Le canadien SNC-Lavalin, géant mondial de l'ingénierie,
a dû se séparer d'un de ses dirigeants en charge des pays du Maghreb. Les liens
«hors bilans» avec les deux régimes déchus de
Ben Ali et de Kadhafi ont été éventés et leurs ondes ont fini par affecter les
résultats 2011. Rebondissements.
ary Peters,
ancien soldat australien, patron d'une société de sécurité privée basée en
Ontario, un des responsables de la fuite de Saadi Kadhafi vers le Niger, s'est
livré la semaine dernière à un interrogatoire de près de cinq heures mené par
des enquêteurs de l'Agence des services frontaliers du Canada, au bout
desquelles il a nié catégoriquement toute implication financière de SNC-Lavalin et de l'ancien responsable de SNC-Lavalin en Afrique du Nord, Riadh
Ben Aïssa, dans la mission qui a permis la fuite du
fils du dictateur déchu vers le Niger.
«Tout ce que je peux dire, c'est
qu'une partie de la mission a été payée par des individus en Libye, mais que la
majorité a été payée par des individus en Europe», précise Gary Peters en
soulignant que SNC-Lavalin n'a financé que la
«mission d'établissement des faits» menée par Cynthia Vanier
en juillet 2011 auprès de qui il a été engagé pour assurer sa sécurité sur le
territoire libyen.
Riadh
Ben Aïssa dirigeait les activités de la firme
québécoise en Afrique du Nord à partir de ses bureaux basés à Tunis. A la fin
du mois d'août, Gary Peters s'était rendu dans la capitale tunisienne où Riadh Ben Aïssa l'avait accueilli.
En parlant de monsieur Ben Aïssa, Gary Peters affirme
: «Il m'a hébergé là-bas, nous avons eu des rencontres et il a payé pour que je
rentre à la maison par la suite… Il n'était pas question d'extraire Saadi
Kadhafi de Libye. Cela a été soulevé au cours de la conversation, mais ce n'était
pas le sujet».
La Libye de Kadhafi et SNC-Lavalin, c'est une histoire vieille de 25 ans. En 2011,
les projets libyens représentaient près 7% du carnet de commandes totales du
géant de l'ingénierie, soit quelque 934 millions de dollars. Au début de
l'insurrection, la firme a dû, par conséquent, annuler de son carnet de
commandes ses projets libyens. En 2010, les revenus de SNC tirés de ses
contrats en Libye étaient évalués à 418,2 millions de dollars, soit 6,5% du
chiffre d'affaires total.
VERS UN RECOURS COLLECTIF DES ACTIONNAIRES
Lundi, 5 mars, l'entreprise annonce sur son site Internet avoir appris
qu'une requête avait été demandée auprès de la Cour supérieure du Québec par le cabinet
d'avocats Siskinds, au nom des actionnaires ayant
acquis des valeurs mobilières de la
Société entre le 13 mars 2009 et le 28 février 2012, pour
exercer un recours collectif qui s'élèverait à 250 millions de dollars pour
diverses déclarations «inexactes ou trompeuses, ayant trait au code de conduite
de la firme, à son cadre de conformité légale et à ses mesures de contrôle interne».
Ces allégations concerneraient notamment les informations diffusées par
l'entreprise, durant la période visée par le recours, et qui ont trait à la
participation de hauts responsables de SNC dans des activités «illicites» en
Libye.
Mardi, 28 février, SNC annonce une
enquête interne sur «des charges d'environ 35 millions de $ pour la période
relative à certains paiements effectués au quatrième trimestre de 2011, qui
avaient été documentés à l'égard de projets de construction auxquels ils ne se
rapportaient pas et qui devaient donc être comptabilisés à titre de charges au
cours du trimestre». Des paiements louches qui «ressemblent à une fraude
réalisée par des gens qui avaient un certain niveau d'autorité chez SNC-Lavalin», affirme l'expert-comptable, Michel Magnan, rapporté
par le journal québécois La
Presse. Le géant québécois annonce du même coup une perte de 23
millions de dollars attribuée à ses projets en Libye. Selon la CBC, le réseau de télévision
canadien, les mystérieux paiements de 35 millions sont liés aux projets de SNC-Lavalin en Libye. Cette information, sans preuve, proviendrait
d'une lettre anonyme envoyée à SNC en décembre dernier faisant état de
pratiques commerciales criminelles.
DES PREVISIONS DE 2011 EN BAISSE DE 80 MILLIONS DE $
Ces deux éléments feront l'objet d'une révision des états financiers du
Groupe qui revoit ses prévisions de 2011 avec une baisse de 80 millions de $, soit
de 18%. Cette annonce a fait chuter de 20% le prix de l'action de SNC à 38,43
$, son niveau le plus bas depuis mai 2009.
L'évolution de cette affaire, depuis
un mois, ne rétablit aucunement la réputation de SNC-Lavalin
déjà entachée par ses liens avec les régimes de Ben Ali et de Kadhafi. Rappelons
que 13% des revenus de la firme provenaient, en 2010, du continent africain et 6%
du Moyen-Orient. L'entreprise est présente en Algérie depuis 1970 où la Société était notamment
chargée de la construction du Makam el-chahid et de la réalisation de projets avec la Sonatrach.
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Posté Le : 13/03/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Hanafi Tessa : De Montréal
Source : www.lequotidien-oran.com