Algérie

Le premier f'tour collectif interdit à Alger



Sans le faire directement, le ftour, prévu vendredi soir à Alger, a été interdit de manière insidieuse ; les places où il était prévu ont été occupées par des policiers.Si l'acte XII de l'imposante marche populaire dans le Grand-Alger contre le système en place a essentiellement été marqué par son succès et son caractère pacifique, contrairement aux attentes du pouvoir qui misait sur l'essoufflement du mouvement, le premier f'tour collectif (rupture du jeûne) prévu, vendredi soir, par les Algérois à la place Maurice-Audin et sur l'esplanade de la Grande-Poste, a été interdit par les pouvoirs publics. Juste après la marche et le départ des centaines de milliers de manifestants, des centaines de policiers ont été déployés aux alentours d'Alger-Centre pour occuper les lieux, sapant ainsi l'initiative citoyenne lancée sur les réseaux sociaux pour couronner l'acte XII de la mobilisation populaire.
Selon nos sources, les services de sécurité avaient tablé sur la présence de plus de 9 000 citoyens venus de toutes les wilayas du pays, alors que les organisateurs avaient préparé entre 400 et 500 couverts pour les besoins des jeûneurs, et ce, en sus des centaines de familles qui voulaient offrir le f'tour aux passants et aux manifestants qui s'étaient joints à cette action tant humanitaire que mobilisatrice. Car, outre son caractère solidaire, ce f'tour collectif se voulait une manière de maintenir la mobilisation populaire et d'improviser des marches et des débats en nocturne pour se réapproprier davantage les espaces publics. D'ailleurs, ce n'est que vers 20h que le dispositif de sécurité a été levé, et ce, contrairement aux manifestations précédentes où le même cordon sécuritaire partait à 18h. Devant cet état de fait, des centaines de manifestants ont investi la rue dès 21h pour exprimer leur rejet du système politique en place et afficher leur détermination à aller jusqu'au bout. Visiblement fatiguées en ce 12e vendredi consécutif, qui coïncide, par ailleurs, avec le premier week-end du mois sacré du Ramadhan, les forces de sécurité ont dû revenir sur les lieux pour disperser les manifestants dans le calme sur l'esplanade de la Grande-poste, alors qu'à la place Maurice-Audin, point de chute des manifestants, seul un dispositif de sécurité classique a été maintenu pour réguler la circulation routière et interdire les stationnements anarchiques.
Les observateurs s'interrogent, à bien des égards, sur le caractère prohibitif de cette interdiction, alors que les Algérois ont, de tout temps, marqué ce mois sacré par des élans de solidarité en direction des passants et des voyageurs. Bien plus, même les services de sécurité ont, depuis quelques années, installé des khaïmas sur les axes routiers de la capitale pour accueillir les jeûneurs à l'heure du f'tour. Mieux encore, depuis quelques années, l'Assemblée populaire communale (APC) d'Alger-Centre s'était, elle aussi, approprié les espaces publics pour offrir, à l'heure de la rupture du jeûne, des centaines de plats chauds aux citoyens de la localité et aux personnes qui transitaient par la capitale. À moins que les pouvoirs publics, otages de leur nostalgie et dépositaires d'un populisme éphémère, n'acceptent pas de faire face à la déferlante citoyenne qui met à nu des pratiques loin d'être innocentes et optent pour l'interdiction en substituant un f'tour collectif citoyen à un f'tour collectif? policier. Une chose est sûre, les manifestants ne comptent pas baisser les bras et se donnent rendez-vous pour le 13e vendredi.

FARID BELGACEM


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