Le printemps et ses oiseaux...

Par une journée ensoleillée du printemps, tout près d'une rivière, un jeune garçon, issu d'un patelin pauvre de la Kabylie, tient une canne à pêche entre ses mains. Que peut-il bien pêcher alors que la rivière est à plus de cent mètres au-dessous de ses pieds ' Et puis, il y a un bon moment, les poissons ont déserté les lieux et il ne reste que des touffes d'herbes sèches, mélangées à la boue et aux algues flottant à la surface.Le garçon, l'air candide mais l'esprit aventurier, laisse pourtant pendre une plume d'oiseau accrochée à un hameçon au bout de sa canne à pêche, suspendue dans le vide. Il l'agite plusieurs fois de façon à faire du bruit et à attirer de l'attention autour de lui.
Mais pourquoi agit-il ainsi ' Pas question de tuer le temps à bayer aux corneilles ! Les oiseaux qui font leurs nids à cette époque de l'année, sont toujours en quête d'une plume soyeuse pour garnir leurs gîtes douillets, et c'est ainsi que, croyant happer une plume en vol, ils se font vite attraper et finissent dans la marmite. La cagnotte de la matinée se chiffre déjà à quatre charmants oiseaux, qui frétillent leurs ailes dans une petite cage, provoquant un mélange de fascination et d'empathie dans le c?ur d'un anonyme. Celui-ci s'approcha pour demander des explications au garçon sur cette étrange ruse qui l'a rendu curieux.
En fait, empruntant à la pêche à la ligne sa technique et ses attirails, le gamin est, paraît-il, tout simplement en train de prendre les oiselets «izferdhen», ainsi dénommés dans le parler local, qu'il a pu « pêcher » pour des poissons qu'il voulait vraiment pêcher.
Ne pouvant céder à sa vocation première de pêche des poissons dans une rivière presque asséchée, où par manque de pluie, tant d'alluvions s'étaient stagnées, il agrémente son temps perdu par sa seconde passion : les oiseaux. Ainsi, dans son esprit, il ne fait que calmer son plaisir et son amour pour la pêche des poissons, par le jeu avec les oiseaux, lesquels ont pourtant choisi d'atterrir aux alentours de cette rivière, réputée inaccessible.