Ça y est, c'est
fait! Le Qatar organisera le Mondial de football 2022. La joie et l'allégresse
ont submergé l'émirat, les rutilantes mais non moins bruyantes voitures ont
envahi la corniche de Doha et la télévision qatarie passe en boucle les
mémorables moments de Cheikh Hamad Bin Khalifa Al-Thani, émir du Qatar, et de
son épouse, Cheikha Mozah Bint Nasser Al-Misned, soulevant le trophée de la
Coupe du monde, lors de la cérémonie à Zurich, au pays des Helvètes. Tout un
peuple est aux anges, le bonheur à son paroxysme…
Mais c'était sans
compter avec la vague de réactions virulentes émanant de certains pays
occidentaux qui ont réagi d'une manière si épidermique que leur bonne foi en
devenait suspecte.
A tout seigneur tout honneur, commençons par
M. Obama qui, dans sa stature de président et sa carrure de prix Nobel de la
paix, a fait une déclaration témoignant d'une si faible envergure. «Je pense
que c'était une mauvaise décision», a-t-il commenté. Il est vrai qu'il n'avait
pas encore digéré le fait que son pays n'ait pas obtenu l'organisation des Jeux
olympiques de 2016. Mais ne pas être fair-play de la sorte quand on est aussi
auréolé relève d'un évident complexe de supériorité dont il est difficile de se
défaire, surtout lorsqu'on est à la tête du pays le plus puissant de la Terre.
La position du président américain a été
défendue par le Washington Post qui explique que «la décision d'accorder le
Mondial 2022 au Qatar – un État désertique plus petit que le Connecticut, avec
de faibles liens au football et une chaleur oppressante en été – n'a pas grand
sens».
Il faut quand même se rendre à l'évidence :
M. Obama est un piètre défenseur des dossiers sportifs et ce n'est certainement
pas le Qatar qui en est la cause. Ensuite, il y a eu les journaux européens qui
ont manié le verbe comme on manie la faux. Dans le cas du journal suisse Le
Temps, il s'agissait plutôt de la traditionnelle arbalète, tant les attaques
étaient acerbes et incisives. On peut en effet lire, dans son éditorial du
vendredi 3 décembre, au titre éloquent «Le sport planétaire se moque de la
planète», que le Qatar est un état «minuscule» qui «ne possède aucune culture
ou tradition footballistique». Et d'ajouter que le Qatar «va dépenser des
milliards afin de construire… douze monuments d'aberration fermés et climatisés
en raison de la température (50 °C) qui règne en juin-juillet», pour finalement
prédire un impact environnemental conséquent à cause de la climatisation.
L'éditorialiste n'a pas manqué de mentionner
que le Mondial sud-africain avait rejeté 2,8 millions de tonnes de CO2 dans
l'atmosphère et que cela risquait d'être pire au Qatar. Ce journaliste doit
probablement ignorer, qu'à elles seules, les vaches vivant sur le sol helvète
rejettent annuellement, par le biais de leurs émissions gazeuses, une quantité
environ trois fois plus grande d'équivalent CO2 que celle d'un pays comme le
Mali !
La presse néerlandaise, par l'intermédiaire
de l'éditorialiste du quotidien AD (Algemeen Dagblad), a renchéri sur le même
thème en affirmant qu'en choisissant le Qatar, «la FIFA a opté pour une attaque
contre l'environnement». Quand on sait que les Pays-Bas, à eux seuls, émettent
beaucoup plus de CO2 que la totalité des pays du Sahel, de l'Atlantique à la
mer Rouge, on se demande pourquoi les Bataves semblent si préoccupés par
l'environnement quand il s'agit du Qatar. Ils devraient sérieusement penser à
modifier leurs comportements de surconsommateurs, cela serait plus salutaire
pour l'environnement que la climatisation de 12 stades lors de la soixantaine
de matchs du Mondial.
Qu'on se le dise, en termes de pollution et
d'impact sur le réchauffement de la planète, les Helvètes, les Bataves et les
Occidentaux n'ont absolument aucune leçon à donner au reste du monde. Un léger
changement de leur train de vie, de leur opulence et de leur gaspillage
sauverait certainement la planète.
Il faut aussi noter que ces journalistes ont
volontairement omis de rapporter des éléments importants dans le dossier
qatari. Ils ont évité, par exemple, de mentionner que le système de
climatisation - qui utilisera l'énergie solaire - sera un des plus
«écologiques» du monde et que certaines installations seront démontées après le
Mondial pour être offertes à des pays pauvres, non dotés d'infrastructures de
ce type. Le secrétaire général de la Fédération internationale de football
(FIFA), Jérôme Valcke, a tenu à préciser à ce sujet que «le Qatar va mettre en
oeuvre tout ce qui sera nécessaire pour que rien n'aille au détriment ni des
joueurs ni de personne».
Quant à la critique concernant la «culture
footballistique», elle dénote la méconnaissance occidentale du monde arabe et
de sa passion pour le football. Il est quand même étonnant d'entendre les
Étasuniens prétendre avoir une culture footballistique, eux pour qui le
base-ball, le hockey ou le basket sont les sports rois.
Les attaques contre le Qatar ont franchi le
cap des critiques plus ou moins «acceptables» avec des déclarations telles que
celles de l'Oeuvre suisse d'entraide ouvrière (OSEO), qui s'est dite «indignée
et scandalisée» par le choix du Qatar, en soulignant la discrimination envers
les femmes qui ne bénéficient d'«aucune protection contre la violence
domestique» dans ce pays.
Nous revoilà donc à l'essence même de cette
animosité. Après l'interdiction des minarets dans la Confédération Helvétique
et la féroce campagne islamophobe approuvée par une majorité de Suisses, il
fallait s'attendre à cette vision biaisée des choses. La banalisation de la
xénophobie et du racisme dans le pays de Guillaume Tell, mentionnée dès 2006
par le rapporteur spécial de l'ONU sur le racisme, atteint des sommets
vertigineux. De l'avis de ces «bien-pensants», certains pays n'ont pas le droit
d'organiser de manifestations sportives mondiales pour des motifs aussi bizarres
que la superficie de leur territoire, la température qu'il y fait, ou la vision
qu'ont d'eux les Occidentaux. Il ne reste plus qu'à demander à la Suisse de
nous dresser une liste de pays «admissibles» à l'organisation de telles
manifestations. Il faudra cependant qu'elle puisse répondre à la question
suivante : un pays raciste, xénophobe, imbu de lui-même et qui interdit les
minarets dans tout son territoire, a-t-il le droit d'organiser un Mondial ?
Rappelons à cette occasion que le Qatar,
malgré sa petite taille (comme on a coutume de le lui reprocher), a une réelle
expérience dans l'organisation des «grands» événements sportifs: Coupe du monde
des moins de 20 ans (1995), 15es Jeux asiatiques (2006), Grand prix MotoGP
(depuis 1994), Tournoi de tennis ATP (depuis 1990) et, bientôt, la Coupe d'Asie
des nations de football et les Jeux panarabes (2011).
Ces attaques virulentes ne sont pas sans
rappeler ce qu'avait subi la Chine avant l'organisation des Jeux olympiques de
la part de ces mêmes pays occidentaux. L'histoire nous a montré que ces Jeux
olympiques ont ébahi le monde. Il n'y a aucun doute que le Mondial 2022 suivra
cet exemple et restera dans les annales de la FIFA comme la plus belle
compétition jamais organisée.
Et vous, Bataves et Helvètes de ce monde,
vous serez les bienvenus. Faites cependant attention car, bien que très petit,
cet émirat possède un très grand nombre de minarets. Une telle concentration
risquerait de vous traumatiser. Quant à nous, amoureux du ballon rond, nous
sommes fiers du Qatar et nous le félicitons pour cet exploit.
D'autant plus que nous aimons entendre la
voix du muezzin…
*Docteur en
physique, Montréal (Canada)
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Posté Le : 09/12/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ahmed Bensaada*
Source : www.lequotidien-oran.com