La présente
croisière sur l'océan mondial de l'information a démarré le 10 février 2010.
Nos escales ciblées sont les ports, sites Internet des institutions régaliennes
algériennes.
A tribord ou à
bâbord, nos vagues sont calmes. Faut-il rappeler que le séisme de mai 2003 a eu raison du câble
ALPAL1 qui nous relie au reste du monde, et depuis c'est ALPAL2, malgré des
débits faibles, qui est devenu notre tuyau numérique. Notre propos est de tirer
les portraits succincts des sites visités. Ces derniers étant notre vitrine
électronique mondiale.
L'espace
électronique institutionnel
Le site Internet
de la présidence de la République : un front-office dépouillé sur lequel les
libellés sont trilingues à droite, bilingues à gauche. Une très belle
calligraphie arabe. Tamazight étant constitutionnalisé via l'article 3.1 bis,
quelques caractères en Tifinagh lui auraient donné un peu plus de visibilité
officielle. Après avoir opté pour la langue française comme interface de
communication, le lien «l'actualité» met en avant le sulfureux mégaprojet
«autoroute Est-Ouest». La visite virtuelle des institutions du pays est
possible par le lien éponyme. En choisissant « Le Gouvernement», un tableau sur
quatre colonnes affiche le libellé de la fonction pour l'institution, le haut-responsable
qui en assure la charge et dans les deux autres colonnes, des numéros de
téléphone. Le ministre d'Etat, représentant personnel du Chef de l'Etat,
Abdelaziz Belkhadem et le Secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé
de la communication Azzedine Mihoubi ne sont pas joignables ni par téléphone,
ni par télécopie. La 1ère colonne de ce tableau indique le portefeuille et fait
office de lien vers son site Internet.
Une institution régalienne, le Ministère de
l'Intérieur et des Collectivités Locales n'est pas cliquable, ce qui laisse
supposer qu'elle ne dispose pas de site. Et pourtant si. Est-ce juste un
problème de mise à jour ? Sa visite, dans une esthétique très moyenne, montre
des barres de menus horizontaux et verticaux sous forme d'accordéons. Les
différents liens renvoient à des textes de lois, au projet présidentiel sur la
réconciliation nationale et autres. L'information est présentée dans un slide
(diapositive) au-dessus des projets nationaux du secteur. Le projet de
modernisation du système d'informations est l'occasion, peut être idoine, pour
insuffler une dynamique résolument moderniste à l'e-gouvernance en général.
Le projet de passeport biométrique et surtout
la carte nationale d'identité biométrique électronique et sécurisée (CNIBES)
sont l'occasion pour une mise à jour efficiente de l'état civil et la mise en
Å“uvre d'autres services électroniques.
L'autre institution régalienne visitée est
celle indiquée par le lien «Ministre de la Justice, Garde des Sceaux». Un site, mieux
encore, un portail dense dans sa page d'accueil. Des menus et sous menus
horizontaux facilitent la navigation. La colonne centrale est dédiée aux
différentes activités, celle de droite aux nouveautés et à l'information du
justiciable. Ce site brille par l'abondance de l'information mise à la
disposition des visiteurs électroniques. Toutes ces informations sont indiquées
au moyen de liens clairement libellés. L'absence du «forum» dans cette version,
alors qu'il était opérationnel précédemment, et la jurisprudence du Conseil
d'Etat sont à déplorer.
Un service récurrent auprès des cours est la
délivrance du casier judiciaire. Il est disponible au moyen d'un formulaire
clair et simple. L'analyse de l'opérabilité de ce service électronique à partir
d'un point de présence sur Internet auprès d'une cour pour solliciter ce
document vaut la peine d'être fait, même si d'aucuns diront que c'est un
progrès à reculons dans la mesure où les timbres fiscaux exigés sont
introuvables que ce soit au niveau des tribunaux ou des bureaux de poste.
En quoi cette
analyse est intéressante ?
D'un point de vue
macroscopique, il mettra à l'épreuve la synergie qui doit exister entre
plusieurs départements ministériels. D'un point de vue périscopique, il révélera
les blocages et imperfections au niveau de chaque module de l'infrastructure
qui le concrétise. Au niveau microscopique, ce test permettra à la cour de
Tiaret de mettre en Å“uvre toutes les procédures pour éviter ces petites choses
qui gâchent la vie : imprimante en panne, manque de papier, absence du
magistrat…etc.
Un aperçu sur les
aspects sensibles et sujets à débats sous-tendus par cette demande
Deux angles :
technique et juridique. Le premier est en rapport avec tout ce qui est
téléinformatique et données. Le second touche l'identité numérique. Pour le
premier : cette demande montre que des informations à caractère confidentiel
sont stockées dans des bases de données dans des installations informatiques,
l'ensemble abrité dans des locaux. Cette configuration exige une sécurité
permanente et un personnel conséquent, motivé et maintenu dans un cycle de
perfectionnement continu. Pour le second : il est juridique et porte sur
l'identité. Quel est l' «Ijtihad» nécessaire pour la validation de l'identité
numérique au moyen d'une adresse électronique ?
Ce service offert, par le ministère de la
justice est un exemple parmi tant d'autres à l'instar des mouvements financiers
électroniques, qui peut être la base d'une réflexion sur les lois et règlements
qui doivent encadrer, dans ce cas, l'identité numérique et par extension la
valeur juridique d'une adresse IP. Une réflexion qui accompagne le progrès. Qui
ne le freine pas.
Le lien «Ministre des Affaires Étrangères» sur
le site de la Présidence
met le cap sur cette autre institution régalienne.
Plus modeste que le précédent. En plus des
lieux communs des sites web de ce type qui portent sur la vie et le parcours du
titulaire du poste, les inévitables organigrammes, les attributions et missions
; il y a des liens sur les relations de coopérations et les tant convoités
postes à l'étranger ; quelques liens pour la solidarité très virtuelle avec les
palestiniens. Dans la colonne centrale, sont indiqués les aspects nationaux
susceptibles d'attirer les investissements étrangers (IDE). Ces liens
déroulants sont présentés dans un format relativement triste. Dans la colonne
de droite, un gros pavé bricolé concerne l'élection présidentielle de 2009.
Pour clôturer ce tour des institutions
régaliennes, une visite du site de la
Banque d'Algérie. De belles couleurs pour une conception
basée sur un modèle en calques, frames en anglais. Au milieu du paquet de
boutons en français, un est en anglais : «Who is Who». Une page d'accueil pour
les liens classiques sur l'organisation, l'organigramme, les missions et
quelques repères historiques qui renvoient à des batteries de lois et de
décrets. Pour l'exemple, son acte de naissance, sous les «youyous» de
l'Assemblée constituante, date du 13 Décembre 1962 et porte le numéro 62-144.
Ce site a le mérite de poser certains des problèmes cruciaux qui affectent, la
manipulation et l'actualisation des contenus virtuels. Dans un paragraphe, il
est écrit : «Les textes, informations et données chiffrées figurant sur ce site
peuvent…être altérés pour diverses raisons indépendantes de la Banque d'Algérie. Il est
rappelé…que seuls les documents écrits de la Banque constituent la référence.». En regard de
cette vérité, il rappelle l'opacité dans laquelle baignent les vrais chiffres
de la dette par exemple, sème le doute sur la transcription de ses documents
dans ces conteneurs et par conséquent la fiabilité de l'administration du site.
Deux autres observations : l'arme de guerre des banques centrales est le taux
directeur, le nôtre est invisible. Le bouton «contactez nous» n'est pas
fonctionnel.
Une particularité de tous ces sites : les fils
d'informations Rss ou Atom ne sont pas prévus, les chartes graphiques ne sont
pas du tout respectées, excepté dans le portail de la justice. Ce tour montre
que les structures chargées des technologies de l'information et de la
communication (TIC), de la conception et développement de contenus sont les
parents pauvres de ces institutions ; que nous sommes loin de ce qui se fait
dans les TIC; que notre pays demeure un marché extrêmement juteux pour les
puissances dans ce domaine.
Il prouve aussi que l'Algérien n'est pas cet
«individu-type» du système d'informations national pour l'e-gouvernance, que
des efforts colossaux sont à faire pour que notre pays devienne «n'tic».
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Posté Le : 04/03/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Cherif AISSAT
Source : www.lequotidien-oran.com