Algérie - Revue de Presse

Le régime Moubarak accusé de défaillance sécuritaire et politique: L'Egypte sous tension s'interroge au lendemain du carnage



L'Egypte est sous tension et s'interroge au lendemain de l'attentat sanglant contre l'Eglise des Saints à Alexandrie qui a fait, dans les premières minutes de l'année 2011, 21 tués et une centaine de blessés.

Jusqu'à hier soir, aucune revendication n'a été faite de l'attentat qui vise à accentuer les tensions interconfessionnelles. Des sources sécuritaires égyptiennes ont fait état de l'arrestation de 17 personnes suspectées d'être impliquées dans l'attentat contre l'Eglise des Saints. Le procureur général égyptien Abdelhamid Mahmoud a souligné que l'attentat visait tous les Egyptiens «musulmans et coptes». C'est un «attentat terroriste et non crime confessionnel» a-t-il martelé en soulignant que les services égyptiens de sécurité faisaient de très grands efforts pour découvrir rapidement les commanditaires. Un résultat «rapide» réclamé par le Pape Chenouda qui s'est abstenu de désigner une partie précise. Selon lui, l'attentat est l'Å“uvre de forces qui ne veulent pas du bien à l'Egypte. Un communiqué des religieux coptes d'Alexandrie a qualifié l'attentat «d'escalade» d'actes hostiles contre les coptes «et les allégations mensongères qui sont multipliées contre l'Eglise et ses symboles à Alexandrie».

 Quelque 5000 personnes ont assisté samedi aux funérailles des victimes à Alexandrie. Des funérailles qui se sont transformées en manifestation de protestation avec un rejet des condoléances du président Hosni Moubarak que le secrétaire du pape copte Chenouda III essayait de transmettre. La tension a été très vive dans la journée du samedi où des groupes de jeunes ont lancé des pierres sur les forces de l'ordre. Le calme est revenu dimanche autour de la zone de l'église attaquée. Les autorités ont renforcé les dispositifs de sécurité autour des églises ainsi qu'à l'entrée et la sortie de la ville d'Alexandrie.

Faire «exploser» l'Egypte

Des observateurs égyptiens semblaient s'attendre à des limogeages dans les services de sécurité du gouvernorat d'Alexandrie. Des appréhensions sur une escalade des tensions étaient perceptibles. La crainte n'est pas surfaite dans un pays où la simple rumeur peut être dévastatrice. Les commanditaires de l'attentat jouent sur du velours dans un pays où des affaires et des rumeurs viennent régulièrement attiser les tensions confessionnelles. La presse égyptienne, dans toutes ses tendances, appelait, hier, à l'union entre chrétiens et musulmans. Le journal progouvernemental Rose El Youssef estime que «quelqu'un veut faire exploser» l'Egypte et provoquer «une guerre civile religieuse». Un autre journal, Al-Chourouk, évoquait avec appréhension une évolution à la libanaise. «Si le plan (des terroristes) marche comme prévu», l'Egypte pourrait s'embourber dans «un marécage semblable à ce qui s'est passé au Liban en avril 1975" écrit-il. Le gouvernement s'en tient à la ligne de Moubarak qui considère qu'il s'agit d'un attentat contre tous les Egyptiens quelle que soit leur confession. Mais cela n'empêche pas que des interrogations fusent sur le rôle de l'Etat et sur le climat de tension confessionnelle entretenu depuis des mois en Egypte. Al Masri Al-Yom invite d'ailleurs à ne pas se mettre «la tête dans le sable» pour ne pas voir et traiter les tensions interconfessionnelles. Des interrogations sont ouvertement posées sur le fait que l'Etat et ses services de sécurité n'aient pas accordé une importance particulière à la menace lancée deux mois plus tôt par l'organisation d'Al-Qaïda en Irak. Des analystes cités dans la presse dénoncent ouvertement ces défaillances sécuritaires. Amrou Hachem, du centre d'Al Ahram des études stratégiques et politiques, estime que l'attentat montre «qu'il n'existe aucune aptitude à traiter des menaces émises par Al Qaïda depuis plus de 40 jours...». Il a même estimé que de tels actes pouvaient se reproduire dans le contexte de défaillance sécuritaire actuel.

El Baradei : un régime impotent incapable de protéger les citoyens

Ce n'est pas seulement cette défaillance sécuritaire qui est pointée du doigt mais un climat général empoisonné qui attise les dissensions confessionnelles. Si la thèse de la «main étrangère» évoquée par le gouvernement et le président Hosni Moubarak n'est pas discutée, des intellectuels égyptiens et des hommes politiques estiment néanmoins que l'Egypte ne doit pas occulter la réalité. Il existe, estime-t-on, un problème d'intolérance religieuse et également un déficit grave d'intégration des composantes de la communauté nationale et de citoyenneté. Le plus critique a été l'ancien président de l'AIEA, Mahmoud El Baradei, qui préside l'association nationale pour le changement. Immédiatement, à chaud, sur sa page Twitter, il s'en est pris avec vigueur au «régime impotent» de Moubarak. «Il faut cesser de se moquer de l'intelligence du peuple. Un régime incapable de protéger ses citoyens est un régime qui doit partir». Les organisations de soutien à El Baradei ne sont pas en reste et ont dénoncé l'attentat et les tentatives de créer des «distinctions entre Egyptiens sur des bases religieuses» et l'instrumentalisation «vile» de la religion pour détourner l'attention. L'attentat de l'Eglise des Saints libère beaucoup de questions à laquelle le régime paraît incapable d'apporter des réponses convaincantes.




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