Peu de gens connaissent l’histoire glaçante du poignard oublié par Jean-Marie Le Pen dans une maison de la Casbah d’Alger, dans la nuit du 3 mars 1957. Cette arme, marquée par l’atrocité, a été utilisée lors de la torture et de l’exécution d’Ahmed Moulay, un père de famille de 42 ans, sous les yeux terrifiés de son épouse et de leurs six enfants.
Cette nuit tragique, alors que Le Pen et ses hommes achevaient leur macabre besogne, ils laissèrent derrière eux le poignard, symbole de leur barbarie. Ahmed, le fils aîné de la victime, alors adolescent, eut le courage de le récupérer et de le cacher. Pendant quarante ans, il conserva cette pièce à la fois témoin et preuve de l’horreur, jusqu’à ce qu’il décide de la confier à la journaliste Florence Beaugé.
C’est grâce au travail rigoureux de Florence Beaugé, journaliste au Monde, que l’histoire de ce poignard est sortie de l’ombre. Florence, après avoir retrouvé Ahmed Moulay, recueillit son témoignage bouleversant. Ahmed lui relata comment, avec sa mère et ses frères et sœurs, il avait assisté à la torture brutale de son père, puis à son exécution. La journaliste emporta le poignard en France, mais cette démarche ne passa pas inaperçue. Jean-Marie Le Pen, furieux, intenta une action en diffamation contre Florence Beaugé et le journal Le Monde. Cependant, il perdit en première instance, en appel, et son pourvoi en cassation fut rejeté, confirmant ainsi la véracité des faits.
L’arme fut ensuite restituée à la famille Moulay, qui décida de la léguer au Musée National du Moudjahid à Alger, afin de préserver la mémoire de cette époque sombre. Ce poignard, qui avait appartenu aux Jeunesses hitlériennes, est aujourd’hui un témoignage puissant des exactions commises durant la Bataille d’Alger, où Jean-Marie Le Pen servit pendant trois mois sous les ordres du tristement célèbre commandant Paul Aussaresses.
Cette nuit du 3 mars 1957 fut aussi celle où Larbi Ben M’Hidi, figure emblématique de la Révolution algérienne, fut assassiné par Aussaresses, par strangulation. Les destins de ces hommes, broyés par l’engrenage colonial, s’entrecroisent dans une tragédie qui révèle l’inhumanité de la répression.
Surnommé "Borniol" à Alger, en référence à une célèbre maison de pompes funèbres, Le Pen traîne derrière lui un passé macabre. Un surnom qu’il doit à son rôle pendant la guerre de Suez en 1956, où il commandait une section de parachutistes chargée d’enterrer les cadavres des Égyptiens dans des fosses communes. Croque-mort au Caire, tortionnaire à Alger : ce sobriquet résume tristement son parcours.
Grâce à Florence Beaugé et à la détermination de la famille Moulay, l’histoire de ce poignard a trouvé sa place dans la mémoire collective. Il reste un symbole du combat pour la vérité et contre l’oubli des violences du colonialisme.
Posté Le : 12/01/2025
Posté par : chouhada