Le public fuit-il le football '

Les images de la télévision sont criantes de vérité. Les matches du championnat national professionnel de football n'ont pas attiré beaucoup de monde. Il est triste de voir toutes ces rencontres se dérouler dans des stades vides. Même les derbies n'échappent pas à cette règle. Samedi dernier, la confrontation entre l'USM Alger et l'USM El Harrach s'est jouée dans un stade de Bologhine à moitié plein alors que d'habitude ce genre de rendez-vous attire la grande foule. Il y avait là, pourtant, le champion d'Algérie en titre. Cette défection du public n'est pas sans poser un gros problème à ces clubs auxquels les recettes générées aux guichets des stades servent au financement de leur activité.Nombreux sont ceux qui accréditent ce phénomène au fait que les autorités interdisent aux jeunes de moins de 18 ans non accompagnés de personnes adultes d'entrer au stade. Il est vrai que la population algérienne est connue pour sa jeunesse mais on ne croit pas que si les stades sont vides c'est parce qu'il n'y a plus de gosses qui y entrent. Il y a, certes, énormément de gamins à vouloir suivre un match dans une enceinte sportive mais ils ne sont pas la majorité. A notre avis, il y a trois causes essentielles à cette défection. D'abord, les matches du championnat professionnel n'offrent plus de spectacle de grande qualité.Il est un fait reconnu par tous : les joueurs du championnat local sont trop limités techniquement et tactiquement pour pouvoir étaler un jeu de bonne facture. Au moment où les matches algériens se jouent, ceux qui possèdent un démodulateur, et ils sont vraiment nombreux si on ajoute tous les cafés qui en sont pourvus, peuvent voir à la télévision des matches européens où le spectacle est garanti.A ce sujet, il serait judicieux de prévoir une journée de championnat le vendredi lorsqu'il n'y a pas de championnats européens. La deuxième cause à la perte du public, c'est le prix du ticket d'entrée. Actuellement, certains clubs font payer 200 DA et d'autres le proposent à 300 DA.Vous nous direz que ce n'est pas énorme mais quand quelqu'un qui se prépare à débourser de telles sommes, se dit qu'il risque de ne pas être payé en retour, à savoir qu'il va obtenir un spectacle de piètre qualité, dans la plupart des cas il se ravise et préfère conserver ses sous. La troisième raison tient au fait de l'éloignement de certains stades et à la programmation des matches. Pour ce qui est de l'éloignement, tout le monde n'est pas véhiculé et doit se déplacer en transport en commun. Ils sont combien les bus à vous assurer le retour vers votre ville ou quartier après un match 'On ajoutera que les horaires choisis par les clubs pour disputer leurs matches jouent contre les intérêts de leurs clubs. Quand un match débute à 18h, il ne se termine qu'à 20h alors que celui qui démarre à 21h prend fin à 23h. Les clubs ont des supporters qui n'habitent pas forcément dans les villes de ces clubs.A Alger, par exemple, le Mouloudia, l'USMA ou le CRB ont des fans qui viennent de Rouiba, Khemis El Khechna, Réghaïa, Boudouaou, Dar El Beïda, Bordj El Kiffan, Tipasa, Hadjout... A 20h ou 21h, il n'y a plus de bus pour transporter tous ces gens pour les ramener chez eux. C'est un énorme manque à gagner pour tous ces clubs qui pensent que parce qu'ils jouent en soirée, le spectacle qu'ils produisent est de meilleur qualité.Ce qui est complètement faux parce qu'ils joueront en soirée, dans l'après-midi ou même aux aurores, leur prestation sera toujours aussi médiocre. Bref, le public hésite à se déplacer parce que, d'une part, les matches se terminent tard et que le spectacle offert n'est pas de qualité d'autre part. On ajoutera que même en crise financière, les clubs sont très dépensiers.On ne comprend, ainsi, pas pourquoi un match qui se joue à huis clos, donc sans public et sans recette, est programmé à 19h obligeant les responsables du stade à utiliser les projecteurs, d'où une très grosse consommation d'électricité. En somme il y a beaucoup de correctifs à apporter dans ce football professionnel dont les clubs naviguent à contre-courant de la logique commerciale.