Algérie

Le savoir consommer



C'est la ruée dans les grandes villes du pays! A une journée du Ramadhan, des files interminables se constituent devant les magasins et les étals de marchés. Les bousculades aux portes des boucheries rappellent le triste souvenir de la grande pénurie des années 1980. Non, ce n'est pas la récession. Il ne s'agit même pas d'une rupture de stocks. Le marché est, au contraire, bien achalandé. Les viandes fraîches et les produits agricoles, généralement très demandés à l'occasion, sont disponibles en quantités suffisantes. Seulement, tous les citadins ont eu spontanément cette folle envie d'accaparer le maximum de denrées alimentaires.«C'est comme si une guerre imminente se préparait à nos frontières», entend-t-on dire pour qualifier cette frénésie qui déchaîne des spéculateurs aux aguets. Conséquence directe : la mercuriale des prix s'est instantanément enflammée. Les fruits et légumes ont connu immédiatement un net enrichissement. La hausse relative des viandes s'est aggravée. Le budget alimentaire des ménages, déjà suffisamment plombé, s'est alourdi, selon les premières estimations, d'environs 50% en moins de 48 heures. Le sinistre spectacle, de gens qui transforment leurs appartements en halles, suscitent la méfiance, et poussent le reste des citoyens à faire de même. Sait-on, jamais ! C'est donc la guerre «urbaine»! Urbaine, puisque les petites bourgades de l'arrière-pays n'ont pas connu un tel rush. Les prix n'y ont pas connu, non plus, de hausses singulières. En tout cas, pas dans les mêmes proportions. C'est un phénomène qui affecte essentiellement les grandes villes. Les services de la répression des fraudes (direction du commerce et celle des impôts) sont mis en alerte rouge. Des patrouilles de contrôleurs sillonnent les grandes surfaces et les échoppes de détaillants. Les brigades économiques de la Gendarmerie nationale leurs viennent en appui pour débusquer «les vils haussiers» qui ont mis le feu aux poudres. L'inflation est à son comble. En réalité, le comportement anarchique du consommateur en est la cause essentielle. Il est vrai qu'on peut éternellement gloser sur les tricheries des barons de l'import import, les man'uvres des mandataires du commerce de gros et l'opportunisme légendaire des détaillants, mais la part de responsabilité du consommateur est plus grande dans ce type d'arnaque. L'Algérien a cette fâcheuse habitude à engranger le maximum de nourriture en prévision des fêtes et des grandes occasions. Cette attitude anachronique déstabilise sérieusement l'équilibre entre l'offre et la demande, et encourage conjoncturellement la hausse des prix. «Le consommateur doit se contrôler dans ses achats, éviter le gaspillage, acheter au jour le jour et selon ses moyens», exhorte le président de la Fédération algérienne des consommateurs (FAC). Sera-t-il écouté ' Les pouvoirs publics, c'est leur mission, doivent veiller constamment sur la régulation du marché. L'Etat doit prévenir ces déséquilibres et intervenir à chaque fois pour protéger le consommateur en cas de déficit, mais aussi pour tirer d'affaire le producteur au moment de surabondance. La mise en place de ces outils de pondération prend naturellement du temps et exige, souvent, des démarches coûteuses. La culture de consommation, qui s'articule essentiellement sur l'attitude saine du consommateur, constitue le meilleur atout pour la consolidation du marché. Sur le long terme, l'appel du président de la FAC constitue le meilleur remède. On ne peut parler de marché sans le savoir consommer, comme on ne peut discuter de démocratie sans préalable culturel. Au bout du compte, et en toute chose, c'est l'instruction et le savoir qui font partout la différence !
K. A.


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