Avec la montée en puissance des groupes terroristes aux frontières algériennes, la notion de sécurité intérieure prend aujourd'hui, dans le pays, un tout autre sens : le péril ne vient pas d'une force conventionnelle, mais d'un faisceau de groupes destructeurs hétérogènes mus par la seule volonté commune de détruire l'Etat et de soumettre la société à ses lois.L'armée l'a compris, elle s'est vue contrainte de se déployer sur des milliers de kilomètres de frontières, alors même qu'elle garde sa vigilance à l'intérieur du territoire national où sévissent toujours les terroristes d'AQMI, eux-mêmes débordés par ceux du Daech et de Boko Haram.Mais le fardeau est trop lourd pour l'institution militaire comme pour l'Etat, contraints de mobiliser d'importantes ressources financières destinées à l'armement alors même que le pays traverse une crise financière des plus graves du fait de l'effondrement des prix du pétrole. Et c'est la société qui doit servir d'appoint, voire d'alliée de l'armée et de l'Etat.Un des atouts pour l'Algérie est que, entre la société et l'armée, il n'y a pas de conflit, voire de contradiction majeure. Il y eut osmose durant la guerre de Libération nationale et forte complémentarité durant la décennie 1990 : la résistance populaire au terrorisme prolongeait l'engagement des militaires contre ce fléau. Le soutien des Algériens aux actions militaires destinées à neutraliser les groupes terroristes a toujours été franc et puissant, comme en témoigne l'immense élan de sympathie né au moment de l'assaut des forces spéciales de l'ANP contre les preneurs d'otages de la base gazière de Tiguentourine.Mais l'implication de la société est fortement contrariée par le pouvoir politique qui n'a pas su ? ou voulu ? mener une grande politique d'unité nationale en mesure de dégager un véritable front intérieur. S'agissant de la lutte contre l'intégrisme religieux, le régime Bouteflika a toujours été ambigu.Le Président avait avoué un temps «comprendre» le combat des terroristes. Avec les anciens du FIS, il a amorcé une stratégie de «rapprochement» en droite ligne de sa politique de réconciliation nationale qui fait la part belle aux bourreaux d'hier du peuple algérien. Mais plus fondamentalement, le pouvoir a refusé aux Algériens ce qu'il y a de meilleur dans le monde, ce qui est la panacée contre tous les périls : la démocratie. Parce qu'elles l'ont compris depuis des lustres, les nations développées l'utilisent à volonté pour se protéger.En Algérie, le tableau est noir en matière d'avancées démocratiques : la classe politique est profondément divisée entre les partisans du pouvoir et une opposition éclatée, se cherchant encore, ne rencontrant qu'hostilité et mépris du régime.Les revendications citoyennes des populations butent sur la même attitude. Il a fallu que coule le sang de 120 jeunes pour que la revendication amazighe puisse en partie être satisfaite. Les Mozabites payent le prix le plus lourd des inconséquences et des ambiguïtés du pouvoir, incapable de rétablir la paix entre les communautés.Toujours dans le Sud, il a fini par opposer une fin de non-recevoir au rejet massif de l'exploitation du gaz de schiste par les habitants. Quant à la liberté d'expression, elle se réduit partout et de jour en jour : la société civile est contrainte d'affronter les forces de l'ordre et la justice pour se faire entendre. De ce déficit démocratique tirent profit les groupes terroristes qui encerclent et harcèlent le pays. Et aussi tous ceux qui se revendiquent de la mouvance FIS, repentis, exilés ou tapis dans l'ombre, prêts à prendre leur revanche sur l'histoire et la société.
Posté Le : 22/02/2015
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Ali Bahmane
Source : www.elwatan.com