Algérie

Le rêve brisé d'un amoureux du cinéma



Mais moi, je ne vous ai rien fait. Ce mea culpa sonne comme un rejet de culpabilité d'un condamné qui voit que les jeux sont faits et qui clame son innocence devant un flagrant déni de justice. Mais ce n'est là que le titre du dernier roman d'Abdelkader Hammouche qui en est à son huitième écrit, le dernier en date est Le glaive et la balance, émouvant, au demeurant.L'auteur est avocat de profession et dans les prétoires, il a certainement souvent entendu ce cri du condamné de n'être coupable en rien du crime dont on l'accuse. L'auteur était aussi journaliste «dans une vie antérieure» ayant exercé dans les années quatre-vingt dans le défunt hebdomadaire Algérie Actualités, et c'est donc en sa qualité de journaliste qu'il a été sollicité par un quidam qui tenait à lui raconter ses rêves et ses déboires. L'auteur lui prêta donc toute l'attention qu'exige ce type de rencontre. Il écouta alors son histoire. Durant deux heures, l'inconnu lui dit ce qu'il avait sur le c?ur, sans rien demander en retour mais juste une écoute, une oreille attentive, lui dont le rêve se heurta à la dure réalité car «adolescent, j'ai toujours rêvé de voyage à l'étranger», lui confia-t-il. Surtout qu'il avait un faible mortel pour le cinéma et ses icônes. Passablement intéressé par les études, au grand dam de sa mère qui voulait en faire un médecin, il opta pour un stage de formation paramédicale. Une fois le diplôme en poche, il se mit en quête d'un travail. Sans difficulté, il se fit recruter à l'hôpital de Kouba (Alger) en qualité d'infirmier. Bon prétexte pour se faire de l'argent et se préparer, ainsi, à concrétiser son rêve de partir dans les contrées de ses rêves qu'il avait découvertes dans les reportages de télés et les documentaires. Débarqué sur le sol étranger, il allait de l'ébahissement à l'émerveillement ; en un mot, il était ébloui par tant d'images presque irréelles à ses yeux. «De la fenêtre, je voyais défiler des paysages de verdure, des arbres dont les feuilles étaient si vertes qu'elles semblaient factices», raconte-t-il au journaliste qui ne l'interrompit à aucun moment. Mais une agression dans un train allait briser tant d'illusions. Il fut défenestré. On ne comprend pas l'association français-marocain dans l'agression d'un touriste algérien qui n'a rien fait de répréhensible. L'auteur de ces lignes, dans le train Dijon-Vienne, a bien plus été un soutien fraternel face à une certaine velléité belliqueuse de voyageurs xénophobes.
Le cinéphile va vivre alors le début du calvaire. Il perd un bras. Séjour à l'hôpital. Ici, le journaliste s'invite pour un reportage émouvant, fort. Fini le Festival de Cannes, Marseille et bonjour les dégâts en terre étrangère, sans ressources, handicapé d'un bras. Il tombera dans la mendicité. Le retour au bled devient vital... Le directeur de l'hôpital de Kouba, compréhensif, le reprend dans ses services et l'affecte à l'accueil...
Ce livre se veut être une mise en garde contre l'appel des sirènes. L'auteur dit : «Je souhaite que ceux qui vont lire cette histoire comprennent que l'Europe ce n'est pas l'eldorado dont ils rêvent.»
B. T.
Roman Mais moi, je n'ai rien fait de Abdelkader Hammouche. 120 pages. éditions Barkat, 2020


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