Algérie

Le président de la FOREM l'affirme: Il n'y a pas de société civile en Algérie



? En Algérie, «il n'y a pas de société civile». C'est ce qu'a affirmé, hier, mardi à la Radio nationale le professeur Mustapha Khiati, président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (FOREM). Il a expliqué que «l'Etat a toujours fait que la société civile soit une sorte de clientèle», soulignant que «la loi de 1990, qui a permis la création des associations a été restrictive, et celle de 2012 l'a été encore plus».Sur le nombre réel des associations, il a estimé qu'il y a «un problème de statistiques : on parle de 100.000 associations, 10.000 nationales et 90.000 régionales ou locales de wilayas, mais on s'aperçoit que le gros problème est celui du financement de ces associations, qui n'obéit à aucun critère, il a été toujours opaque». «Les gros ministères qui financent ces associations, notamment, la Solidarité et la Jeunesse parce qu'il y a le fonds de la jeunesse, et l'Environnement avec le fond de l'environnement, n'ont jamais fait un appel à projet, il n'y a pas eu de cahier de charges, et donc il y a un groupe d'associations clientes qui sont financées». «C'est pour cela qu'il n'y a pas un impact réel sur le terrain, et même pour les dons de l'étranger, il y a un contrôle strict», a-t-il dit, affirmant que «le ministère des Finances ne joue pas vraiment le jeu, il bloque systématiquement ces financements sans aucune explication». Sur le nombre réel des associations agréées, qui seraient au nombre de 81.000, il a estimé que «ce sont des chiffres globaux. Je reproche au ministère de l'Intérieur de ne pas avoir mis en place une base de données accessible à tous sur les associations», ajoute-t-il, précisant qu' «on ne sait pas trop qui fait quoi». «Et quand vous essayez d'analyser un peu les 81.000 ou 85.000 associations, vous vous rendez compte qu'il y a d'abord pratiquement 18.000 à 20.000 associations, qui sont des comités de construction de mosquées, ensuite vous avez les associations sportives, qui représentent à peu près également 20.000, mais les associations qui agissent sur le terrain, qui interviennent dans l'humanitaire, il y a peut être un millier, 1.200 ou 1.500, on ne sait pas, on n'a pas de chiffres. Donc c'est une autre opacité, il y a l'opacité du financement et l'opacité de la réalité sur le terrain, et on n'a pas d'éléments aujourd'hui». Il relève, d'autre part, une autre anomalie, celle de «la loi de 2012 qui exige un bilan, tous les trois ans, avec changement de bureau. Mais il n'y a pas eu de bilans. Il y a un problème au ministère de l'Intérieur». Selon M. Khiati, «il y a des associations qui attendent des mois pour avoir une réponse à leur demande». En outre, il estime qu' «il n'y a jamais eu de volonté pour qu'il y ait une société civile forte en Algérie, et c'est un constat que l'on peut faire». «Malheureusement, on a tout fait pour marginaliser, limiter les actions des associations, et à chaque fois qu'une association a voulu prendre des initiatives qui dérangent, il y a eu automatiquement des restrictions, des refus», explique-t-il. Et donc pour le président de la FOREM, «il y a un problème réel d'acceptabilité de cette société civile».
«Depuis le 22 février, il y a eu des espoirs immenses, nous aspirons tous à cette deuxième république, plus libérale. Nous espérons qu'elle répondra à toutes les aspirations», poursuit le Pr Khiati, selon lequel «la société civile constitue un passage obligé pour l'Etat, on ne peut faire de politique sociale sans avoir affaire à la société civile, et on est obligé de passer par les intermédiaires qui transmettent les aspirations de la société. C'est un paramètre de démocratie». Appelant au renforcement «du tissu des associations», il a déploré l'absence de «la culture d'association : il n'y a pas de culture d'associations car il n'y a pas eu d'effort dans ce sens, les associations ont été réduites à leur plus simple expression. Espérons que la deuxième république puisse permettre une métamorphose de ces associations». Sur le rôle de la société civile dans le mouvement des réformes, il a expliqué qu'il faut «d'abord faciliter la création d'associations et qu'elles comprennent leur rôle. Aujourd'hui, il y a une chape de plomb sur ces associations». Or, explique-t-il, «un décret de la loi de 1990 prévoit l'utilité publique (pour la création d'associations), ce concept n'a été donné qu'à deux associations : les Scouts et le Croissant-Rrouge algérien». «Il faut revoir tout cela», a-t-il préconisé, avant de relever que «les gens qui élaborent les textes des associations ont l'esprit policier. Il faut qu'ils comprennent que les associations ne sont pas des gangs, et donc il faut un accompagnement de ces associations». Pour lui, «l'encadrement est défectueux, et les textes, eux-mêmes, sont pleins d'ambiguïtés», avant de relever qu' «il faut qu'il y ait des textes clairs, simples qui permettent à un groupe donné d'avoir une association». «Les associations pourraient jouer le rôle d'intermédiaire entre les masses et les responsables, et cela dans toutes les parties du pays, mais ce rôle n'a pas été compris par l'administration, ce qui explique les débordements dans la rue et les stades».
Pour le président de la FOREM, « il y a des problèmes de perception du rôle de l'association qui est restrictif dans notre pays».


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