Algérie

Le président de la Commission d'enquête parlementaire: «L'Etat subventionne la pâtisserie »



« Entre 40 et 50% du circuit commercial est dominé par l'informel». Cette estimation émane de Kamel Rezgui, président de la Commission d'enquête parlementaire sur la pénurie et la hausse des prix des produits alimentaires de large consommation. Ce dernier, qui s'exprimait hier sur la radio de la chaîne 3, a parlé de «grands dysfonctionnements » dans le circuit commercial, notamment en ce qui concerne le segment de la vente en gros. « Les dispositifs de contrôle de l'État existent, mais ils ne sont pas efficients. Le marché informel occupe une grande place », note-t-il. « La pratique de la facturation et du paiement par chèque est inexistante », souligne-t-il, appelant le gouvernement à réintroduire l'obligation du paiement par chèque, mesure qui a été différée après les émeutes de janvier dernier. M. Rezgui appelle le gouvernement à renforcer davantage la lutte contre l'informel. La Commission d'enquête parlementaire a remis son rapport à l'APN et a eu l'aval des députés pour le rendre public. Ce qui a été fait. Tout en affichant un satisfecit sur l'aspect qu'il qualifie d'«inédit» des conclusions de sa commission, M. Rezig se dit «réjoui» sur le fait que «quelques-unes de ces recommandations sont déjà prises en charge par l'exécutif ». Ce député affirme que la commission qu'il préside réclame «la révision de certaines dispositions, notamment en matière de subventions». Le président de la Commission d'enquête parlementaire a vivement critiqué le système de soutien en vigueur des produits de large consommation. « On doit opter pour un système de subvention qui ciblerait les classes démunies », dit M. Rezgui. Bien avant cette commission parlementaire, le ministre du commerce, Mustapha Benbada, avait émis en avril dernier son souhait de revoir le dispositif de subvention qui devrait profiter aux démunis. Le ministre dit souhaiter un système de subventions ciblées devant profiter aux ménages à revenus modestes. Le soutien des produits de première nécessite coûte à l'Etat entre 250 et 300 milliards de dinars chaque année. Le rapport de la commission parlementaire recommande la libération des prix des produits subventionnés (lait, céréales, sucre, huile) et le versement de l'argent nécessaire pour couvrir le budget de consommation des produits de base aux ménages démunis. « Il faut établir un fichier national des démunis. Ce n'est pas normal de vendre le lait au même prix pour le riche et le pauvre. L'État soutient les yaourts et les pâtisseries ! Ce n'est pas normal de soutenir les prix pour tout le monde», déplore M. Rezgui.

Sur un autre volet, l'invité de la radio déplore l'absence d'une cellule de veille des cours des produits de base sur les marchés mondiaux. «Nous achetons pour une valeur de 50 milliards de dollars par an et nous n'avons aucune instance de veille qui permettrait d'acheter à des prix avantageux à l'étranger», regrette-t-il. «Nos offices publics (OAIC et ONIL) n'achètent pas au moment opportun», critique-t-il.

M. Rezgui lance un appel au gouvernement afin que ce dernier mette en place en urgence le Conseil de la concurrence. «Les prérogatives du ministère du Commerce ont été transférées à ce conseil qui ne fonctionne pas encore. Nous avons relevé des situations de dominance qui n'auront plus de raison d'être une fois le Conseil de la concurrence fonctionnel», explique-t-il. Et de souligner que la situation de dominance (supérieure ou égale à 40 % du marché) n'est pas interdite par la loi de la concurrence de 2003, mais son recours abusif l'est en revanche. « Qui visez-vous ? ». A cette question posée par l'animatrice de l'émission, l'invité de la rédaction, M. Rezgui, a eu cette réponse: «La commission ne vise personne. Elle plaide tout simplement pour l'encouragement de l'investissement dans les filières où il ya une tension et le lancement du Conseil de la concurrence pour lutter contre les situations de dominance et la pratique du dumping». La mission de la Commission consistait tout simplement, poursuit-il, à enquêter sur les causes de la pénurie grave des produits alimentaires de large consommation. L'invité de la radio note l'absence de l'État dans les filières du sucre et de l'huile. «Pour le lait et les céréales, l'État peut réguler via les offices publics. Pour le sucre et l'huile, il faut que l'État intervienne pour éviter les tensions, à l'image de celle ayant prévalu en janvier dernier», relève-t-il.




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