Algérie

Le projet ambitionne de réorganiser le secteur : Nouvelle loi sur la santé : attentes des uns, scepticisme des autres


«Nous n'avons jamais évalué nos structures! Les problèmes de gestion auxquels est confronté le secteur de la santé concernent essentiellement les CHU, d'où la nécessité de nouveaux outils pour ne plus investir l'argent de l'Etat dans les structures mais dans les activités.» C'est ce qu'a déclaré le ministre de la Santé à propos de la gestion des structures hospitalières avant d'annoncer face aux critiques et aux dysfonctionneme-nts qui caractérisent le secteur qu'un audit destiné à l'évaluation du système,est en cours de préparation. Pour mener à bien cette mission, un organisme constitué principalement de médecins et d'inspecteurs des Directions de Santé publique (DSP) a été mis en place, selon Mokhtar Hasbellaoui.A.B.
«70% du budget vont au paiement des salaires»
Constat n 80% des prestations sanitaires assurées par le secteur public sont «médiocres» en matière de prise en charge du malade, d'hygiène sanitaire, de diagnostic et de manque de médicaments.
Ainsi, 70% des épidémies sont dues au manque d'hygiène dans les milieux hospitaliers notamment en raison du manque de stérilisation du matériel et des appareils de dépistage, outre l'absence du contrôle aux réfectoires des cliniques, selon la Fédération algérienne des consommateurs (FAC).
La situation n'est toutefois pas plus reluisante chez le privé puisque seuls 50% des prestations fournies dans ce secteur sont « acceptables » et 30% d'un niveau médiocre, notamment dans les cabinets médicaux, a précisé le premier responsable de la FAC.
Zaki Hariz a relevé que beaucoup de malades optaient pour des soins à l'étranger en raison d'une forte appréhension quant à la qualité des prestations sanitaires fournies au niveau des cliniques et hôpitaux public et privés.
Les raisons derrière le recul des prestations sanitaires en Algérie sont, de l'avis de la FAC, l'absence de professionnalisme, le non respect des règles d'éthique et de déontologie et le manque de qualification, de l'humanisme, du contrôle, du suivi et de l'inspection sanitaires. Le manque de formation et d'encadrement et de moyens de diagnostic, notamment en chirurgie tels que la technologue « Nano » et la dépendance totale à l'étranger concernant l'acquisition des équipements médicaux, figurent parmi les causes ayant induit la détérioration des prestations sanitaires en Algérie, peut-on aussi lire dans le rapport de la FAC.
Devant ce constat, un organisme constitué principalement de médecins et d'inspecteurs des Directions de Santé publique (DSP) a été mis en place pour l'évaluation du système national de santé qu'il soit public ou privé.
Car il s'agit d' « un système un et indivisible », a déclaré le ministre de la Santé. Hasbellaoui a rappelé, dans ce cadre, le projet de réorganisation du secteur qui a pour objectif d'offrir au malade « un système dans lequel il va retrouver son parcours », assurant que « ce changement nécessite beaucoup de temps, de sérénité et de travail ». Rappelant, à ce sujet, que sur les 400 milliards de DA alloués annuellement au secteur de la santé, pas moins de 70% vont au paiement des salaires du personnel.
Le président du Conseil national de l'Ordre des médecins a, pour sa part, mis en avant les dispositions prise dans la nouvelle loi sur la santé, inhérentes à la décentralisation à travers la mise en place d'agences régionales de la santé ainsi que l'autonomie des agences de pharmacie.
Bekkat Berkani a, en revanche, déploré que le texte de loi n'ait pas prévu un organisme national de prévention contre certaines maladies, ainsi qu'une agence de veille sanitaire, tout en plaidant pour que les médecins résidents exercent leur fonction dans de meilleures conditions.
Bekkat a, par ailleurs, proposé la suppression de l'article lié à l'inscription au tableau de l'Ordre, du fait que cette disposition, a-t-il expliqué, «n'oblige pas les praticiens du secteur public à le faire, alors que l'obligation doit concerner tous les médecins».
Assia Boucetta
«Un code pénal bis»
Recommandations n Les syndicats du secteur de la santé ont proposé une évaluation globale du système de la santé avec une réflexion sur des mesures alternatives pouvant améliorer les conditions de travail des médecins.
Les représentants des syndicats ont affirmé que le service civil « n'a pas résolu le problème pour lequel il a été instauré, à savoir le déficit en encadrement médical au niveau des établissements hospitaliers dans les zones enclavées ».
Les médecins concernés exigent dans ce sillage la réunion des conditions de travail nécessaires au sein des établissements hospitaliers de leur affectation. Ils proposent par ailleurs l'encouragement du jumelage entre hôpitaux et la mise en place d'un observatoire national regroupant l'ensemble des secteurs concernés pour la prise en charge de leurs préoccupations.
Concernant les conditions imposées en matière d'exercice des activités complémentaires prévues dans le projet de loi, présenté début novembre dernier par le ministre de la Santé, la présidente du SNECHU a estimé que ces conditions sont à même de produire une autre saignée dans le secteur de la santé, rappelant que pas moins de 3000 médecins quittaient annuellement le pays pour exercer à l'étranger. S'agissant de la catégorie des médecins hospitalo-universitaires, Dr Wahiba Ouahioune a appelé à la création d'un organisme dépendant du Premier ministère pour prendre en charge leurs préoccupations à la place des ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur.
Pour sa part, le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP) a déploré l'exclusion des praticiens publics de l'élaboration du projet de loi sur la Santé, estimant que le texte était « un code pénal bis » du fait de tous les articles prévoyant des poursuites judiciaires à l'encontre des professionnels du secteur. Plusieurs syndicats du secteur de la Santé ont par ailleurs proposé la création d'un Haut conseil de la santé dans le cadre du nouveau projet de loi sur la Santé pour assurer « le contrôle de la gestion, la prospective et l'alerte précoce des risques menaçant la santé publique ».
Le secrétaire général du syndicat national des médecins généralistes (SNMG), Salah Laouar Abdelhamid a indiqué que la création d'un Haut conseil de la santé « était un impératif pour mieux servir la santé publique et garantir des prestations sanitaires répondant aux normes internationales, tant dans le secteur privé que public ».
Il a proposé, à cet effet, que ce Conseil « soit le représentant de tous les acteurs du secteur et jouisse d'une autonomie totale, tout en lui attribuant les missions de prospective, d'alerte précoce contre les risques sanitaires et de prévention ». Laouar a mis l'accent sur « la nécessité d'instaurer une complémentarité entre les secteurs public et privé », d'autant que le secteur privé « attire un taux considérable de patients mais ses coûts ne sont pas à la portée de toutes les catégories sociales ».
Il a plaidé pour l'intégration, dans le projet de loi, de « l'obligation d'assurer une formation continue à l'ensemble des personnels du secteur de la santé, sans exception aucune, étant le meilleur moyen pour éviter les fautes médicales ». Il a proposé également « la mise en place d'une stratégie efficace pour la rationalisation de la gestion des ressources et des moyens alloués au secteur », outre « la séparation entre le rôle des syndicats de la santé et celui du Conseil national de déontologie médicale ».
A. B.
Revoir l'éthique médicale
Déficit n La mise en place d'un cursus universitaire dédié à l'éthique médicale a été vivement recommandée par les professionnels de la santé.
«La proposition émise en ce sens vise à favoriser l'ancrage du concept indispensable de l'éthique dans la pratique quotidienne des professionnels de la santé», a précisé le Pr Khaled Layadi.
Le diplôme suggéré donnerait aussi lieu à «une référence dynamique entre les différents intervenants dans le domaine du traitement de la douleur», a expliqué le Pr Layadi, également chef du service de médecine physique et de réadaptation fonctionnelle du Centre hospitalo-universitaire d'Oran (CHUO).
La doyenne de la faculté de médecine d'Oran, le Pr Fatima Ayad, a fait savoir, quant à elle, que l'approche éthique sera intégrée dans le programme de formation médicale, prenant effet à partir de la prochaine rentrée universitaire 2018/2019.
Pour les participants à cette rencontre, la proposition évoquée consolidera positivement le comportement des praticiens vis-à-vis de la situation douloureuse. Ils étaient unanimes à mettre aussi en évidence la dimension pluridisciplinaire de la prise en charge de la douleur (médicale, psychologique, juridique), tout en appelant à améliorer la démarche qualité de la pratique médicale.
Les mécanismes de la douleur sont divers, très complexes et en perpétuel changement. Elle s'exprime de façon très variée, en fonction des différences de perception, des émotions, de l'état d'esprit, mais aussi de l'éducation et de la culture, note le Pr Layadi. La douleur fait désormais partie des problèmes de la santé publique en Algérie, à l'instar des autres pays, avec toutefois certaines spécificités, explique le même spécialiste, citant l'absence d'unités de lutte contre la douleur dans la grande majorité des établissements de soins, qu'ils soient publics ou privés, et l'absence de personnels de santé formés à la prise en charge des malades en souffrance, comme principaux obstacle pour la prise en charge de la douleur. La législation sur les stupéfiants étant très contraignante rend par ailleurs toute prescription de médicaments psychotropes ou morphiniques des plus risquées pénalement pour les médecins et les pharmaciens, a-t-il noté. Selon le même spécialiste, la pénurie chronique de médicaments antidouleur dans les établissements de soins et dans les officines, en plus de la carence éthique chez les personnels de santé conjuguée à l'aléa déontologique, sont autant de facteurs qui entravent une prise en charge de la douleur.
Le Pr Layadi estime, en outre, que la loi sanitaire de 1985 encadrant la santé en Algérie, ne prévoit pas de cadre juridique garantissant une prise en charge appropriée de la douleur chez les patients, soulignant que le progrès médical dans ce domaine au cours des dernières décennies est fulgurant.
Pour le Pr Layadi l'éthique médicale dans le traitement de la douleur a besoin d'une exploration multidisciplinaire et d'une de réflexion commune pour constituer une synthèse susceptible d'être une plateforme pour des études approfondies à venir de cette question d'intérêt majeur.
A.B.
Vers la réorganisation de la formation paramédicale
De nouvelles mesures ont été prises dernièrement par le gouvernement au sujet des écoles de formation paramédicale programmées à être promues au rang d'établissements supérieurs, a annoncé récemment le ministre de la santé, parallèlement à l'élargissement des spécialités enseignées, de manière à les rendre conformes aux besoins des établissements hospitaliers.
Une décision a été prise à cet effet dans l'objectif de tenir une série de rencontres techniques avec les partenaires sociaux (syndicats du paramédical, entre autres) en vue de déterminer la vocation (spécialité) à donner à chaque école paramédicale, ainsi que ses missions. La formation de qualité dans le domaine des sciences médicales reste l'une des préoccupations principales du gouvernement, a relevé le ministre de la Santé. Hazbellaoui a précisé que le ministère de tutelle a le devoir d'assurer une formation de haute qualité tout en mobilisant toutes les conditions et moyens nécessaires pour accompagner les médecins résidants durant leur formation, non sans souligner l'importance du transfert du savoir et de l'expertise entre les générations (étudiants/professeurs).
A. B.
Médicaments à effets indésirables
Plus de 5 000 déclarations de traitements médicaux à effets indésirables sont enregistrées par an en Algérie, a indiqué la directrice du Centre national de pharmacovigilance et de matériovigilance (CNPM).
Pour le Pr Loumi-Mededjel Nadjet, depuis une dizaine d'années, le centre n'enregistrait que quelque 10 déclarations de traitements médicaux à effets indésirables, toutefois, «l'importante augmentation de ces déclarations est due essentiellement à l'évolution qu'a connue le domaine pharmaceutique en Algérie durant les dernière années». La signalisation de l'effet indésirable se fait par le pharmacien, le médecin, l'infirmier, les laboratoires ou l'utilisateur lui-même. A partir de là, on procède à des enquêtes, a-t-elle dit, signalant que c'est grâce à la notification qu'on peut se rendre compte que certains médicaments peuvent être assez dangereux.
Il faut qu'on soit sûr que le risque est beaucoup plus important que le bénéfice ».
Sur ce point, elle a relevé que le malade pouvait entrer en relation avec le centre des déclarations de traitements médicales à effets indésirables via notre site internet avec des fiches de déclarations en langues française et arabe simplifiées et aussi une page sur les réseaux sociaux.
Le CNPM est un établissement public à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre de la Santé.
Il a pour activités d'assurer la pharmacovigilance, la matériovigilance, la cosmétovigilance, la phytovigilance entre autre. Il s'attelle à la surveillance des effets indésirables des médicaments et des dispositifs médicaux et des appareils médicaux pour améliorer la qualité des actes thérapeutiques et diagnostiques.
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