Publié le 13.11.2023 dans le Quotidien Le Soir d’Algérie
Par Mourad Benachenhou
«Il n’y a pas de ligne rouge pour Israël.»
(Communiqué de la Maison-Blanche)
Il faut, de manière claire, prendre position contre la décision unanime des «maîtres de ce monde» et de leurs porte-voix de présenter l’agression barbare, rappelant la destruction de Baghdad par les hordes mongoles en janvier 1258, menée contre le peuple palestinien à Ghaza comme une guerre entre l’entité sioniste et un «groupe terroriste».
La «communauté internationale» adopte deux positions contradictoires impossibles à concilier
Il faut souligner que la communauté internationale reconnaît que cette enclave est un «territoire occupé» légitimant donc et justifiant tout acte de riposte, sous quelque dénomination que ce soit, et par quelque groupe que ce soit, contre l’occupant ennemi tant à l’intérieur de ce territoire que sur le territoire d’où vient cet occupant.
Donc qualifier Hamas de groupe terroriste contredit le statut juridique international du territoire de cette enclave, qualifiée pourtant d’occupée par Israël, statut reconnu par tous les États membres de l’ONU et ayant le privilège de siéger en permanence au Conseil de sécurité.
le droit de résister, même par l’emploi de la violence extrême, contre l’occupant ennemi : un droit naturel imprescriptible à travers les sociétés et l’Histoire
Le droit de résister à l’occupant, qu’il soit juif ou autre, quelle que soit l’idéologie dont il se prévaut, et quel que soit le déséquilibre dans les forces en présence, est, dans l’adversité, un droit naturel, sacré, preuve de courage et d’héroïsme, reconnu, applaudi et admiré à travers l’histoire humaine. Ce droit naturel n’a même pas besoin d’être inscrit dans les textes internationaux pour être qualifié, non seulement de légitime, mais également de légal.
La qualification de «terroriste» collée à Hamas est une prise de position politique sans nuances en faveur de l’agresseur, non une qualification fondée sur des critères internationalement acceptés. Elle vient donc de parties qui ont déjà choisi leur camp, et ne peuvent, donc, se prévaloir de l’objectivité indispensable pour juger ou condamner des actes ressortissant visiblement du droit sacré à la résistance que possèdent les peuples agressés face à leur occupant, compte non tenu des spécificités et des motivations de cet occupant. Dans toutes les cultures, tous les systèmes politiques, et toutes les religions, l’acte de résistance à l’ennemi est un devoir absolu et un acte de haute moralité, au-dessus de toute condamnation quelle qu’en soit la nature. De même, le traître, qui prend position pour l’occupant ennemi, est honni, méprisé et sanctionné sans réserve, ni pardon.
les croyances religieuses de l’occupant ne lui donnent pas plus de privilèges à jouir en paix de son occupation, que l’occupant «laïc»
On ne va tout de même pas faire semblant de croire que l’occupant, parce qu’il est juif, a droit au privilège d’occuper une terre illégitimement, et illégalement, contre l’avis et l’opposition de la population originelle, et, en même temps, de vouloir jouir «pacifiquement» de l’oppression barbare qu’il impose aux populations occupées.
La faute des attaques menées contre lui lui incombe totalement, et sans réserve. C’est lui qui les a provoquées par son occupation. Le peuple occupé ne fait que réagir à cette occupation et sa violence est en réponse à la violence de l’occupant. Si ce dernier veut jouir de la paix, il a toujours le loisir de s’installer loin des lieux où il n’est pas le bienvenu, car il s’y est installé par la force armée.
Qui oserait mettre sur un pied d’égalité la violence barbare de l’occupant nazi et la violence tout aussi barbare du résistant, pourtant qualifié de «terroriste» par ces mêmes occupants ? Peut-on dans la même phrase condamner de Gaulle et le Maréchal Pétain pour les actes de violence que l’un et l’autre ont ordonnés contre respectivement les partisans de l’un ou de l’autre ? Ou on est pour la résistance et on soutient de Gaulle, quelque qualificatif qu’on lui colle et quelque qualification qu’on donne à la violence de ses partisans. Ou on est pour le traître à la patrie française, qui a aidé les Nazis dans leur entreprise génocidaire.
Une prise de position «symétrique» et «équilibrée» est impossible. Donc, ceux qui, dans la même phrase ou la même déclaration, justifient la violence juive et condamnent la contre-violence palestinienne provoquée par cette violence prennent position pour la continuation du génocide du peuple palestinien, perpétré par des Juifs, au nom de leurs croyances religieuses, et non pour la justice ou la paix.
Daech ou le terrorisme islamiste «par procuration»
Quant à la comparaison entre Daech et Hamas, elle ne tient pas la route. Daech est la conséquence directe de l’effondrement des deux seuls États «laïcs» du Moyen-Orient, effondrement dont le monde entier connaît les responsables. Nul ne contestera que cette organisation est un groupe «nihiliste» ayant pris le déguisement islamique pour justifier ses objectifs criminels de désordre et de destruction.
Nul ne peut contester également que Daech est une organisation terroriste, mais il est indispensable de rappeler que sa naissance est la conséquence directe, et sans doute, recherchée, d’une politique délibérée de déstabilisation, par des puissances extérieures, de deux États dont les politiques étaient contraires aux desseins régionaux de ces puissances extérieures.
Daech a, a posteriori, justifié ces interventions étrangères ! Sa constitution et son extension font-elles partie d’un projet établi et murement réfléchi, abondamment financé et armé, fortement organisé, de maintien du désordre et de la guerre dans cette région, projet qui n’a rien à voir avec l’Islam, ni même avec la défense légitime contre le «terrorisme islamiste» dont seraient menacées les «démocraties avancées» ?
Étrange, tout de même, que là où ces puissances extérieures interviennent directement, ce genre de mouvement terroriste prospère, survit, et persiste !
S’il y a une théorie du complot qui tient, c’est bien cette brusque apparition d’un mouvement terroriste surarmé, qui a réussi à conquérir, en quelques mois, toute une partie des territoires irakien et syrien !
On saura bien un jour qui était, et continue à être, derrière cette organisation qui, en peu de temps, a réussi à se doter d’une puissance de feu capable de mettre en danger trois armées régulières, dont celle d’une superpuissance !
Évoquer donc Daech dans cette guerre actuelle entre résistants et occupants ressortit de la même volonté d’aller jusqu’à l’extrême des prises de position en faveur de l’entité sioniste génocidaire, et de sauter sur tous les prétextes pour justifier et maintenir, parfois même en violation du droit international, — et donner une couverture de légitimité et de légalité — à la présence des unités armées régulières provenant des États extérieurs à la région, et sans autorisation des États où elles se sont installées.
une journée de «barbarie» si sanglante, elle ne pèse pas lourd face à un siècle de barbarie continue !
De plus, qu’est-ce qu’une journée de barbarie imputée à une organisation de résistance armée légitime face à cent quatorze ans de barbarie coloniale sioniste, barbarie qui se manifeste maintenant, et en direct, à travers le lâche massacre d’une population déjà soumise à un siège de 18 années de la part de ses occupants ¬— «en télécommande, confortablement assis et à l’abri de tous les périls de la guerre» à partir des cockpits des avions de chasse, des cabines de commandement de navires de guerre, ou de positions d’artillerie éloignées de dizaines de kilomètres des points d’impact des bombes ? Il faut aller jusqu’au bout de cette impitoyable comptabilité morbide de la cruauté des uns et des autres ! Le bilan «positif» de cette comptabilité ne sera certainement pas au profit des sionistes.
Le fait même de vouloir réduire les voix dissidentes qui contestent la «version officielle et médiatique» des évènements actuels jette des doutes sur cette version ; si ceux qui donnent de la voix contre le peuple palestinien et sa volonté de ne pas se laisser massacrer et de ne pas légitimer son massacre par la passivité face à son occupant sont si sûrs de détenir la vérité, pourquoi donc ne laissent-ils pas de chance à la version palestinienne d’être présentée ?
Même 300 otages pèsent peu face à 6 millions de prisonniers palestiniens à ciel ouvert, et plus de 11 000 captifs détenus, sans jugement, dans les geôles sionistes !
Les dirigeants des «démocraties avancées» sont parfaitement au parfum et en détail des desseins et des crimes du sionisme
Les dirigeants des «démocraties avancées» tout comme leurs médias sont au courant du moindre détail des crimes contre l’humanité, qui ressortissent directement de la qualification de génocidaire attribuée systématiquement à l’idéologie sioniste imposée par la violence armée au peuple palestinien innocent.
Quand on est dans le vrai, on n’a aucune raison de ne pas laisser les avis contraires présentés, et les contestataires manifester en toute liberté.
Si donc on utilise la répression pour taire ces voix dissidentes, c’est qu’on est dans la propagande, et qu’on reconnaît implicitement la légitimité de la version de ces dissidents, mais qu’on craint que les mensonges dans lesquels on s’est engagé vont finir par apparaître au grand jour.
Traiter tous ceux qui reconnaissent la légitimité du combat du peuple palestinien «d’antisémites» n’est pas non plus un argument rationnel innocentant les occupants juifs, et justifiant la censure totale étouffant la présentation complète et juste des enjeux dans ce conflit, savamment entretenu depuis plus d’un siècle, et pour lequel on refuse toute solution politique, autre que la reconnaissance du droit de la colonie de peuplement d’Israël à éliminer physiquement de la terre de Palestine tout autre peuple que les Juifs. Faudrait-il aller jusqu’à refuser tout lien entre sionisme et judaïsme pour conforter l’opinion publique internationale dans l’idée qu’être antisioniste est automatiquement être antisémite ?
Commettre des crimes au nom du judaïsme est aussi criminel que commettre des crimes au nom du racisme nazi ou de l’islamisme de Daech, cette création monstrueuse «par procuration».
Une ignorance feinte et délibérée
Ces dirigeants, comme tous les journalistes qui activent dans la presse écrite, orale et audiovisuelle, n’ont pas besoin de «déchirer le voile de l’ignorance» qui, selon le philosophe américain John Rawls (1921-2002), permettrait d’accéder à la justice authentique et pure. Ils savent parfaitement ce qui se passe en Palestine occupée !
Leur ignorance est à la fois feinte et délibérée :
- feinte, car il est difficile de croire que les ambassades et consulats de ces pays en fonction sur le territoire de la colonie de peuplement d’Israël, tout comme les représentants des principaux organes de presse et médias lourds qui couvrent cette entité coloniale, sont aveugles et ne voient pas les myriades d’exactions commises seconde par seconde, minute par minute, heure par heure, vingt-quatre heures par jour, et chaque jour de l’année contre le peuple palestinien par les forces de sécurité sionistes.
Ces femmes et hommes, chargés de fonctions officielles étatiques ou ayant pour profession la collecte et l’analyse des informations brutes recueillies sur-le-champ, ont tout simplement décidé de pratiquer une autocensure couvrant de l’opacité la plus totale tout ce qui peut nuire à l’image qu’ils ou elles veulent donner d’un État qui pratique le génocide comme certains pratiquent le golf.
- délibérée, parce que le soutien inconditionnel au projet génocidaire d’Israël est une politique d’État n’ayant rien ou peu à voir avec «l’influence des lobbies juifs», certes extrêmement puissants et financés avec générosité grâce aux exemptions fiscales dont bénéficient les donateurs, mais pas au point où les considérations géostratégiques des pays qui protègent l’entité sioniste et cachent ses crimes ne constituent pas l’explication essentielle de ce soutien illimité accordé.
Si, demain — et l’Histoire est pleine de surprises inimaginables — ces pays estiment qu’Israël n’a plus d’importance dans leurs calculs géostratégiques, ils seront les premiers à se retourner contre elle et à tirer, selon l’expression populaire imagée, le tapis de dessous les pieds de cette «entité chérie». l’entretien permanent de l’insécurité, du désordre et de la violence armée dans une région géo-stratégiquement essentielle pour l’hégémonisme présent.
En faisant croire à la puissance infinie de ces lobbies «communautaristes» du type Aipac aux États-Unis ou Crif en France, les dirigeants titillent la fibre «antisémite» partie intégrante de la «culture occidentale» et cachent, en même temps, les desseins réels de cet amour fou pour Israël, et le «clairon» de la «mobilisation totale» qui accompagne la guerre permanente menée contre le peuple palestinien, et les guerres d’accompagnement déclenchées de temps à autre contre les pays voisins. L’entretien d’une tension permanente dans la région fait partie intégrante de la stratégie hégémoniste de ces pays, et n’est pas le résultat de «la puissance politique et financière juive».
Au contraire, on gonfle de manière délibérée cette influence pour faire tomber sur les communautés juives nationales la responsabilité totale des crimes et exactions de tout type commis par Israël au nom de la défense du judaïsme, alors qu’elle n’est, pourtant, qu’un instrument manipulé pour faire croire que tout y tourne pour «protéger une minorité religieuse de la destruction totale».
Le cynisme n’a pas de limite quand les intérêts supérieurs de ces États sont en jeu. L’appui total donné à l’entreprise sioniste est donc le «summum de l’antisémitisme» déguisé en appui illimité à cette entreprise barbare et criminelle, qui donne un mauvais nom à la religion qu’elle est supposée défendre.
En conclusion
Ceux qui croient à «une solution politique» juste et équilibrée et à la fiction des «deux États» cruellement entretenue, mais n’ayant jamais reçu un début de consécration sur le terrain, voient leurs dernières illusions se dissiper devant le spectacle de la destruction systématique et du massacre actuellement en cours.
Après ces derniers mortels rebondissements, dans lesquels la destruction de Ghaza a reçu le feu vert officiel de la plus grande puissance du monde, il est temps de mettre fin au «rêve» d’une «paix négociée» ouvrant la voie à la création de deux États sur le territoire historique de la Palestine !
Ce que veut Israël est exactement ce que veulent «les démocraties avancées». On a vu avec quelle rapidité elles ont sorti leurs «grands canons» pour monter leur opposition aux revendications russes, pourtant, elles, assises sur l’histoire contemporaine, une histoire vraie pour laquelle il y a des preuves tangibles et que tout un chacun peut constater, s’il le veut. Si ces puissances avaient vraiment voulu d’une paix négociée, elles l’auraient imposée depuis longtemps aux adversaires. Mais ce qu’elles veulent, c’est la continuation de cet état des choses, où Israël, tout en servant les intérêts géostratégiques hégémoniques des puissances extérieures à la région, met en œuvre son programme de nettoyage ethnique et de génocide du peuple palestinien.
La «délégitimisation» sans nuance du droit à la résistance du peuple palestinien, dont les manifestations sont qualifiées systématiquement de «terroristes», prouve, s’il le fallait encore, que les «démocraties avancées» veulent, pour leurs propres desseins, que l’entreprise sioniste aille jusqu’au bout de son projet de vider la Palestine historique de ses habitants originaux.
Cruels et cyniques au-delà du «machiavélisme» pourtant normal dans les relations internationales sont ceux qui proclament à la fois «qu’il n’y a pas de ligne rouge pour Israël» et que «celle-ci doit épargner les victimes civiles» tout en lui fournissant les munitions et armements destinés à faire franchir un nouveau pas à son entreprise «génocidaire».
La seule paix que les «démocraties avancées» veulent pour le peuple palestinien coïncide totalement avec la «paix sioniste» : à savoir la «paix des cimetières».
Les accords d’Abraham assurent la «complicité» des «États arabes modérés» pour la réussite de cette solution finale du problème palestinien.
Mais attention ! L’Histoire est pleine de surprises désagréables pour les occupants, et la victoire finale sera toujours du côté des opprimés, surtout s’ils persistent dans leur résistance héroïque !
Qu’importe donc la vaine tentative de la délégitimer en la qualifiant de «terroriste», ce qui n’est qu’un refus des réalités par des puissances devenues ivres de leur «invincibilité» et se croient tout permis, parce qu’elles «sont les plus fortes».
En tout cas, on sait comment se dessine l’ordre mondial que ces puissances tentent de mettre définitivement en
place ! Un ordre de violence armée unilatéral où la menace du «génocide» planera sur tous les peuples qui n’aspirent qu’à vivre en paix, mais sont trop faibles pour se défendre ou acceptent passivement l’opprobre de l’occupation étrangère.
M. B.
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Posté Le : 23/11/2023
Posté par : rachids