Algérie

Le procureur de la CPI demande un mandat d'arrêt contre Kadhafi



Trois mois après l'éclatement de la révolte en Libye, le procureur de la Cour pénale internationale a demandé lundi aux juges de délivrer des mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, son fils Seif Al-Islam et le chef des renseignements libyens Abdallah Al-Senoussi. «Les preuves recueillies montrent que Mouammar Kadhafi a personnellement commandé des attaques contre des civils libyens non armés», a déclaré Luis Moreno-Ocampo, lors d'une conférence de presse à La Haye.

«Ses forces ont attaqué des civils libyens chez eux et dans des lieux publics, ont tiré des balles sur des manifestants, ont utilisé des armes lourdes contre des participants à des funérailles et placé des francs-tireurs pour tirer sur ceux qui quittaient la mosquée après les prières», a-t-il affirmé. Le leader libyen «a commis les crimes dans le but de préserver son autorité absolue», selon M. Moreno-Ocampo : «il compte sur son cercle rapproché pour mettre en oeuvre une politique systématique de suppression de toute de contestation à son autorité».

Le procureur a également demandé aux juges, dans une requête déposée lundi matin, de délivrer un mandat d'arrêt contre l'un des fils du colonel Kadhafi, Seif Al-Islam, «Premier ministre de facto» qu'il a accusé d'organiser le recrutement de mercenaires. La troisième personne visée par le procureur est le «bras droit» et beau-frère de Mouammar Kadhafi, Abdallah Al-Senoussi, qui est soupçonné d'avoir «personnellement ordonné certaines attaques». Le bureau du procureur de la CPI détient des documents «montrant que les trois ont tenu des réunions pour planifier et diriger les opérations», selon M. Moreno-Ocampo.

La demande de mandats d'arrêt «est un premier pas vers la justice», a réagi l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch. «Les civils libyens qui ont vécu un cauchemar méritent une réparation par un processus judiciaire indépendant et impartial. L'annonce d'aujourd'hui leur offre cette chance».

 Les persécutions se poursuivent, a assuré M. Moreno-Ocampo : «les forces de Kadhafi préparent des listes de dissidents présumés lesquels sont arrêtés, emprisonnés à Tripoli, torturés et finissent par disparaître». Les juges de la CPI peuvent décider d'accepter la demande, la rejeter ou demander au bureau du procureur des informations supplémentaires. Le Conseil de sécurité des Nations unies avait saisi le procureur de la CPI concernant la situation en Libye le 26 février, soit seulement deux semaines après le début de la révolte dans ce pays. Concernant les crimes commis au Darfour, le Conseil de sécurité avait saisi le procureur de la CPI deux ans après le début du conflit armé dans cette région du Soudan, en mars 2005.

 Et les juges avaient mis huit mois à délivrer un mandat d'arrêt contre le président soudanais Omar el-Béchir, demandé par le procureur en juillet 2008, qui est toujours en fonction. «C'est une affaire totalement différente», a estimé M. Moreno-Ocampo, selon lequel les crimes allégués en Libye ont été commis sur une période et un territoire plus petits qu'au Darfour. Les services du bureau du procureur ont mené 30 missions dans onze pays depuis l'ouverture de l'enquête le 3 mars et examiné plus de 1.200 documents.

Trois mois après le début de la révolte qui a fait des milliers de morts selon le procureur de la CPI, et poussé près de 750.000 personnes à fuir, selon l'ONU, le colonel Kadhafi est toujours au pouvoir et la Libye n'entrevoit pas la fin du conflit qui la déchire.

La CPI est le premier tribunal permanent chargé de poursuivre des auteurs de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide commis depuis 2002.




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