Algérie

«Le Sud a des spécificités, pas de problèmes spécifiques» Révolte des jeunes chômeurs du Sud et mauvaises réponses des autorités



«Le Sud a des spécificités, pas de problèmes spécifiques» Révolte des jeunes chômeurs du Sud et mauvaises réponses des autorités
Il n'y a pas un problème du Sud, mais un problème de l'Algérie» et «le Sud a des spécificités et pas de problèmes spécifiques».
Ce sont là les convictions de Maâmar Benguerba, ancien ministre du Travail sous Belaïd Abdesselam et ancien directeur de cabinet de l'ex-chef de gouvernement, Ahmed Benbitour. Invité de la rédaction d'El Watan, le samedi 23 mars, ce spécialiste ès qualités du Sud et auteur du livre Algérie en péril, publié en 2006 et interdit de vente en Algérie, met d'emblée le doigt sur le mal qui continue de ronger le pays et qui risque de remettre en cause même son unité et sa cohésion sociale. Il s'agit, selon lui, «de la crise de gouvernance» qui est l'un des péchés capitaux du système du pouvoir algérien. Ayant exposé, dans de nombreux écrits publiés dans la presse nationale, l'éternelle problématique du Sud, Maâmar Benguerba se dit «pas du tout étonné» par la résurgence, ces dernières semaines, de la révolte des jeunes dans cette immense partie du pays.
Et la réaction des autorités face à cette révolte témoigne, selon lui, de la méconnaissance totale du terrain et de la «légèreté» des solutions proposées. «Si les gens du Nord vont travailler au Sud, c'est qu'il y a un problème de chômage dans le Nord. Les gens ne sont pas masochistes pour aller chercher quelque chose dans le Sud qu'ils peuvent trouver chez eux. Le chômage est une réalité nationale», lance-t-il. Se référant aux situations antérieures et aux révoltes enregistrées dans plusieurs wilayas du Sud en 2004 et 2005, notre interlocuteur déplore une gestion «au jour le jour des affaires du pays». Il souligne, dans ce sens, «l'inexistence d'une vision politique». La méthode du système du pouvoir, basée sur le recrutement des élites dociles et des notabilités maison, est dépassée par les événements. «Les responsables algériens pèchent par leur méconnaissance totale de l'histoire du Sud», indique-t-il.
«Il y a un risque de fractionnement du Sud»
Pour Maâmar Benguerba, les mesures annoncées en faveur des populations du Sud restent insuffisantes et superficielles. Car, ajoute-t-il, le vrai problème en Algérie réside dans «l'absence de la mobilisation des populations et le manque d'ambition». Il ne se contente pas de critiquer. Il propose des mesures d'urgence pour remédier à la situation. Incluses dans son livre Algérie en péril, ces mesures, assure-t-il, sont toujours d'actualité. «Un plan d'urgence, démocratiquement discuté et approuvé par l'ensemble des Assemblées populaires communales et de wilaya de la région, devrait être confectionné. Pour répondre aux besoins, des mesures immédiates et des actions, à moyen et long termes, devraient être engagées et combinées.
Elles concerneraient au moins quatre volets», soutient-il, avant de présenter ses suggestions. Maâmar Benguerba suggère d'abord la mise en place d'un programme de formation de la ressource humaine, la révision en profondeur des programmes de formation dans le Sud, la mise en 'uvre de décisions économiques et sociales qui tranchent avec les «mesurettes» habituelles et, enfin, le lancement des actions parallèles en vue du développement des activités en dehors du secteur des hydrocarbures. «Il faut arrêter de créer des villes. Il faut créer des activités», déclare-t-il, qualifiant les déclarations des différents responsables du gouvernement sur la création de nouvelles agglomérations dans le Sud de «bêtise à ne pas commettre». «On a déjà eu l'expérience des villages agricoles. Où sont-ils aujourd'hui '», s'interroge-t-il. Ce faisant, Maâmar Benguerba attire l'attention sur un risque majeur qui menace de fractionner le sud du pays. Appelant à 'uvrer pour mettre les populations en confiance dans cette région, il met en garde contre l'insécurité.
«Si demain l'insécurité s'installe dans le Sud, le pays est foutu. Mais la situation la plus grave est qu'on ait un éclatement du Sud. On risque d'aller vers ce scénario. Pas d'une manière volontaire, mais sûrement le scénario sera provoqué», met-il en garde, invitant à une prise de conscience et à la défense de l'intérêt national. Et là aussi, Maâmar Benguerba ose poser l'un des débats, le moins souhaité par le système : l'autonomie régionale. C'est, selon lui, l'unique moyen qui permettrait de promouvoir la démocratie et de combattre l'exclusion dont se plaignent à la fois les gens du Sud et ceux du Nord. «L'autonomie des régions devrait s'articuler autour d'une répartition démocratique et équitable des responsabilités politiques régionales et d'une gestion efficace de toutes les richesses nationales. En somme, par la capitulation pure et simple du système de pouvoir qui régit le pays. Lui n'a rien à y gagner, mais le pays pourrait retrouver les leviers d'un nouvel élan sur des bases rénovées et au diapason du monde d'aujourd'hui», explique-t-il.


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