Algérie

«Le système ne nous fera jamais reculer»



  Bordj Bou Arréridj.
De notre envoyé spécial

Un vent glacial souffle sur la ville de Bordj Bou Arréridj, soulevant des nuages de poussière. Loin des rues cahoteuses des quartiers populaires, les artères larges et spacieuses du centre-ville mènent toutes vers le siège de la wilaya. Les Bordjiens ne passent pas près du bâtiment à  l'architecture imposante, sans se rappeler le drame du 27 février dernier, où le jeune Lachehab Abderrazak, âgé de 25 ans, originaire de Medjana, a décidé de se donner la mort en s'immolant par le feu, un mois jour pour jour après celui survenu à  Medjana, à  12 km de Bordj Bou Arréridj. Abdelhafid Boudechicha, 26 ans, brûlait vif en criant : «Kraht, Kraht» (J'en ai marre, J'en ai marre !), sous les yeux d'une foule choquée et bouleversée.
En l'espace de deux mois, la ville de Bordj Bou Arréridj, pourtant connue pour àªtre une cité paisible, a fait l'actualité. Un peu partout, on ne parle que de ces actes d'immolation par le feu commis par des jeunes à  bout de désespoir. Dans une ville qui a connu quatre autres tentatives de suicide par immolation, le marasme des jeunes a atteint son pic. «La wilaya semble payer les frais du boom économique qu'elle a connu durant les deux dernières décennies avec l'émergence d'un pôle en industrie électronique, mais il s'avère que les choses ne vont pas durer avec la saturation du marché», a déclaré un observateur averti.
Avec cette crise, la contestation populaire, qui remonte à  plusieurs années, n'a fait que s'amplifier. «C'est honteux pour le pouvoir de vouloir ramener les problèmes des jeunes à  un sachet de sucre et un bidon d'huile, l'Etat doit avoir une vision lointaine des choses», affirme Azzedine Boutabba, responsable régional du RCD à  Bordj Bou Arréridj, en rappelant les violentes émeutes de janvier dernier. «Le soulèvement que nous sommes en train de vivre n'est que l'aboutissement d'une situation devenue intolérable pour des citoyens qui veulent vivre dignement», dira-t-il.
C'est dans ces circonstances qu'est né à  Bordj Bou Arréridj le mouvement des jeunes pour le changement, au lendemain de la marche du 22 janvier dernier. «L'initiative lancée par 23 membres fondateurs a regroupé de jeunes militants du mouvement citoyen, des étudiants et des lycées autour des idéaux de justice sociale et politique», a annoncé Azzedine Boutabba. Pour ce dernier, le marasme qui perdure à  Bordj Bou Arréridj n'est qu'une facette de ce qui se passe à  l'échelle nationale où le pouvoir ne cesse de recourir aux calmants pour apaiser les esprits survoltés. «Des mesures à  l'instar des dispositifs d'emploi de jeunes qu'on ne cesse d'injecter aux gens pour les tuer à  petites doses. A ce rythme, le pouvoir nous mènera tout droit vers la débandade, et on craint fort que ne survienne quelque chose de plus que ce qui se passe en Libye et au Yémen, à  ce moment-là, il sera trop tard de vouloir rattraper les choses», dira-t-il. Le mouvement des jeunes pour le changement semble déjà avoir tracé sa voie.
«Nous avons opté pour les solutions pacifiques et nous continuons à  exprimer notre opinion quoi qu'il arrive, en dépit de toutes les intimidations et autres pratiques d'un autre âge, car nous avons choisi de militer pour un avenir meilleur pour l'Algérie des futures générations, et le système ne nous fera jamais reculer», a conclu Azzedine Boutabba.              
 


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