Algérie

Le tabou qui l'entoure ne l'empêche pas de proliférer



Le tabou qui l'entoure ne l'empêche pas de proliférer
Ethique - Les médecins en Algérie considèrent l'avortement comme un acte non professionnel, immoral et contraire à la déontologie médicale.
Mais certains médecins et charlatans pratiquent l'interruption volontaire de la grossesse, car ils y voient une source de profit facile et rapide. C'est ce que nous avons pu constater dans une clinique de maladies gynécologiques située dans la banlieue de Boumerdès. Une clinique qui continue de défrayer la chronique, malgré le fait d'avoir été «épinglée» durant les années 90 par les services de la Direction départementale de la santé (DDS) pour une autre affaire de déontologie qui n'a rien à voir avec les avortements, mais pour défaut d'agrément.
C'est au téléphone que nous prenons rendez-vous avec la préposée à la réception. Notre source, une jeune dame se charge du contact. «Je voudrais connaître les conditions pour faire avorter ma fille qui est à son deuxième mois de grossesse illégitime», explique celle qui va être notre guide durant toute notre enquête au niveau de cette wilaya. «Ce n'est pas une spécialité de la maison, mais passez quand même, nous allons discuter et voir ce que nous pouvons faire en conformité avec la loi et la déontologie», lui répond son interlocutrice. Un message à peine codé.
Il ne fallait pas rater une telle aubaine, c'est dans l'après-midi de la même journée qu'en compagnie de notre guide nous nous présentons au niveau de cette clinique.
Nous nous faisons passer pour le père et la mère de la pseudo-fille qui devrait subir un avortement.
L'atmosphère à l'intérieur de la salle d'attente réservée uniquement aux patientes en «détresse» est angoissante, surtout lorsqu'on examine attentivement les vieux meubles, le carrelage usé, en plus de l'exiguïté de la salle qui ne peut contenir que six chaises collées au mur et une table sur laquelle ont été jetés de vieilles revues médicales et de vieux journaux. Deux jeunes personnes sont déjà là. L'une d'elles, Khalida, est anxieuse et a l'air triste.
La peur et la honte se lisent sur son visage. L'autre, une jeune dame qui l'accompagne.
Pour ne pas attirer l'attention de l'infirmière de service, nous abordons secrètement la «patiente», une jeune universitaire âgée de 20 ans, célibataire et enceinte. Khalida est venue se faire avorter pour 30 000 DA. Elle tente au début de cacher sa peur et sa honte, puis, mise en confiance par notre guide qui lui parle de l'objet de notre présence en ce lieu et après quelques mots échangés, elle se relaxe un peu pour nous raconter son histoire dramatique qui a commencé par une relation «innocente» avec son ami avant de se terminer par une grossesse illégitime.
«C'est un fonctionnaire puissant, contre lequel je ne peux rien, qui se trouve être le père de l'enfant que je porte. Certes, c'est lui qui prend en charge les frais de l'avortement, mais moi je me trouve dans une situation embarrassante. Une fois sortie de ce marasme, je ne sais quoi faire», dit-elle timidement. «C'est une de ses connaissances qui a fait les démarches auprès de cette clinique pour un avortement», ajoute notre interlocutrice.
A cet instant, entre l'infirmière dont la tenue ne diffère pas beaucoup de celle de la femme de ménage. Elle parle ouvertement avec Khalida, prend sa carte de groupage et l'échographie. Après un court instant, la femme médecin apparaît. Jette un léger regard sur nous, nous demande ensuite de patienter «le temps de terminer une visite».




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