Algérie

Le projet de loi relative à l'information : la régression en marche



Par Hakim Saheb
L'APN s'attelle, à l'heure actuelle, à débattre du projet de loi organique relative à l'information pour son adoption. Les motivations, le contenu et les objectifs de ce texte alertent les professionnels, les Algériens et les partenaires de l'Algérie. La régression est en mouvement.
Cette nouvelle mouture, sans cesse différée, suscite légitimement, dans le monde de la presse et des professionnels, méfiance et scepticisme. C'est dire que le contexte général de repli, de verrouillage et de restriction des libertés individuelles et collectives, et l'adoption à la hussarde d'autres lois aussi sensibles que le présent projet favorisent toutes les appréhensions et incitent à davantage de vigilance. Evoquer la liberté de la presse et le droit à l'information en Algérie, c'est à coup sûr revisiter l'un des rares acquis arrachés de hautes luttes après les émeutes sanglantes d'octobre 1988 et se rappeler le sacrifice des militants des droits de l'homme des années 1980 et le lourd tribut payé par la corporation qui a perdu plus de 100 journalistes durant la décennie 1990.
Le contrôle de l'information : une constante nationale
A cet effet, il n'est pas inutile de rappeler deux données essentielles avant d'examiner les principales dispositions de ce projet de loi.
1 - Le code de l'information du 6 février 1982 énonçait sans aucune ambiguïté que «l'information est du domaine de souveraineté nationale (…) l'édition des journaux d'information générale est une prérogative du parti et de l'Etat». Selon les articles 1,2 et 3 de ladite loi, l'information devait s'exercer «dans le cadre des options idéologiques du pays, des valeurs morales de la nation et des orientations politiques» sous la direction du FLN. Dans la pratique, cette approche, empruntée au modèle brejnévien, réduisit l'information à des directives et injonctions émanant du pouvoir exécutif. Tout ce qui relevait du politique, de l'économique et du culturel devait systématiquement être soumis avant publication au ministère de l'Information et au responsable hiérarchique du comité central du FLN. L'information était considérée comme un secteur stratégique contrôlé par l'Etat et le parti. Cette situation sera momentanément battue en brèche par la loi 90-07 du 3 avril 1990, adoptée dans l'euphorie de la révision constitutionnelle qui mit fin au monopole de l'Etat sur la presse avant d'être malmenée avec d'une part, le retour de fait de l'agrément sous couvert formel du récépissé et la promulgation du décret du 11 août 1992 qui autorise la suspension jusqu'à 6 mois des activités «de toute société, organe, établissement ou entreprise mettant en danger l'ordre public, le fonctionnement normal des institutions ou les intérêts supérieurs du pays» et, d'autre part, avec la suppression par le décret législatif 93-13 du 26 octobre 1993 du Conseil supérieur de l'information, colonne vertébrale de tout système d'information démocratique et nécessairement pluriel. Depuis, les suspensions, saisies et entorses de toutes sortes se sont accentuées contre la presse privée. Le code de l'information, quoique formellement en vigueur, se voit vidé de sa substance par les effets d'une pratique, aussi inique que scélérate, au fil de ces 20 dernières années comme reconnu, sans la moindre équivoque, dans l'exposé des motifs du présent projet qui avoue que la loi 90-07 «a dû subir les contre-coups du contexte politico-sécuritaire que l'Algérie a vécu durant la décennie 1990 dont la gestion a conduit à l'instauration de l'état d'urgence et conséquemment à une gestion contrôlée de l'information sécuritaire».
2 - Le droit à l'information constitue une composante essentielle de la liberté d'expression. Il est considéré, tout à la fois, comme l'un des fondements d'une société démocratique et une condition nécessaire à son progrès et à l'épanouissement de ses membres. Des principes maintes fois réaffirmés par la jurisprudence de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples dont l'Algérie est partie prenante. Dans le système jurisprudentiel européen le plus accompli dans ce domaine la presse dispose d'une liberté quasi illimitée pour discuter des questions d'intérêt général. La Cour de Strasbourg ne cesse de rappeler le rôle éminent de la presse dans une société démocratique. La presse contribue à l'animation de la vie politique et socio économique et représente l'indispensable «chien de garde» public. A sa fonction qui consiste à diffuser l'information, s'ajoute le droit pour le public de la recevoir. L'Algérie ne peut vivre en autarcie et faire fi indéfiniment de l'évolution mondiale et des aspirations des peuples pour plus de liberté, de citoyenneté, de justice et de respect des droits humains, elle qui s'est empressée de proclamer son adhésion à la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 suivant l'article 11 de la Constitution du 10 septembre 1963. Dans l'article 19 de cette déclaration, il est explicité que «tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen que ce soit». Ce détour est nécessaire pour mieux appréhender l'économie du présent projet de loi qui contient 132 articles répartis suivant 12 titres. Ce texte qui a pour objet, aux termes de l'article 1, de fixer les règles et les principes du droit à l'information reprend l'essentiel des dispositions contenues dans la loi de 1990 et introduit quelques réaménagements, qui, du reste, peuvent paraître comme une légitimation des pratiques imposées durant les 15 dernières années.
Recul et manipulation
Ces dispositions portent sur les droits socio-professionnels des journalistes, la mise en place d'un conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie du journalisme, l'annonce de l'ouverture du paysage audiovisuel au privé, la régulation de la presse en ligne, la création de deux autorités de régulation, l'une pour la presse écrite et la seconde pour les médias audiovisuels, dépénalisation, somme toute, partielle des délits de presse en vigueur depuis l'amendement du code pénal en mai 2001 et, enfin, des dispositions régissant la profession et qui sont comme autant de mesures visant à restreindre l'exercice de ce noble métier en particulier et le champ de la liberté d'expression en général. L'un des reculs qu'accuse le présent projet au regard de la loi de 1990 a trait à la création et à l'édition des publications périodiques qui seront, désormais, soumises au régime de l'autorisation en lieu et place du régime déclaratif et ce, à l'instar de ce qui est prévu également dans le projet de loi relative aux associations. Selon l'article 11 du projet, tout périodique doit faire l'objet d'un dépôt d'autorisation préalable de la part du responsable de la publication auprès de l'Autorité de régulation de la presse écrite, 60 jours avant l'édition du premier numéro alors que l'actuel ne prévoit que 30 jours. Il faut savoir que loi présente (90-07) a prévu une formalité simple et impérative qui oblige le procureur du tribunal territorialement compétent à délivrer sur-lechamp un récépissé de dépôt lors de l'enregistrement de la demande. Cette mesure a été dévoyée et abusivement détournée par le ministère de la Justice qui ne remet pas d'accusé de récépissé et s'offre des délais excessifs pour établir une autorisation et rejeter, le cas échéant, la demande d'enregistrement. Des affidés du système non journalistes ont pu créer des journaux pendant que des professionnels ont leur demande bloquée des années durant. S'agissant de l'activité audiovisuelle, l'article 58 du projet stipule que celle-ci «est exercée par les institutions publiques, les entreprises et organismes du secteur public et les entreprises de droit privé algérien». Rien de nouveau en la matière. L'activité audiovisuelle est une mission de service public. Selon l'article 61 qui dispose que la création de tout service thématique de communication audiovisuelle, la distribution par câble d'émissions radiophoniques sonores ou télévisuelles ainsi que l'utilisation des fréquences radioélectriques sont soumises à autorisation attribuée par décret. Conformément à l'article 59 de ce texte, les modes de sujétion de service public sont définis par voie réglementaire. Autant dire que les conditions de mise en œuvre de cette loi sont imprécises, contingentes, ambiguës et qu'elles dépendront, sur ce registre comme sur d'autres points de ce projet de loi développé plus loin, des interprétations que voudra bien en faire le maître du moment. Aucune clarification sur la confiscation qui caractérise le secteur public. Dans les faits, le paysage audiovisuel algérien est livré à des centaines de chaînes étrangères distillant toutes sortes de messages. Ce dernier est entrouvert à tous les vents et à toutes les influences à l'exception des expressions culturelles algériennes dans ses multiples facettes locales, régionales et nationales qui sont niées et combattues par les tenants d'un islamo-baâthiste antinational selon les termes de Mostefa Lacheraf. Le pouvoir aurait du libérer les initiatives et le personnel de ces structures publique des contraintes et autres censures qui les ont inhibées et œuvré en toute intelligence à l'ouverture des médias lourds existants à l'opposition démocratique qui reste la principale victime des pratiques en cours dès lors que le discours théocratique, lui, est revendiqué et assumé par le pouvoir.
- L'autre prétendue nouveauté est celle relative à l'activité d'information en ligne (écrite et audiovisuelle) qui doit être «libre» selon l'article 70 mais «soumise aux fins d'enregistrement et de contrôle de véracité, au dépôt d'une déclaration préalable par le directeur responsable de l'organe de presse en ligne» et qui s'exerce conformément au respect des lois et règlements en vigueur et dans le respect des dispositions de l'article 2, à savoir «le respect de la Constitution et des lois de la République, des valeurs culturelles et spirituelles de la nation, de l'identité nationale et de l'unité de la nation ainsi que des exigences de la sûreté de l'Etat et de la défense nationale». Autant de préalables qui peuvent être utilisés pour disqualifier voire réprimer tout propos ou analyse. Tout porte à croire que le but escompté est de se donner une assise légale pour s'attaquer de nouveau à ces îlots de liberté qui restent un des rares outils pour un parti politique d'opposition comme le RCD ou à certaines associations de jeunes et ONG interdites d'expression. Un signe qui ne trompe pas lorsque l'on sait que l'article 64 du projet de loi définit la presse électronique comme étant tout service de communication écrite en ligne destiné au public, édité à titre professionnel par une personne physique ou morale de droit algérien qui a la maîtrise de la ligne éditoriale et de son contenu.
Duplicité systémique
Par ailleurs, le projet de loi prévoit la création de deux autorités de régulation. La première est consacrée à la presse écrite et la seconde aux médias audiovisuels. Selon l'article 38, l'Autorité de régulation de la presse écrite est tenue de préciser les modalités de mise en œuvre des droits à l'expression des divers courants d'opinion et de garantir l'indépendance et l'impartialité du service public de l'information. L'article 41 stipule que cet organe adresse des observations et recommandations publiques en cas de manquement aux obligations prévues par la présente loi organique, et fixe les conditions et délais de leur prise en charge et peut, en vertu de l'article 45, retirer l'agrément de la publication concernée ou saisir la justice d'une demande de suspension. L'article 51 du projet de loi dispose que l'Autorité de régulation de la presse écrite est composée de 14 membres nommés par décret présidentiel. 3 membres désignés par le président de la République dont le président de l'autorité, 2 membres non parlementaires par le président de l'Assemblée populaire nationale, 2 membres non parlementaires par le président du Conseil de la nation et 7 membres élus à la majorité absolue parmi les journalistes professionnels justifiant d'au moins 15 ans d'expérience. Le mandat des membres de l'Autorité de régulation de la presse écrite est de six ans. Pour ce qui est de l'Autorité de régulation de l'audiovisuel, sa composition et son fonctionnement seront définies dans la loi spécifique aux médias audiovisuels (article 63). Deux remarques s'imposent à ce sujet. L'apparente parité que suggère le texte est trompeuse. Outre le fait que le président de l'organe qui jouit d'une voix prépondérante est directement désigné par le président de la République, les 7 membres désignés constituent, sans présumer, une entité politiquement cohérente et homogène à l'inverse des 7 élus qui devraient représenter les journalistes dans leur pluralité et leur divergence. La seconde est le fait que l'Autorité de régulation des médias, tant par sa dénomination que par les attributions qui lui sont assignées, se confond avec le Conseil de l'ordre des journalistes mais aussi avec l'organisme étatique tel que l'ARPT où peuvent siéger des éditeurs et non des journalistes, notamment lorsque l'on sait que le projet de loi en question lui confère le pouvoir de réguler moins la profession de journaliste que les aspects financiers et commerciaux des entreprises de presse. Avec un tel mode de désignation, une telle composition, de telles prérogatives adossées aux ambiguïtés qui inspirent le projet, on imagine sans peine les abus auxquels conduiront les décisions de cette instance en cas de velléités d'autonomie des professionnels de l'information. Quant au Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie du journalisme, autant dire d'emblée que ce texte n'apporte aucune nouveauté par rapport à la loi en vigueur sinon qu'elle légalise sournoisement une immixtion des pouvoirs publics dans la charte des droits et des devoirs du journaliste en énonçant des règles inédites et prohibitives dans un domaine universellement reconnu comme étant exclusif aux professionnels et leur Conseil de l'ordre. Le RCD avait, on s'en souvient, proposé dès 1994 la création d'un conseil de l'audiovisuel dont la composition serait exclusivement conférée aux professionnels. Une fois de plus, le pouvoir arrive toujours en retard et agit sous la contrainte des évènements, ce qui ne garantit pas l'exécution éthique d'une mission dans un domaine où la bonne foi et l'adhésion des concernés est toujours requise pour s'accomplir dans des termes et des délais acceptables. Ainsi, dans l'exercice de l'activité journalistique et, sous le fallacieux prétexte du «strict respect de l'éthique et de la déontologie», le journaliste doit respecter «les droits constitutionnels et les liberté individuelles des citoyens, rapporter, avec honnêteté et objectivité, les faits et évènements et s'interdire de faire de façon directe ou indirecte l'apologie du racisme, de l'intolérance et de la violence ». On aurait pu se satisfaire de cet énoncé et faire l'économie de la batterie d'interdits qui imprègne le projet actuel. Mais dans la vulgate du système algérien, il faut toujours s'approprier les propositions de l'opposition ou les recommandations internationales pour mieux les polluer ou les dévoyer. En effet, après cette concession on peut lire plus loin que le journaliste doit s'interdire le plagiat, la calomnie, la diffamation et la délation, d'utiliser à des fins personnelles ou matérielles le prestige moral attaché à la profession, de porter atteinte à la souveraineté et l'unité nationales et aux attributs et symboles de l'Etat, etc., et comme pour interdire et fermer d'autorité le débat sur l'histoire du pays et toute remise en cause des thèses officielles et de ses zones d'ombre, il est souligné sans ambages qu'il est prohibé «de porter atteinte à l'histoire nationale et faire l'apologie du colonialisme». Commenter le livre du Dr Saïd Sadi Amirouche : une vie, deux morts et un testament ou s'interroger sur les circonstances de l'assassinat de Abane Ramdane, dénoncer l'inflation des moudjahidine ou des martyrs est passible d'une poursuite pénale au vu de cette disposition ! Pis, non seulement le texte en question n'exige pas la plainte préalable comme source d'engagement des poursuites afin de préserver certaines institutions (l'armée, les corps constitués, les administrations…), l'article 110 va jusqu'à la caricature et stipule que «toute personne physique ou morale algérienne a le droit de réponse sur tout article écrit ou émission audiovisuelle portant atteinte aux valeurs nationales et à l'intérêt national». Cette mesure ressemble à s'y méprendre aux actions vaudevillesques engagées par les Frères musulmans et qui ont vu la justice égyptienne saisie pour prononcer des divorces contre un époux jugé «hérétique» à l'insu du couple. Avec un tel dispositif, le premier venu peut se croire autorisé à disqualifier et envisager la condamnation d'un écrit ou propos jugé incompatible avec les valeurs nationales. L'article 80 dispose, en outre, que le droit d'accès aux sources d'informations est reconnu aux journalistes professionnels «excepté lorsque l'information concerne le secret de défense nationale tel que défini par la législation en vigueur, porte atteinte à la sûreté de l'Etat et/ou à la souveraineté nationale de façon manifeste (…), concerne le secret économique stratégique ou l'information est de nature à porter atteinte à la politique étrangère et aux intérêts économiques du pays». Au-delà du flou et/ou de la vacuité de ces notions qui ne semblent pas faire l'objet d'un consensus conceptuel national, il faut mentionner que la législation en vigueur ne donne aucune définition précise du sens que recouvre les notions «d'intérêts économiques du pays», «le secret économique stratégique » et, last but not least, en quoi une information et/ou une critique d'un programme ou d'une vision politique et économique diffusée dans un périodique d'information est susceptible de «porter atteinte» aux intérêts économiques stratégiques, à la souveraineté nationale ou à la politique étrangère. Dénoncer les divagations de la diplomatie algérienne dans ses égarements en Libye ou condamner les connivences ou ses tergiversations dans la boucherie que commet Bachar El-Assad contre son peuple serait désormais un crime d'Etat ! La démarche est singulière et paraît incongrue comparativement aux réformes engagées par les pays voisins, dans la mesure où c'est le législateur, tel que cité précédemment, qui s'arroge le pouvoir de fixer les principes liés à l'éthique et à la déontologie en lieu et place des professionnels, violant de surcroît les règles universelles consacrées par les instruments internationaux. En l'espèce, il suffit de se référer et d'adapter au contexte algérien la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes de Munich de 1971. Il va sans dire que l'intention du gouvernement est implicitement dite dans l'exposé des motifs. L'esprit de ce projet est illustré dans le dernier passage qui affirme sans aucune réserve que ce «texte devrait paver le chemin pour une presse plurielle plus professionnelle, débarrassée des scories (sic !) d'une ouverture incontrôlée, et peut-être plus consciente des enjeux éthiques et déontologiques ». La presse algérienne aurait donc périclitée à cause d'un excès de démocratie et non l'inverse. Quand on observe que 95% des journaux algériens sont créés et financés par les services spéciaux pour polluer et diffamer en toute impunité, on ne peut qu'être atterré par tant de cynisme. L'affectation de la publicité à des titres sans lectorat et dont la seule mission est d'encenser le pouvoir et d'invectiver toute contestation est un signe de la conception que se fait le système de l'information. C'est, donc, en toute logique, que l'article 2 du projet soumis au Parlement, contrairement à l'article 2 de la loi actuelle, conditionne l'exercice du journaliste par des interdits et au respect de principes aussi vagues qu'imprécis tels «les valeurs culturelles et spirituelles de la nation, l'identité nationale et l'unité nationale, les exigences de la sûreté de l'Etat et de la défense nationale (…) de la sauvegarde de l'ordre public, des impératifs de la politique étrangère du pays, des intérêts économique du pays, du secret de l'instruction judiciaire, de des juridictions et des décisions de justice…» Il s'agit, en définitive, d'autant d'interdits, aggravés par le maintien de la pénalisation des délits de presse, qui seront suspendus telle l'épée de Damoclès sur la tête des journalistes et qui vont les replacer dans le contexte politique et institutionnel de la chape de plomb qui a précédé la Constitution de février 1989. Le texte qui a fixé nombre de délits (articles 114-124), dont certains sont punis par des amendes allant de 100 000 à 500 000 DA, préconise une relative
dépénalisation de la procédure dans la mesure où il maintient l'exception de vérité et la remise de la prescription de 3 ans à 3 mois et exclut de facto, comme c'est le cas sous d'autres cieux, le principe de bonne foi en tant que fait justificatif et moyen de défense du journaliste. De plus, il ne faut surtout pas occulter qu'en matière pénale, le journaliste algérien est soumis à deux textes de loi compte tenu des délits liés à la diffamation et à l'injure régis par le code pénal. En ce sens, le pouvoir ne semble pas — ou ne veut pas — prendre conscience de la nécessité de régir et de réprimer les «délits de presse» par un texte unique et qui en garantit la cohésion de la procédure pénale. L'arrière-pensée qui le sous-tend est pernicieuse : fragilisé par la conjoncture, le pouvoir ne veut pas donner l'impression qu'il réprime un délit d'opinion à travers un délit de presse. Paradoxalement, ce projet aura une vertu : alerter les Algériens sur le futur immédiat qui les attend : la liberté de la presse, et son corollaire la liberté d'expression dans le cadre d'un Etat de droit, n'est pas pour demain. Les tergiversations et reflux qui imprègnent substantiellement le projet de loi relative à l'information — à l'instar des autres lois organiques liées à la commune, la wilaya, les partis politiques, les associations et le régime électoral — sont à ce point manifestes que l'annonce de réformes ne convainc plus personne.
H. S.


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