Algérie

Le pouvoir personnel est né en 1962



Hasard du sort, Ahmed Ben Bella, premier président de la République algérienne, décède en cette année symbolique marquant un demi-siècle de l'histoire d'une Algérie qui aurait pu àªtre autre si une certaine conjuration «armée des frontières-Ben Bella» ne s'était pas faite. S'il est de l'ordre de l'impossible de refaçonner l'histoire, il est toutefois utile de dire ce qui fut et ce qui a été. Telle est la règle de l'histoire, même en période de deuil. Les ambitions personnelles avaient pris le pas sur la concrétisation des promesses du 1er Novembre et du Congrès de la Soummam. L'Algérie démocratique n'a pas été au rendez-vous et l'opposition a été réduite au silence dès l'été 1962. Le pouvoir autocratique s'est installé par la force et fit rater au pays la chance de prendre le train de la démocratie et du progrès. Un coup de force qui donna lieu à  d'autres coups de force, en devenant l'expression majeure de l'exercice du pouvoir. Le cinquantenaire de l'indépendance sonne l'heure des bilans. Un bilan qui prend son départ un certain mois de juillet 1962, et donc avec l'installation de Ben Bella à  la tête d'un Etat violé à  la naissance. Il fit lui-même les frais, en 1965, de ses «bonnes alliances» avec ceux-là mêmes qui, aujourd'hui, l'enterrent avec toute la solennité réservée aux funérailles des chefs d'Etat. Le culte du secret, de l'amour du pouvoir et le modèle conspirationniste furent les maîtres mots de cette alliance dont ne bénéficiera point le nouvel Etat indépendant qui était avide de liberté, de paix et de développement. Censure, exécutions sommaires, culte de la personnalité, centralisation des pouvoirs, emprisonnement des opposants, torture, identité nationale bafouée, fraudes électorales… des pratiques, pour ne citer que celles-là, qui signèrent l'identité d'un pouvoir autocratique de 1962 à  nos jours. Hier même, les journalistes ont été interdits de couvrir l'enterrement de Ben Bella. C'est dans l'ordre des choses disent certains, tel est le bilan de ces 50 ans d'atteintes à  la liberté d'expression. Ahmed Ben Bella vint au pouvoir dans un comité restreint et c'est parmi ce comité qu'il sera enterré, non loin de la tombe de Houari Boumediène, celui qui l'éjecta du pouvoir et le jeta en prison un 19 juin 1965. Le parcours de militant et de président d'Ahmed Ben Bella fut intimement lié à  celui de l'histoire de la lutte de libération de l'Algérie, ceci est indéniable ; mais il est des travers qui ternissent ce parcours et qu'on ne saurait effacer d'un simple coup de gomme, par respect pour le défunt. Dire la vérité, c'est aussi une marque de respect et un devoir envers l'Algérie et l'opinion, qui se refusent à  l'émotion préfabriquée d'un pouvoir, en ce cinquantième anniversaire de l'indépendance, invocateur de bilan et de justice. Les voix de ces Algériennes et Algériens criant «liberté» en 1962 après avoir eu raison d'une des pires formes de colonisation continuent de résonner et réclament à  ce jour d'être écoutées. Les âmes de ces valeureux patriotes assassinés pour s'être opposés à  la manière dont les affaires du pays furent gérées réclament justice pour cette terre, lasse des afflictions que lui causent ses dirigeants. L'Algérie mérite un meilleur avenir que de continuer de perpétuer 50 années de dictature. 


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