Au-delà des chiffres parlants, c'est le silence assourdissant des personnes vivant avec le VIH en Algérie qui tisse sa toile de drames, particulièrement ces deux dernières années vécues à l'ombre de la Covid.Cette pandémie a d'ailleurs exacerbé la précarité des personnes atteintes du VIH (PVIH) qui n'ont pas échappé aux conséquences économiques dramatiques des différents confinements décidés par les autorités sanitaires nationales.
Ces derniers ont précipité les ménages les plus vulnérables dans la misère la plus totale, ce qui fait dire à Ahlem Azzi, présidente de l'association Rêve de vivre positive (ARV+), qui prend en charge les sidéens, que "la Covid les a anéantis".
Pour elle, ces personnes, déjà en situation de vulnérabilité sociale et financière, ne font actuellement que survivre. Toutefois, elle estime que cette détresse n'est pas seulement économique ; elle est aggravée par les "fausses idées reçues" qui font toujours croire que cette maladie ne touche que les personnes en situation d'exclusion.
Pour Ahlem Azzi, l'actualité des personnes atteintes du VIH (PVIH) n'est pas uniquement l'affaire de la célébration d'une journée mondiale, "elle doit être évoquée tous les jours sachant qu'elle est devenue une maladie chronique pour peu qu'elle soit prise à temps".
Ces fausses vérités ont empêché les gens de se faire dépister alors que les PVIH sous traitement qui ont des charges virales indétectables ne transmettent plus le virus, affirme-t-elle.
Cette stigmatisation ainsi que la crainte d'une exclusion sociale empêchent les porteurs du VIH de se faire soigner dans les hôpitaux proches de chez eux, préférant parcourir plus de 500 km pour récupérer leurs indispensables traitements quand ils sont disponibles.
Pourtant, nombre d'entre eux ne peuvent même pas se déplacer jusqu'à Oran à cause des difficultés financières qu'ils traversent, interrompant ainsi leurs traitements. Mme Azzi parle alors de "perdus de vue", de "décès", prenant en exemple le cas de cette femme à Saïda qui a perdu ses deux filles après avoir arrêté leurs traitements pendant neuf mois parce qu'elles ne pouvaient plus se déplacer jusqu'à Oran.
Pourtant, ce problème n'existait pas pendant la crise sanitaire puisque c'est l'association qui assurait le transport des traitements jusqu'aux malades, sur dérogation de la DSP, mais après la réouverture des routes, les choses ont repris leur cours.
L'autre difficulté pour le PVIH réside dans la vaccination contre la Covid étant donné que certaines d'entre elles doivent effectuer des tests périodiques de charge virale, un bilan sanguin qui mesure la quantité de VIH dans le sang pour les séropositifs.
À ce propos, notre interlocutrice affirme qu'"il est disponible dans le secteur privé, mais il coûte cher, 15 000 DA, ce qui exclut beaucoup de PVIH dans l'incapacité de payer''. Des drames personnels qui endeuillent les politiques de prise en charge de ces PVIH, qui ont montré toutes leurs limites logistiques lors de cette pandémie.
Par ailleurs, il est à signaler la rupture de stock de certaines molécules antirétrovirales essentielles dans le traitement contre le sida, comme le Raltegravir (qui dure depuis deux mois), ainsi que le Prizista, l'Efavir, le Kivixa ou encore l'Abacavir qui sont indisponibles depuis deux semaines, précise la présidente d'ARV+.
Pour le professeur Abdelaziz Tadjeddine, président de l'Association nationale de protection contre le sida (APCS Algérie), la situation des PVIH a beaucoup changé depuis l'apparition de la Covid : "Il existait une certaine résilience, mais comme la pandémie dure depuis longtemps, les problèmes de santé et les risques sont devenus plus importants parmi les populations les plus exposées, notamment les femmes travailleuses du sexe et les usagers de drogues."
SAïD OUSSAD
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Posté Le : 05/12/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Said OUSSAD
Source : www.liberte-algerie.com