Deux manifestants ont été tués dimanche, à Khartoum et deux autres à Oumdurman, ville-jumelle qui lui fait face sur l'autre rive du Nil, lors des manifestations de milliers de Soudanais contre les autorités militaires dirigées par Abdel Fatah al Burhane.Ces morts ont été confirmées par l'ancien ministère de la Santé - officiellement dissous - et le Comité central des médecins du Soudan (CCSD). Au total, ce sont 56 victimes qui sont à déplorer, depuis que les milliers de citoyens soudanais ont envahi les rues des principales villes du pays pour exiger l'instauration d'un pouvoir civil. Dimanche, également, on apprenait que le Premier ministre Abdallah Hamdok, arrêté puis relâché par les dirigeants militaires qui ont conclu avec lui un deal, voici un mois, a choisi de démissionner.
Figure civile de la transition dominée par al Burhane et ses pairs, Hamdok avait apporté sa caution à une démarche rejetée par les manifestants qui ont fini par le conspuer, ces dernières semaines, au même tire que al Burhane. Sans doute, le fait que la journée de dimanche a encore été meurtrière a-t-il pesé dans la balance, Hamdok ayant appelé, en vain, à cesser l'effusion de sang. Son départ, prévisible, laisse les généraux soudanais seuls aux commandes du pays. Il a expliqué, dimanche soir, à la télévision avoir «tout tenté» pour sauvegarder un processus de transition militaro-civil. Prenant acte de son «échec», il a mis en garde contre les graves dangers qui pèsent sur la «survie» du Soudan.
De fait, la situation est, tout à la fois, complexe et explosive, dans la mesure où les forces politiques, issues de 30 années de dictature militaro-islamiste de Omar el Béchir, s'avèrent «trop fragmentées» et que le fossé entre les attentes des civils sont en rupture avec celles des militaires.
Ce qui rend aléatoire le projet d'une démarche commune. En d'autres termes, les paramètres qui caractérisent la situation géopolitique actuelle sont tels que toute prédiction d'une sortie de crise, dans les mois qui viennent, relèverait de la pure spéculation. Si Abdallah Hamdok a pu recouvrir la liberté physique, d'autres responsables civils, parmi lesquels des membres du gouvernement dissous, sont toujours détenus dans des lieux «inconnus». L'ancien équipage de la transition, mise en place au lendemain du putsch de 2019 qui a emporté el Béchir, devait amener le Soudan à des élections générales et libres, les premières depuis trois décennies, ainsi qu'à la restitution du pouvoir aux civils.
Contraints et forcés de sacrifier l'un des leurs, Omar el Béchir, les militaires ont vite tourné casaque: al Burhane s'est octroyé deux années supplémentaires à la tête de la transition, rappelant Hamdok à la barre d'un gouvernement qui n'a jamais vu le jour, après avoir expurgé le Conseil de souveraineté de tous les partisans d'un régime civil. Le fait est que, désormais, les deux camps pratiquent un dialogue de sourds, leur cordon ombilical, discrédité et démissionnaire, ne pouvant plus assurer une négociation.
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Posté Le : 04/01/2022
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Chaabane BENSACI
Source : www.lexpressiondz.com