yazid Zerhouni



Yazid Zerhouni est efficace. Avec les élections qu'il aura organisées et les lois qu'il présentera au Parlement, nul doute qu'il sera l'homme de l'année 2007. Yazid Zerhouni est un homme aussi conciliant que galant. A peine Ahmed Ouyahia avait-il, au lendemain des élections législatives, émis l'idée qu'il fallait changer la loi électorale, que le ministre de l'Intérieur se mettait au travail pour préparer un nouveau texte qui sera prêt avant les élections locales de l'automne. Et quand Boudjerra Soltani a demandé d'introduire de nouvelles règles, qui permettraient de donner aux assemblées un peu de tenue, Yazid Zerhouni a obtempéré. Il a aussitôt commencé à plancher sur les nouvelles restrictions devant permettre aux « grands partis » de ne pas être dérangés de gouverner en rond.  Dès lors, le ministre de l'Intérieur ne pouvait rester de marbre face aux doléances de Mme Louisa Hanoune. Là encore, il a fait preuve de la sollicitude nécessaire, quand la porte-parole du Parti des Travailleurs a demandé le report des élections locales, pour éviter aux hommes politiques de battre le pavé en plein mois de Ramadhan. Aussitôt la requête formulée, Yazid Zerhouni a décidé de reporter les élections, pour les fixer fin novembre. Tout ceci a été préparé, décidé, ficelé, et programmé avant même que la nouvelle Assemblée Nationale n'ait adopté le programme du gouvernement. Difficile donc de faire preuve d'autant d'esprit d'initiative et de diligence dans la gestion des affaires de l'Etat.  Mais cette serviabilité dont a fait preuve le ministre de l'Intérieur a son revers. Elle risque en effet de lui causer un surplus de travail, voire de l'encombrer sérieusement dans les prochaines semaines. Car, en face, les demandes pleuvent de la part de partenaires qui n'hésitent pas à abuser de la bienveillance de M. Zerhouni. D'ores et déjà, il doit subir une véritable avalanche de propositions concernant la nouvelle loi électorale, et il doit s'attendre à de nouvelles propositions lorsqu'il faudra débattre de la loi devant le Parlement.  On sait d'ores et déjà que Louisa Hanoune s'apprête à participer activement à l'amendement de la loi. Elle n'aime pas ces candidats indépendants qui polluent les élections, ni leurs migrations honteuses destinés uniquement à accéder au Parlement. On sait également que Boudjerra Soltani veut se débarrasser des « sanafirs », ces partis insignifiants qui, comme les mouches, pullulent au moment des élections avant de disparaître pour de longues années.  Il faut aussi reconnaître à Boudjerra Soltani son esprit d'imagination. Il a proposé une série de formules pour donner un certain cachet aux élections. Pour participer à des élections, les partis doivent avoir obtenu cinq pour cent lors du scrutin précédent, a-t-il dit. Quant aux nouveaux partis, ils doivent réunir des signatures représentant cinq pour cent des électeurs. Cela ne fera que 75.000 signatures pour Alger, lors des prochaines législatives, moins que ce qui est requis pour un candidat aux présidentielles. Mais cela permettra au chef du MSP de représenter ses candidats face à ceux de l'alliance présidentielle, et éviter ainsi d'affronter les va-nu-pieds et les partis « parasites », selon sa formule.  Ces propositions vont épargner au pays de mener d'inutiles palabres sur les causes profondes qui ont poussé les Algériens à bouder les urnes le 17 mai. Après tout, le vote est un acte de liberté. L'abstention aussi. Chaque Algérien est libre de choisir son candidat, ou de ne pas choisir. En démocrate, Boudjerra Soltani est disposé à respecter cette liberté, même si, pour y arriver, il doit obliger le ministre de l'Intérieur à un surplus de travail.  D'autant plus que l'année 2007 risque décidément d'être celle de Yazid Zerhouni. En effet, l'homme a déjà organisé les législatives, et s'apprête à organiser les locales. Dans l'intervalle, il aura préparé une nouvelle loi électorale, et promet de nouveaux codes communal et de wilaya. Car là encore, le ministre de l'Intérieur a relevé de nombreuses lacunes. Selon les comptes rendus de presse relatifs au programme du gouvernement, le ministre de l'Intérieur compte renforcer le pouvoir des walis et des chefs de daïra. Au détriment, bien sûr, des élus. Mais de toutes les façons, les élus posent problème au niveau local. Ils ne sont ni crédibles, ni compétents. Autant les contrôler davantage et leur enlever le pouvoir qu'ils n'ont pas. Quitte à ce que ce soit l'administration de M. Zerhouni qui se trouvera, une fois de plus, dans l'obligation d'assumer ce nouveau fardeau.  Décidément, Yazid Zerhouni est partout, disponible, diligent, efficace. Avec un tact exceptionnel, il réussit souvent à prévoir les souhaits de nombre de chefs de partis, et se prépare en conséquence, avant même que les autres n'en formulent la demande. Cette efficacité exceptionnelle ne fait pas que des heureux. D'où certains commentaires hargneux de quelques opposants, qui ont émis l'idée farfelue selon laquelle lorsque Yazid Zerhouni décide d'engager une action, les partis du pouvoir et de l'opposition se chargent de préparer l'opinion en ce sens.  Mais qui oserait croire de telles absurdités ?




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